Quels défis au développement de la production porcine en agriculture biologique en France ?
La production porcine sous cahier des charges agriculture biologique (AB) se développe peu, comparativement aux autres filières d’élevages. Cet article synthétise un travail collectif interdisciplinaire d’analyse des freins et leviers au développement du porc en AB en France. Il croise la vision d’acteurs de terrain, de la recherche et du développement.
Introduction
La production porcine conventionnelle fait l’objet de nombreuses critiques et controverses sur les registres de l’environnement, du bien-être animal et des modèles d’organisation de l’élevage et des filières. Une majorité des consommateurs souhaite le développement de systèmes alternatifs, parmi lesquels ceux mis en œuvre dans le cadre de l’agriculture biologique (AB) (Delanoue & Roguet, 2015). Pourtant, la production porcine européenne et française sous cahier des charges AB (CDC AB) se développe peu comparativement aux autres filières végétales ou animales. Le nombre de truies certifiées en AB a doublé entre 2016 et 2021, mais ne représente que 1,9 % du cheptel porcin (Agence Bio, 2022). À titre de comparaison, la part en AB des cheptels bovins allaitants et laitiers est respectivement de 5,7 et 8,4 %, et représente jusqu’à 20 % pour les poules pondeuses et 10 % des surfaces destinées aux productions végétales (Agence Bio, 2022).
En dépit de difficultés récentes, le contexte français présente des atouts favorables au développement du porc en AB. La demande en produits porcins, en particulier transformés, est forte. Par ailleurs, le porc étant omnivore, il peut valoriser des coproduits d’industries agricoles et alimentaires. Des complémentarités d’utilisation des ressources alimentaires avec les animaux ruminants et l’humain peuvent être mises en œuvre : le porc peut ainsi jouer un rôle clé dans la réduction du gaspillage alimentaire, objectif essentiel dans le développement de systèmes alimentaires durables. C’est un animal efficient dont les rejets ont des qualités fertilisantes favorisant la complémentarité avec les productions végétales (maraîchage, grandes cultures) et un usage en méthanisation. Le bouclage des cycles ainsi que l’optimisation des flux et des processus sont des éléments stratégiques pour mieux valoriser les ressources disponibles et accroître l’autonomie alimentaire, limiter les rejets polluants ainsi que développer et renforcer les services écosystémiques au sein des territoires. Le porc peut constituer un élément essentiel pour optimiser ces systèmes en AB.
Le développement ou changement d’échelle de l’élevage porcin en AB est considéré, dans cet article, sur l’ensemble de la filière, de l’amont à la production et jusqu’à la consommation. Il se matérialise en termes de volumes produits (en % du volume total de produits porcins), d’emplois, et de capacité à répondre aux attentes des consommateurs et des citoyens. Le processus de changement d’échelle passe principalement par i) l’augmentation du nombre de structures (production, transformation, commercialisation) afin de mailler tous les territoires, ii) le développement des structures existantes et iii) la structuration du système sociotechnique, de la chaîne de valeur et des moyens permettant de rendre la filière porcine biologique plus influente dans le jeu économique et social actuel (Agence d'ingénierie et de services, 2021). Ce développement inclut aussi la capacité de la filière à faire face aux évolutions des prix des matières premières (aliments, énergie, matériaux), aux risques de maladies infectieuses (cas de la peste porcine africaine), aux enjeux éthiques de l’élevage (arrêt de la castration et de la caudectomie), aux changements environnementaux et climatiques (limitation de l’empreinte environnementale et adaptation des animaux et des élevages), à la concurrence pour l'usage des terres, à la difficulté du renouvellement des générations en agriculture (faible attractivité des métiers de l’élevage) et aux évolutions du cadre réglementaire (mises aux normes des bâtiments et des parcours en lien avec la biosécurité).
Les objectifs de cet article sont, après une présentation de la structuration de la filière porcine en AB (partie 1), de présenter les freins et les leviers à son développement identifiés par le consortium ORIGAMI (encadré 1) à travers des entretiens semi-dirigés avec différents porteurs d’enjeux de cette filière (partie 2) puis de les mettre en perspective en proposant des thèmes de recherche (partie 3). Le contexte inflationniste actuel étant défavorable à l’élevage et à la consommation de produits porcins en AB, les perspectives proposées s’inscrivent dans une vision à long terme, en questionnant plus généralement la place de la production porcine en AB dans des systèmes agri-alimentaires durables.
1. La filière porcine sous cahier des charges AB
Le développement et la viabilité d’une filière reposent sur sa capacité à renforcer des équilibres et des interconnexions en termes de flux de matières, de finances, d’informations et de représentations, entre les maillons de la chaîne, entre les acteurs d’un même maillon et entre la filière et ses environnements géographique, économique, sociétal et politique. Les chiffres clés, les équilibres/déséquilibres et connexions qui caractérisent la filière porcine en AB permettent de poser les éléments de contexte.
1.1. Connexions entre acteurs et filières
La filière porcine en AB a connu de profondes mutations ces dernières années avec une augmentation du nombre de truies de 9 645 en 2016 à 19 287 pour 703 élevages en 2021 (Agence Bio, 2022 ; figure 1). L’augmentation du nombre d’élevages a été particulièrement importante en 2017, 2018 et 2019, avec respectivement un accroissement annuel de 14, 22 et 27 %, puis s’est ralentie en 2020 et 2021. Une répartition inégale des truies en AB est observée sur le territoire français, avec une production principalement présente en Nouvelle-Aquitaine, Bretagne et dans les Pays de la Loire, avec respectivement 30, 20 et 18 % du cheptel (Agence Bio, 2022), ce qui rappelle la répartition de l’élevage porcin conventionnel (80 % pour ces trois régions réunies dont 57 % en Bretagne) (FranceAgriMer, 2022a). La période de croissance a été caractérisée par l’arrivée aux côtés d’acteurs biologiques historiques, d’acteurs dits « mixtes », c’est-à-dire présents initialement dans la filière conventionnelle et qui ont développé des activités en AB, comme la coopérative Cooperl impliquée dans la production en AB depuis 2016 (Le Drézen, 2021). Cette mixité est un vecteur potentiel d’interactions et de dialogue entre les filières conventionnelles et en AB. La période de croissance de la production a aussi vu la structuration et la mise en synergie des acteurs 100 % en AB. Citons, par exemple, au niveau de la production, la création en 2018 de Forébio qui regroupe les organisations de producteurs de filières végétales et animales, parmi lesquelles Biodirect, Bretagne Viande bovine et Unébio pour le porc (Forébio, 2022). Par ailleurs, un partenariat, mis en place en 2013 et reconduit en 2019, lie l’association Les Porcs bio de France regroupant Bio Direct, Unébio, GIE Porc Bio Cœur de France et Porc Bio Atlantique, soit 80 % de la production française en 2018, et le groupe distributeur Système U. Ceci illustre les interconnexions entre les différents maillons et entre acteurs en AB et acteurs mixtes autour d’un projet commun de mise en marché, promotion et communication d’une gamme complète de produits porcins français biologiques vendus sous marque distributeur (FNAB, 2017 ; Coopérative U Enseigne, 2021).
1.2. Des équilibres fragiles entre l’offre et la demande
Le moteur principal de l’augmentation du nombre de producteurs et des volumes a été l’augmentation de la demande en produits certifiés en AB et la volonté de fournir de la viande française aux consommateurs (25 % des jambons en AB consommés en 2018 étaient importés des Pays-Bas ou du Danemark ; Interbio Occitanie, 2022). Après avoir atteint un maximum en 2019, la demande en produits porcins biologiques a ralenti en 2020 puis a diminué en 2021 et 2022. Les principales raisons évoquées sont l’augmentation des prix à l’achat, conséquence de l’accroissement des coûts de production lié au contexte climatique (sécheresses) et politique (guerre en Ukraine), qui ont conduit à des mauvais rendements agricoles et une augmentation du prix des ressources pour l’alimentation animale et de l’énergie, et à une baisse générale du pouvoir d’achat. Cet effet prix vient renforcer d’autres effets tels que la concurrence avec les productions locales et avec les autres mentions valorisantes, mais aussi l'évolution des régimes alimentaires… Fin 2022, l’offre en produits porcins en AB semble dépasser la demande de plus de 20 % (Jourdain, 2022). La planification de la production est donc fondamentale pour un développement pérenne de la filière porcine en AB. Or les évolutions de la demande sont parfois rapides. Elles s’expriment, suivant la nature des produits, sur des périodes de quelques mois (ex. baisse suite à l'inflation depuis février 2022), de quelques semaines, voire de quelques jours (ex. augmentation de la demande en vente directe et arrêt des ventes via la restauration hors domicile (RHD) lors du confinement en avril 2020 et variation de la demande estivale de produits à griller suivant la météo). La production porcine sous CDC AB peut difficilement s’adapter à des variations rapides ce qui rend difficile la synchronisation entre amont et aval. Les déséquilibres de marché apparus en 2020 ont conduit dans un premier temps à i) stocker une partie de la production (congélation de pièces ou de carcasses entières), ii) ralentir (en 2020), puis iii) stopper (en 2022) les nouvelles installations en AB (Faure et al., 2021). Des arrêts de production (arrêt de l’atelier ou « déconversion » momentanée) sont actuellement observés et planifiés pour 2023 pour tenter de réguler le déséquilibre entre l’offre et la demande (Jourdain, 2022).
En 2020, 35-40 % des carcasses étaient valorisées en viande fraîche et 60-65 % en charcuterie. Cette répartition est plus équilibrée que pour les produits issus de la filière conventionnelle pour lesquels la valorisation en viande fraîche est plus faible : 25 % (Agence Bio, 2021a). Comme pour la filière conventionnelle, les produits porcins en AB sont principalement vendus par la grande distribution qui commercialisait, en 2020, 60 % (en valeur) de la viande fraîche et 71 % des produits de charcuterie-salaisonnerie. Les circuits de commercialisation sont cependant diversifiés avec des ventes chez les distributeurs spécialisés (par exemple Biocoop) qui représentent 17 % en valeur de la viande fraîche et 25 % des produits de charcuterie-salaisonnerie. La vente directe, en boucherie-charcuterie traditionnelle et en RHD représente une faible part, surtout pour les charcuteries-salaisonneries (10-12 % en viande fraîche et 2 % en charcuteries-salaisonneries) (Agence Bio, 2021b).
Au-delà de la difficulté d’équilibrer l’offre à la demande, une difficulté supplémentaire non spécifique mais renforcée en filière en AB est celle de la gestion de l’équilibre carcasse ou équilibre matière (Symbiose, 2018 ; Faure et al., 2021). Historiquement, le jambon cuit est la pièce la plus demandée alors que des pièces telles que les épaules et longes sont plus difficiles à valoriser. La valorisation de l’ensemble de la carcasse implique de trouver des débouchés à ces pièces sur le marché en AB, de manière à assurer une rémunération qui couvre les surcoûts liés aux spécifications du CDC AB et de les répartir sur l’ensemble des pièces et pas uniquement sur celles les plus demandées, tout en maintenant un prix de vente abordable pour le consommateur. Pour limiter ces déséquilibres et partager les risques entre les différents maillons, certains opérateurs ont mis en place des outils de planification et de suivi de l’offre et des équilibres matières ainsi que de sécurisation des prix par contractualisation. C’est le cas au sein du partenariat entre Les porcs bio de France et Système U, où l’évolution du prix payé aux producteurs est indexée sur les variations du prix de l’aliment (FNAB, 2017). Les autres solutions de gestion de l’équilibre carcasse sont le développement de nouveaux débouchés via la transformation des pièces moins demandées.
1.3. Diversité des élevages et des voies de commercialisation
La valorisation de la production porcine en AB prend plusieurs voies qui croisent stratégies « de filière » et/ou « de territoire ». L’une n’est pas exclusive de l’autre, un même éleveur pouvant être impliqué dans des voies différentes. La stratégie « de filière » est celle développée par la filière longue qui représente environ 90 % du volume de la production de porcs en AB. La stratégie dite « territoriale » est celle mise en place par les éleveurs en circuit court qui, par la vente directe ou de proximité, créent du lien entre producteurs et consommateurs sur les territoires. Ces éleveurs produisent une part faible des volumes commercialisés (10-15 % pour la vente directe en 2019) mais représentent 50 % des élevages et sont présents sur tous les territoires en France. Une stratégie « territoriale » est aussi mise en place par les acteurs des filières longues qui cherchent à renforcer le lien amont avec les filières végétales. Ce lien peut se faire à l’échelle de l’exploitation dans le cadre de la valorisation des cultures produites sur l’exploitation, de la recherche d’une autonomie alimentaire élevée et de bouclage des cycles et/ou à l’échelle des territoires par la valorisation de cultures locales et de coproduits des entreprises de l’alimentation humaine (fromagerie, brasserie) dans une logique d’économie circulaire. Le fait que le porc soit omnivore lui permet de valoriser une variété de ressources disponibles, y compris des matières premières riches en fibres (fourrages grossiers ou coproduits tels que les drêches de brasserie) et ainsi d'accroître l’autonomie des exploitations et des territoires afin de réduire les pollutions et favoriser les services écosystémiques (Puech et al., 2022 ; Therond et al., 2017). Le lien au sol est inscrit dans le CDC AB avec une obligation réglementaire d’au moins 30 % des aliments qui doivent provenir de l’exploitation ou de la même région. Il est renforcé par les opérateurs 100 % en AB avec une obligation contractuelle de 50 % des aliments produits sur l’exploitation chez les éleveurs de Biodirect, BVB ou encore Unebio (ORAB Bretagne, 2018). Ce lien au sol est un élément important de couplage des productions animales et végétales favorisant le bouclage des cycles du carbone et de l’azote à l’échelle de l’exploitation.
À l’échelle des élevages, il existe une importante diversité de systèmes de production, ce qui peut être considéré comme un gage de résilience pour l’ensemble de la filière (Pfeifer et al., 2022). Au-delà de la diversité des circuits de valorisation de leurs produits (vente directe et/ou en filière longue) et de leur degré d’autonomie alimentaire, les systèmes d’élevages se distinguent par :
i) le type d’élevage avec, en 2020, une proportion quasiment identique de systèmes naisseurs-engraisseurs et engraisseurs (45 et 46 %) pour 9 % de systèmes naisseurs ;
ii) leur taille, sachant que 73 % des ateliers ont moins de 20 truies et représentent 15 % du cheptel et que 6 % des ateliers regroupent plus de 100 truies et représentent 40 % du cheptel ;
iii) le type de logement, avec des logements allant de bâtiment avec courette partiellement découverte à des systèmes plein air, sachant que si près de la moitié des truies en AB mettent bas en plein air, l’engraissement en plein air est beaucoup plus rare (1 % des porcs en croissance en 2018) et concerne principalement les élevages à faible effectif en raison de la surface nécessaire par animal et des contraintes liées à la biosécurité (clôtures des parcs) renforcées récemment du fait de la présence de la peste porcine africaine en Europe ;
iv) la génétique des animaux : bien que majoritairement identique à celle des élevages conventionnels, quelques éleveurs font le choix d’élever des animaux de race locale à faible effectif (ex. du Porc Blanc de l’Ouest pour lequel 90 % des élevages sont certifiés en AB) ;
v) le niveau de spécialisation, l’atelier porcin pouvant être un atelier principal ou un atelier de diversification au sein d’une exploitation. Ainsi 30 % des éleveurs de porc en AB sont aussi des éleveurs de ruminants laitiers ou allaitants (FNAB, 2022), à l’image de l’élevage porcin national (Roguet, 2023).
Figure 1. Caractéristiques de la filière porcine française en AB.
2. Les freins et leviers au développement de la production de porc en AB
2.1. Identification et analyse des freins et leviers recueillis lors d’entretiens d’acteurs
Des entretiens semi-directifs de 21 acteurs ont été réalisés entre avril et octobre 2021. Le choix des acteurs a été guidé par la recherche d’une diversité de filières (en AB ou mixte AB/conventionnelle, animales ou couplant animales et végétales), de structures professionnelles (maillon de la filière : amont, production, aval, taille, périmètre géographique…) et de fonctions à différents maillons de la chaîne (chercheur, vétérinaire, éleveur, acteur du développement agricole, journaliste, acteur de collectivité territoriale, responsables de filière, distributeur…). Ceci a permis de capitaliser une diversité de points de vue sans rechercher l’exhaustivité et faire ressortir des éléments ayant une valeur générique. Les entretiens ont été menés en trois temps : i) présentation de l’acteur et de sa structure ; ii) présentation d’un exemple de développement d’activité porcine en AB et apports de compléments en réponse aux questions des animateurs (deux personnes) et des auditeurs (une à douze personnes suivant l’entretien) ; et iii) synthèse où chaque enquêté était invité à citer explicitement trois freins, trois leviers, leur « futur idéal » et les besoins de recherche qu’il identifiait pour favoriser le développement du porc en AB. Les freins et leviers ont été soit exprimés de manière explicite et spontanément dans le troisième temps de l’entretien par les acteurs, soit identifiés par les animateurs à partir du discours du deuxième temps de l’entretien (tableau 1a). Il ne sera pas fait de distinction entre ces deux sources dans la suite de cet article.
Les 21 entretiens ont permis d’identifier 164 freins et 231 leviers (tableau 1). Les données recueillies ont été compilées dans une base de données (une ligne par frein ou levier). Chacun des freins et leviers a été associé à l’acteur interviewé et a été caractérisé par le niveau d’organisation (de l’animal au territoire – tableau 1b) et le maillon de la chaîne alimentaire/valeur (de l’amont au consommateur – tableau 1c) de l’exemple auquel il se réfère. Les freins et leviers ont été regroupés en catégories (tableaux 1d et 1e) pour en simplifier l’interprétation.
a. Nature des freins et leviers | |||||
Nb de freins | Nb de leviers | ||||
Exprimés | 62 | 48 | |||
Identifiés | 102 | 183 | |||
Total | 164 | 231 | |||
b. Niveaux d’organisation | c. Maillons | ||||
Nb de freins | Nb de leviers | Nb de freins | Nb de leviers | ||
Animal ou élevage | 46 | 43 | De l’amont à la production | 50 | 43 |
De l’élevage à la filière | 12 | 13 | Production uniquement | 36 | 67 |
Filière uniquement | 34 | 46 | Transformation uniquement | 12 | 18 |
Filière – territoire | 17 | 37 | De la production à la distribution | 54 | 71 |
De l’élevage au territoire | 55 | 92 | De la distribution à la consommation | 12 | 32 |
d. Catégories de leviers | e. Catégories de freins | ||||
Nb de leviers | Nb de freins | ||||
Débouchés des productions | 46 | Coexistence des filières | 12 | ||
Conduite d’élevage | 57 | Coûts de production | 16 | ||
Communication | 30 | Absence de débouché | 28 | ||
Métiers de l’élevage | 37 | Disponibilité des approvisionnements | 21 | ||
Nouvelles formes d’élevage, de transformation et de consommation | 61 | Image de la production porcine dans la société | 16 | ||
Réglementation | 28 | ||||
Conduite d’élevage | 37 | ||||
Temporalités | 6 | ||||
f. Nature des filières | |||||
Nb de freins | Nb de leviers | ||||
AB uniquement | 70 | 116 | |||
Mixte | 94 | 115 |
Tableau 1. Caractéristiques des freins et leviers identifiés lors des entretiens.
(a) Nature des freins et des leviers, (b) niveaux d’organisation, (c) maillons sur lesquels s’expriment les freins et leviers, catégorisation (d) des leviers et (e) des freins, (f) nature des filières dans lesquelles les acteurs sont engagés.
Afin de proposer une vision d’ensemble des freins et leviers et d’associer des leviers potentiels pour lever des freins, une analyse en composantes multiples des données (ACM) a été réalisée, suivie d’une classification ascendante hiérarchique (Ward, 1963). Ces méthodes sont couramment utilisées pour analyser des jeux de données décrits par plusieurs variables qualitatives et établir des typologies (Hilal et al., 2011 ; Puech & Mignolet, 2022).
La nature des catégories étant différente entre les freins et les leviers, nous avons réalisé deux ACM indépendantes. Trois variables ont été retenues en tant que variables principales pour la construction des axes factoriels : le niveau d’organisation auquel s’exprime le frein ou le levier (tableau 1b), le maillon du système agri-alimentaire concerné (tableau 1c) et la catégorie de frein ou de levier (tableau 1d ou 1e). La source des freins et leviers (tableau 1a) et l’engagement des acteurs dans des filières (tableau 1f) sont des variables supplémentaires. Nous avons regroupé ensuite les résultats des deux ACM, pour étudier les typologies des freins et des leviers en fonction des maillons et des niveaux d’organisation auxquels ils s’expriment.
2.2. Une diversité de freins et leviers selon les maillons et niveaux d’organisation
Sept types de freins et six types de leviers sont mis en évidence par les deux ACM. Dans les deux typologies (freins et leviers), les variables Maillon et Niveau d’organisation sont structurantes et pour partie liées entre elles. La projection des typologies obtenues par les deux ACM permet d’identifier sept groupes associant freins et leviers (figure 2). Certains freins étant aussi des leviers potentiels, aussi nous utiliserons le terme « déterminant » quand la distinction entre frein et levier n’est pas pertinente.
Catégories | Freins/ leviers | Groupe | Total par catégorie | Thèmes de recherche ou de recherche-action | ||||||
1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | ||||
Conduite d'élevage | Freins | 18 | 1 | 6 | 8 | 4 | 37 | Construire des outils et références techniques adaptées aux contraintes du CDC AB et à la diversité des systèmes d'élevage | ||
Leviers | 19 | 1 | 17 | 3 | 17 | 57 | ||||
Réglementation | Freins | 12 | 5 | 4 | 4 | 1 | 2 | 28 | ||
Coûts de production | Freins | 6 | 1 | 2 | 6 | 1 | 16 | |||
Débouchés | Absence (Freins) | 4 | 3 | 6 | 2 | 8 | 5 | 28 | Favoriser une approche systémique pour promouvoir les débouchés et un meilleur partage de la valeur | |
Présence (Leviers) | 7 | 4 | 6 | 3 | 18 | 8 | 46 | |||
Coexistence des filières | Freins | 1 | 2 | 2 | 1 | 4 | 2 | 12 | Raisonner les complémentarités entre élevages et filières en AB et conventionnelles à une échelle territoriale | |
Disponibilité des approvisionnements | Freins | 3 | 1 | 7 | 6 | 3 | 1 | 21 | ||
Nouvelles formes d'élevage, de transformation, de consommation | Leviers | 2 | 4 | 38 | 7 | 6 | 4 | 61 | ||
Métiers de l'élevage | Leviers | 10 | 1 | 7 | 3 | 13 | 3 | 37 | Adapter les contenus et méthodes pédagogiques aux différents publics cibles : enseignants-formateurs, lycéens et étudiants, éleveurs, conseillers | |
Image de la production porcine | Freins | 2 | 2 | 1 | 4 | 4 | 3 | v 16 | Communiquer sur la production porcine en AB et sur les enjeux de l'AB auprès des consommateurs et des citoyens | |
Communication | Leviers | 1 | 3 | 1 | 2 | 23 | 30 | |||
Temporalité | Freins | 2 | 4 | 6 | ||||||
Total par groupe | 84 | 25 | 98 | 29 | 29 | 77 | 52 |
a. Des déterminants techniques spécifiques des animaux et des systèmes d’élevage
La majorité des déterminants relevant de la conduite d’élevage et de la gestion technique des animaux et des troupeaux sont dans le groupe 1 comprenant 18 freins/37 et 19 leviers/57 des catégories conduite d’élevage sur les 84 déterminants du groupe 1 (tableau 2). Ces déterminants sont spécifiques des niveaux d’organisation animal et élevage et sont portés par les maillons amont et production. Ces déterminants sont associés i) à la génétique des animaux, citée comme peu adaptée à des systèmes biologiques, en particulier pour des systèmes plein air ; ii) à la conduite de la reproduction (synchronisation des chaleurs) ; iii) à l’alimentation des animaux ; et iv) à la gestion sanitaire (parasitisme). Ils expliquent des coûts de production élevés (n = 6) : coûts d’alimentation en lien avec la disponibilité des aliments en AB et coûts liés aux bâtiments du fait de l’augmentation de la surface par animal et à l’accès à l’extérieur (courette ou parcours). Les déterminants techniques sont associés, au sein de ce groupe 1, à des freins liés i) à la réglementation (n = 12) comme l’interdiction de la castration à vif (qui s’applique depuis 2022 à toute la production porcine en France) et de la non-caudectomie qui augmente le risque de cannibalisme ou ii) aux spécifications du CDC AB quant à l’usage très restreint des médicaments, à l’interdiction des hormones pour synchroniser les cycles sexuels des femelles et des additifs alimentaires tels que les acides aminés de synthèse. L’évolution rapide de la réglementation (environ tous les 10 ans) limite la visibilité, pour les éleveurs, des conduites à mettre en œuvre sur le long terme. La diffusion, par des organismes de développement, de références ou d’études de cas serait un élément facilitant la conversion de systèmes d’élevage conventionnels en plein air vers l’AB (n = 10). Les formations et le partage de connaissances et d’expériences (notamment sur l’évolution du métier d’éleveur et/ou des repères techniques) au sein de réseaux concourent à lever certaines difficultés. Plus marginalement, le développement de certains débouchés (vente directe) et de la contractualisation (en filière longue) sont également des facteurs favorisants (quatre freins et sept leviers).
Les 25 déterminants du groupe 2 (tableau 2) sont aussi spécifiques du niveau élevage et portés par les acteurs de l’amont et de la production (figure 2). Ils concernent la réglementation (n = 5), en particulier son évolution rapide et la difficulté à s’y adapter (castration, biosécurité). Du point de vue des débouchés, les acteurs citent les incertitudes sur l’évolution du marché du porc en AB et la volatilité des prix comme un frein à son développement. La contractualisation sur le long terme est citée comme un levier pour structurer et stabiliser les débouchés pour la commercialisation du porc AB en filière longue. La multiplicité des mentions valorisantes (Haute Valeur Environnementale, sans antibiotiques, Label Rouge, Bleu Blanc Cœur…) est aussi vue comme un frein par les acteurs de la production.
Ces déterminants spécifiques du maillon élevage sont cohérents avec ceux identifiés dans un travail préliminaire d’entretiens de 11 éleveurs (encadré 2).
En 2020, quatre étudiantes de l’ENSAT ont analysé les avis et expériences de quatre éleveurs en AB et sept éleveurs conventionnels pour identifier des freins et des leviers à la conversion et l’installation en AB. L’arbre décisionnel ci-dessous synthétise l’avis de ces éleveurs.
Le frein individuel majeur est l’opinion préétablie de l’éleveur sur la filière en AB. Un des leviers est de renforcer la diffusion des connaissances sur la filière porcine en AB dans les formations agricoles afin de mieux former les futurs éleveurs et conseillers.
Le deuxième frein repose sur les incertitudes au niveau des débouchés, en lien avec le prix très élevé de la viande de porc en AB comparativement à la viande de porc issue d’élevage conventionnel. Le levier associé serait de diminuer les charges en AB en favorisant les cultures des matières premières et la fabrication des aliments sur la ferme. Un autre levier évoqué est le développement de la transformation à la ferme et de la vente directe, même si cela modifie les métiers de l’éleveur et augmente fortement la charge de travail et les investissements nécessaires.
Enfin, des questions techniques liées à la conduite d’élevage sont identifiées comme frein à l’installation ou à la conversion en AB, avec notamment des préoccupations sur l’accès à des ressources alimentaires locales et, pour les éleveurs engraisseurs, la disponibilité de porcelets à proximité. Tous ces freins font écho aux préoccupations des éleveurs par rapport à la rentabilité des élevages et à leur temps de travail. Ces éleveurs rapportent aussi une incohérence des consommateurs qui veulent manger local, mais ne veulent pas d’exploitations porcines près de chez eux.
b. Des déterminants impliquant le développement de nouvelles formes d’élevage, de transformation et de consommation
Les déterminants du groupe 3 (29 freins et 69 leviers) s’expriment à tous les niveaux d’organisation et sont portés par des maillons allant de la production à la distribution. Les leviers concernent essentiellement le développement de nouvelles formes d’élevage, de modes de transformation ou de consommation (38 sur les 61 de la catégorie), en complémentarité de leviers situés au niveau des conduites techniques (tableau 2). La diversification des activités (naissage, engraissement, vente directe, mixité des circuits de commercialisation, fabrication d’aliment à la ferme ou valorisation de coproduits sur les élevages pour favoriser l’autonomie alimentaire…) et la création de nouvelles formes de transformation (abattage à la ferme, outils de transformation collectifs) sont citées comme les principaux leviers pour le développement du porc biologique. L’accompagnement par les politiques publiques (en particulier les collectivités locales) et la présence des structures de formation sont cités comme des éléments indispensables pour accompagner les transitions tant au niveau des élevages que des territoires. Ces leviers sont associés au sein de ce groupe 3 à des freins qui témoignent d’une forme de verrouillage à l’interface entre les conduites et les techniques en élevage (n = 6), l’approvisionnement des élevages (n = 7) et les débouchés pour les produits (n = 6). La valorisation des produits y est citée comme une des principales difficultés, tant du point de vue des prix de vente (saturation du marché, prix élevé pour des produits issus de races rustiques) que de la difficulté de valorisation de certains produits ou productions (pas ou peu de débouchés des animaux de races rustiques, outils d’abattage et de transformation peu adaptés pour des faibles volumes, plus grande hétérogénéité des carcasses). Ces contraintes sont perçues comme d’autant plus fortes que les principaux éléments nécessaires à la production (alimentation animale, foncier) sont peu disponibles et représentent un coût élevé pour les exploitations agricoles. L’hétérogénéité des performances techniques, en termes de qualité de carcasse, notamment du taux de muscle des pièces (TMP) et la faible taille des lots, est difficilement valorisable avec les outils de transformation actuels, présents principalement dans les régions spécialisées.
c. Des déterminants liés aux débouchés des produits porcins
Une part importante des déterminants relatifs aux débouchés sont présents dans le groupe 6 qui comprend 8 freins/28 et 18 leviers/46 des catégories débouchés, soit 26 déterminants sur les 77 du groupe 6 (tableau 2). La maîtrise de l’équilibre carcasse, la spécialisation des sites de transformation, la construction tarifaire et l’absence de structuration de la demande représentent des difficultés, présentées dans le § 1.2, notamment du fait de l’inertie des différents maillons limitant le développement de nouveaux produits. L’organisation des filières et leur pilotage (poids des groupements, arrivée d’opérateurs nationaux) sont cités comme un frein à l’installation et à la conversion d’élevages biologiques. Inversement, le pilotage de la production par l’aval des filières est perçu par ces mêmes acteurs comme des leviers, notamment à travers la segmentation du marché de la production porcine biologique et un élargissement de la gamme de produits (particulièrement pour assurer l’équilibre carcasse).
Le groupe 6 contient aussi 21 déterminants liés à la conduite d’élevage (tableau 2). Ainsi l’évolution de contraintes techniques en lien avec la réglementation et le CDC AB (alimentation animale, non-castration, biosécurité en plein air) est citée par les acteurs, principalement d’envergure nationale, comme un verrouillage au développement du porc en AB. La fabrication d’aliments à la ferme, l’élevage plein air ou la valorisation de coproduits à l’échelle ferme ou territoire local sont cités comme leviers ayant un impact favorable pour l’ensemble des maillons du système agri-alimentaire.
Enfin, les déterminants relatifs à la formation et à l’accompagnement des éleveurs et à l’attractivité et l’image du métier d’éleveur porcin biologique (décrit comme moins technique et devant assumer une baisse de production vis-à-vis de l’élevage conventionnel) sont également retrouvés largement dans ce groupe (13 leviers/37 de la catégorie métiers de l’élevage et 4 freins/16 de la catégorie image de la production ; tableau 2), soulignant l’importance de l’implication de l’ensemble des maillons de la filière sur ces thématiques.
d. Des déterminants liés à la communication
Plus des deux tiers des déterminants liés à la communication (23/30 ; tableau 2) sont retrouvés dans le groupe 7 correspondant spécifiquement aux maillons de la distribution et de la consommation.
La multiplication des mentions valorisantes est décrite, comme dans le groupe 2, comme un frein au développement de l’AB, en particulier du point de vue de la visibilité par le consommateur. Les prix de vente des produits porcins en AB sont très élevés par rapport au conventionnel avec un rapport de prix souvent voisin de trois, ce qui est plus important que pour les viandes bovines et de volaille. D’un autre point de vue, c’est le prix de la viande porcine non AB qui est considéré comme pas assez élevé par certains acteurs interviewés, ce qui peut être un frein à l’achat de produits porcins biologiques, en particulier pour la RHD. Les principaux leviers de ce groupe se réfèrent principalement à la communication des valeurs portées par l’AB auprès des consommateurs et à l’éducation aux savoir-faire culinaires. Les pertes de tradition et savoir-faire culinaires sont également citées comme des freins, notamment dans la perspective de valorisation de certaines pièces bouchères nécessaire pour atteindre l’équilibre carcasse.
L’évolution des attentes de la distribution/consommation (besoins, prix de vente) est rapide (de l’ordre de quelques mois) comparativement à l’inertie pluriannuelle des activités de production (4 freins/6 de la catégorie temporalité) : cette différence de délai peut être source de tensions pour répondre aux attentes des consommateurs et à leurs évolutions.
e. Autres déterminants relevant d’un seul maillon du système agri-alimentaire et concernant plusieurs niveaux d’organisation
Les 29 déterminants du groupe 4 sont assez hétérogènes (tableau 2). Ils s’expriment exclusivement au maillon de la production et concernent différents niveaux d’organisation : de l’élevage au territoire. Ils sont constitués par 6 des 16 freins liés aux coûts de production : coûts structurels de conversion à l’AB (en particulier ceux des bâtiments d’élevage) et charges (notamment liées à l’alimentation) et par conséquent faibles marges économiques. L’absence de ressources et de références techniques (n = 8 ; maîtrise de la reproduction des cochettes, auto-renouvellement, conduite de la maternité en plein air, maîtrise du parasitisme) et une réglementation difficilement applicable aux spécificités des systèmes en AB (n = 4 ; biosécurité, castration) représentent des freins à la conversion des élevages. La faible structuration des filières en AB, en particulier dans des territoires peu spécialisés se traduit par l’absence d’outils d’abattage et/ou de transformation (pas de coexistence avec la filière conventionnelle, n = 2) et par peu d’ateliers de naissage biologiques conduisant à des difficultés d’approvisionnement (n = 6).
Comme pour le groupe 4, les déterminants du groupe 5 sont hétérogènes bien que s’adressant spécifiquement au maillon de la transformation. L’évolution des pratiques alimentaires (diminution de la consommation de protéines animales), le faible intérêt par les consommateurs pour les pratiques d’élevage (comparativement aux composantes gustatives et tarifaires) et le coût des produits sont cités comme des freins au développement de l’AB par les transformateurs qui soulignent aussi leur manque de temps pour communiquer sur les produits en AB. Le développement d’outils de transformation collectifs et l’engagement des collectivités territoriales représentent des leviers. La diversification des débouchés pour les transformateurs (RHD notamment dans le cadre des lois Egalim) et le développement de magasins de producteurs ainsi que la communication auprès du grand public sont cités comme des pistes à explorer, en particulier dans des territoires peu spécialisés en production porcine.
3. Quels enseignements pour la recherche et le développement ?
L’analyse des déterminants au développement de la production porcine sous CDC AB, en croisant les différents niveaux d’organisation et maillons, nous a conduits à identifier cinq thèmes de recherche (tableau 2). Les adresser implique d’acquérir de nouvelles connaissances, d’intégrer les connaissances existantes à différents niveaux d’organisation, de travailler sur les interactions entre les maillons et les acteurs. Ceci a pour objectif de lever les verrous sociotechniques (Meynard et al., 2018) identifiés par les acteurs et qui expliquent la présence marginale du porc en AB dans la production de viande porcine en France. Les aspects techniques et de conduite d’élevage en lien avec la réglementation et le CDC AB qui relèvent essentiellement des niveaux d’organisation animal et élevage et des maillons production et amont (groupes 1 et 2) sont mis en perspectives au § 3.1. Le développement de nouvelles formes d’élevage, de transformation et de consommation impliquant des complémentarités entre acteurs au sein de la filière en AB et la coexistence des filières sur les territoires (groupes 3 et dans une moindre mesure 5) qui concernent la plupart des niveaux d’organisation et des maillons du système agri-alimentaire sont développés au § 3.2. Le thème des débouchés des produits porcins en AB concernant les niveaux d’organisation filière et territoire et impliquant l’ensemble des maillons de la production à la consommation (groupe 6 essentiellement) est mis en perspective au § 3.3. Ces premiers éléments de perspectives sont orientés par les compétences et domaines d’action des participants du consortium ORIGAMI et doivent être appréhendés comme une base de réflexion pour la construction de projets de recherche multidisciplinaires et collaboratifs avec des acteurs de la filière porcine biologique. Les thèmes de la formation et de l’accompagnement des éleveurs et futurs éleveurs à la conversion ou l’installation et celui de la communication ne seront pas abordés dans cette partie 3. Ils relèvent de démarche de type recherche-action impliquant des compétences en sciences humaines et sociales insuffisamment développées au sein du consortium. Un apport du projet sur le thème de la communication est la publication d’un ABCdaire présentant les spécificités du porc biologique (Bonnefont et al., 2022). Il s’inscrit en complément des ressources et des offres de formation proposées par les partenaires d’ORIGAMI, de l’Agence Bio (https://www.agencebio.org/), de la FNAB (https://www.produire-bio.fr/filiere-porcs-bio/) et des chambres d′agriculture (https://produire-porc-bio.chambre-agriculture.fr/).
3.1. Construire des outils et des références techniques adaptés aux contraintes du CDC AB et à la diversité des systèmes d’élevage
La production de références techniques pour améliorer les conduites alimentaires, la gestion sanitaire, la reproduction, ou encore la sélection d’animaux adaptés est primordiale pour participer au développement de la production porcine sous CDC AB. Les dernières références techniques publiées en production porcine biologique sont relativement anciennes puisqu’elles datent de 2015. De plus, elles ne reflètent pas la diversité des élevages, car d’une part, les petits ateliers (moins de 25 truies) et les gros ateliers (plus de 150 truies) sont peu représentés, et d’autre part, les élevages en vente directe n’intègrent que rarement ces dispositifs collectifs. L’actualisation des références techniques est difficilement réalisable car les données de gestion technique des troupeaux de truies et de gestion technico-économique (GTTT et GTE) ne sont, à ce jour, plus publiques. En outre, l’hétérogénéité des élevages de porc français sous CDC AB en termes de taille, de pratiques et de valorisation rend difficile l’établissement de références représentatives de chaque système.
La création de cas-types tenant compte de cette diversité des élevages pourrait être une solution pour mieux caractériser la diversité des systèmes d’élevage. Les principales modalités à prendre en compte seraient les caractéristiques de l’élevage (niveau de spécialisation, taille) et l’orientation de l’élevage (naisseur, naisseur engraisseur, engraisseur), le type génétique, le logement des truies (plein air ou non), le type sexuel (porcs mâles castrés ou non), le niveau d’autonomie alimentaire, le circuit de vente. Cette diversité de systèmes conduit à une hétérogénéité des carcasses, qui peut aussi être rencontrée au sein d’un même élevage entre lots et entre individus d’un même lot. Elle résulte de multiples facteurs d’élevage, qui souvent interagissent, en particulier le type génétique mais également la stratégie alimentaire très diverse suivant les éleveurs mais aussi éventuellement la saison au sein d’un même élevage (composition de la ration – avec la difficulté d’équilibrer les apports nutritionnels notamment en acides aminés avec les besoins des animaux), ainsi que le type de logement associé à une variabilité des conditions climatiques… (Lebret & Čandek-Potokar, 2022).
Il semble en outre pertinent de mettre en place un réseau de fermes porcines en AB de référence, cohérent avec les cas-types proposés, avec comme objectif une analyse des pratiques en lien avec la qualité des carcasses, en tenant compte des différents débouchés : filière longue ou courte. Un des résultats serait la rédaction de fiches conseils sur les effets des composantes du système sur les performances techniques des lots d’animaux à l’abattage. Ce réseau d’élevages permettrait aussi d’objectiver les conséquences des pratiques mises en œuvre en réponse au CDC AB en termes de valeur extrinsèque des produits, qu’il s'agisse du bien-être animal ou des performances environnementales qui sont au cœur de la différenciation des productions. L’acquisition de données en élevage est en outre un préalable à l’élaboration d’outils de simulation des performances zootechniques, économiques et environnementales permettant de tester de nouvelles pratiques et/ou de piloter les systèmes d’élevage. Ces données seraient complémentaires aux résultats acquis lors des projets récents ou en cours (CASDAR Sécalibio, Valorage, Farinelli, H2020 Ok-Net Ecofeed…). Ce réseau permettrait aussi d’acquérir des informations sur le travail en élevage en lien avec le type de conduite ou de bâtiment. En effet, le travail en élevage de porc biologique est insuffisamment étudié et pourtant identifié comme un levier pour développer la production. Les aspects relatifs au travail : temps, pénibilité et charge mentale, semblent des points essentiels à investiguer avec l’appui de compétences en sciences humaines et sociales.
Les modifications liées aux évolutions réglementaires, notamment du CDC AB, sont parfois difficiles à mettre en place pour les éleveurs. Afin de pouvoir conseiller et accompagner les éleveurs dans leurs mises aux normes, il est important de mettre en place des études et expérimentations en élevage expérimental et commercial, afin de tester des solutions et d’en d’objectiver les conséquences en amont de la date d’application. Par exemple, l’accès à l’extérieur des truies en lactation va nécessiter d’importants travaux pour une majorité des éleveurs en AB avec naissage en bâtiments. La mise en place d’études préalables permettant d’établir les principales recommandations pour la construction de ces courettes apparaît incontournable. De même, la question de l’alimentation 100 % AB des jeunes animaux, dont l’échéance réglementaire est programmée au 31 décembre 2025, mériterait d’être investiguée afin d’acquérir des premières références techniques sur le sujet. En effet, un passage à une alimentation 100 % AB pour les jeunes animaux accroît la difficulté d’équilibrer les apports nutritionnels de la ration par rapport aux besoins des animaux, notamment en acides aminés. Par ailleurs, il n’existe pas, aujourd’hui, de sélection génétique propre à l’élevage biologique. Pourtant, des animaux rustiques, potentiellement moins exigeants d’un point de vue alimentaire, et une prolificité moindre des truies pourraient permettre de réduire les pertes avant sevrage et limiter les conséquences d’une alimentation 100 % AB sur la croissance des jeunes animaux.
3.2. Raisonner les complémentarités entre élevages et filières en AB et conventionnelles à une échelle territoriale
D’après une majorité d’acteurs des filières de porc en AB, l’échelle du territoire est structurante dans le développement de l’AB pour organiser la circularité des flux de matières, les infrastructures de transformation, la gestion de la biosécurité, la production de références technico-économiques et l’équilibre des marchés. C’est également l’échelle d’un dialogue possible, encore peu fréquent, entre éleveurs et acteurs des filières biologiques ou conventionnelles.
Pour faire face à la rareté des aliments pour animaux biologiques, en particulier des protéines végétales, accrue dans le contexte d’instabilité climatique, il semble nécessaire d’améliorer le bouclage des cycles des nutriments entre productions végétales dédiées à l’alimentation animale, et effluents d’élevage à valeur fertilisante. Ces cycles impliquent des flux entre exploitations voire au-delà, qui seraient à imaginer comme des systèmes de polyculture-polyélevage territoriaux (Moraine et al., 2017 ; Asai et al., 2018). Ces complémentarités doivent donc dépasser les échanges ponctuels de matière entre exploitations spécialisées (céréales, paille, effluents) pour aller vers des coordinations spatiales et temporelles fortes. Ces synergies devraient être fédérées par des acteurs structurants comme les coopératives agricoles. Leur organisation implique d’engager les acteurs pour la sécurisation de l’approvisionnement en aliment (contrats de long terme, achats groupés, utilisation des coproduits issus de céréales, invendus, drèches…).
L'organisation territoriale se fonde ainsi sur une gestion coordonnée des ressources pour les systèmes de production végétaux et animaux mais également sur la mutualisation des systèmes de transformation et de distribution. La difficulté d’accès à des abattoirs et des outils de transformation à proximité des exploitations AB, avec un « maillage » insuffisant sur certains territoires, du fait du nombre réduit d’élevages et donc de la profitabilité limitée pour ces opérateurs, et leur multiplicité (provende, abattage, découpe, transformation, séchage) apparaissent également comme des freins majeurs au développement de l’élevage de porc sous CDC AB (voir, par exemple, la localisation de la production porcine biologique en Bretagne ; ORAB Bretagne, 2018). Une des réponses évoquées serait de faciliter l'implantation d’abattoirs mutualisés mixtes et flexibles (abattoirs mobiles territoriaux…) et d’outils de transformation collectifs permettant de relocaliser la production et la transformation dans le territoire. Un accompagnement par les collectivités apparaît nécessaire pour planifier les moyens de production et de transformation en fonction de la demande en produits porcins en AB, tout en tenant compte des complémentarités entre filières en AB et conventionnelle. L'organisation des flux de matières et la recherche de complémentarités à l’échelle du territoire soulèvent plusieurs questions. Sur le plan technique, les travaux sur la nutrition animale et la génétique doivent être poursuivis pour connaître la capacité des porcs à valoriser des coproduits et des déchets alimentaires (van Selm et al., 2022). En termes organisationnels, elles impliquent des changements i) en adaptant le nombre de porcs en AB et conventionnels dans un territoire en fonction des surfaces de cultures disponibles et mobilisables et ii) en réorganisant les filières (répartition entre élevages naisseurs et engraisseurs, biologiques et conventionnels) en fonction de la présence ou du potentiel de développement des infrastructures d’abattage, de transformation et de commercialisation.
Des travaux de reconception du métabolisme territorial (Dourmad et al., 2019 ; Marty et al., 2022) pourraient permettre de concevoir un maillage des exploitations et des flux entre exploitations et des infrastructures de la chaîne de valeur pour limiter le coût énergétique de ces flux. Il s’agit notamment de définir l’échelle pertinente d’organisation des flux, entre « territoires » très locaux et grandes régions, voire la France entière. Cette approche du métabolisme territorial doit passer par des coopérations nouvelles entre différentes filières, à tous les maillons de la chaîne agri-alimentaire, pour déboucher sur des stratégies communes et une forme de planification à long terme, basées sur le partage d’informations sur les ressources disponibles, les besoins identifiés, et appuyées par des indicateurs d’impacts environnementaux ainsi que d’autres critères de durabilité, sociaux et économiques, liés aux enjeux du territoire concerné. Cette approche de recherche implique une participation des différents acteurs et parties prenantes du territoire pour coconstruire des projets.
3.3. Favoriser une approche systémique pour promouvoir les débouchés et un meilleur partage de la valeur au sein des systèmes alimentaires
Au niveau de l’élevage des animaux et du maillon production, les principaux freins identifiés par les acteurs concernant les produits et débouchés sont d’ordre technique, avec notamment l’hétérogénéité des carcasses en poids et en taux de muscles des pièces (TMP), qui déterminent leur valeur commerciale. Cette hétérogénéité, ainsi que les qualités sensorielles, nutritionnelles et technologiques des viandes, résulte des effets de facteurs d’élevage qui déterminent la croissance des animaux et la composition de leurs carcasses en tissus maigres et gras. L’hétérogénéité de qualité des carcasses et des viandes ne résulte donc pas directement des spécifications du CDC AB mais de la variabilité des conditions d’élevage et des pratiques que les éleveurs adoptent pour y répondre (Prache et al., 2022). Au niveau réglementaire, l’obligation d’anesthésie et d’analgésie pour la castration des porcelets peut conduire des éleveurs à faire le choix d’élever des porcs mâles non castrés. Malgré la meilleure efficacité alimentaire des mâles non castrés, permettant une réduction du coût de production et des rejets azotés, leur élevage reste minoritaire en AB en raison des risques accrus de comportements délétères (montes et agressions) entre animaux et surtout du risque d’odeurs désagréables au moment de la cuisson des viandes (« odeurs sexuelles » liées à la présence d’androsténone et/ou de scatol). Les carcasses de porcs mâles non castrés, plus maigres que celles des mâles castrés ou femelles, sont aussi moins bien adaptées à certaines transformations telles que les charcuteries sèches (Lebret & Čandek-Potokar, 2022). Il est cependant possible de réduire ces risques via les pratiques d’élevage et le choix de types génétiques adaptés (Parois et al., 2018). Les premiers résultats issus de recherches en cours (CASDAR Farinelli & H2020 PPILOW) indiquent que la prévalence des carcasses « odorantes » détectées en abattoir ne semblerait pas supérieure en AB par rapport à la production conventionnelle, en dépit d’une forte variabilité entre les élevages (Prunier et al., données non publiées). Les travaux doivent être poursuivis pour objectiver les conséquences de chacun des facteurs d’élevages sur les différentes dimensions de la qualité des carcasses et de la viande et leurs variabilités.
Aux maillons de la transformation et de la commercialisation des charcuteries-salaisons, le prix des produits est un principal frein au développement de la filière AB. Le coût de production des porcs sous CDC AB est plus élevé que celui des porcs conventionnels. Les produits porcins en AB sont consommés essentiellement sous forme de charcuteries. La compétitivité des prix rendus au consommateur est conditionnée par le choix de transformations simples telles que la saucisserie fraîche ou la viande fraîche tranchée, la fabrication de produits peu élaborés permettant de ne pas accentuer l’écart de prix par rapport aux charcuteries conventionnelles. Ainsi, les fabrications de produits crus ou cuits sont à privilégier dans l’élaboration de nouvelles recettes, par rapport à celles de produits secs, sauf à créer de la valeur ajoutée par le développement de nouvelles recettes ou de produits très haut de gamme à l’instar des jambons ibériques Bellota. Il est à noter que l’évolution récente du règlement européen (Commission Européenne, 2021) concernant les doses maximales de nitrite ou de nitrate de sodium pour la production de saucissons secs biologiques est un réel challenge pour les transformateurs car les doses autorisées sont insuffisantes pour assurer la qualité sanitaire et organoleptique de ces produits. En outre, dans le contexte actuel, la marge distributeur peut représenter jusqu’à 34 % du prix de vente consommateur (FranceAgriMer, 2022b), ce qui accentue le différentiel de prix entre produits issus d’élevages conventionnels ou sous label AB en filière longue.
Par ailleurs, des schémas de valorisation permettant de valoriser l’intégralité des pièces des carcasses des porcs, abats inclus, sont nécessaires pour optimiser le prix de vente de chaque pièce. « Dans le cochon, tout est bon… » à condition que tout soit effectivement valorisé. Ainsi, les itinéraires de transformation pour lesquels des opérateurs économiques achètent uniquement quelques pièces auprès de découpeurs rendent pour ces derniers, la valorisation ardue de l’intégralité des carcasses, tant d’un point de vue de l’équilibre matière que de la logistique à mettre en œuvre pour distribuer l’intégralité des pièces de découpe. Le besoin de valorisation de l’ensemble des pièces est renforcé en AB comparativement à la production conventionnelle. En effet, faire reposer le surcoût de production sur quelques pièces très demandées (jambon notamment) et déclasser les pièces les moins demandées accentuent le différentiel de prix entre produits conventionnels et en AB. Par conséquent, des essais de modes de transformation simples et une valorisation intégrale des carcasses (viandes tranchées, saucisserie, produits élaborés cuits) doivent être mis en place. Pour ce faire, les circuits courts tels que celui des éleveurs-transformateurs, ou des circuits plus longs avec de fortes coopérations entre les différents maillons semblent les plus adaptés. Encore faut-il qu’au niveau des infrastructures, le maillage (nombre, répartition sur le territoire) des outils d’abattage soit suffisant (§ 3.2) ; ce travail d’étude du maillage logistique est à réaliser. L’abattage à la ferme avec un outil d’abattage mobile peut constituer une solution, sous réserve de maîtrise des risques sanitaires, de moyens ad hoc pour l’inspection sanitaire, de bonne gestion des coproduits, de surcoût économique acceptable (et bien réparti) et d’une évolution de la réglementation. Au niveau de la distribution des produits, les débouchés de vente (supermarchés, cantines, magasins de producteurs) doivent être accrus et associés à des outils logistiques et de régulation des flux pour travailler les équilibres offre/demande et matière.
Conclusion
De nombreux freins techniques, sociaux, humains, financiers et organisationnels expliquent que la production porcine en AB est aujourd’hui marginale. Si les déterminants techniques sont plutôt portés par les éleveurs, la majorité des autres leviers nécessiteraient, pour être activés, une articulation forte entre les différents maillons des systèmes agri-alimentaires afin de renforcer les interactions sociotechniques entre acteurs. Les freins et les leviers identifiés permettent de proposer des thèmes de recherche ou recherche-action prioritaires comme la construction d’outils et de références techniques, la meilleure articulation entre productions, filières et territoires, la promotion des débouchés et le partage de la valeur au sein des systèmes alimentaires, mais aussi la formation des acteurs actuels et futurs et la communication auprès du grand public sur les impacts positifs sur l’environnement et la rémunération plus juste de l’éleveur. Ces sujets sont à instruire dans le cadre de projets transdisciplinaires de recherche ou recherche-action avec les acteurs des filières. Ces projets devront en outre prendre en compte la diversité des trajectoires de développement possibles et souhaitables suivant le périmètre et le territoire considérés. Ces travaux représentent des défis pour nos recherches, qui doivent être relevés collectivement car en dépit des difficultés actuelles, l'élevage de porc sous CDC AB, en favorisant voire en structurant l’optimisation des processus et le bouclage des cycles aux différents niveaux d’organisation et leur articulation, pourrait être un moteur du développement de l’AB à la fois dans les productions végétales et animales.
Contribution des auteurs
La rédaction et la révision de l’article ont été coordonnées par Lucile Montagne. Thomas Puech et Amandine Durpoix ont réalisé les analyses statistiques. Justine Faure et Lucile Montagne ont animé le consortium ORIGAMI. Tous les auteurs ont participé à la rédaction d’une ou plusieurs parties et révisé l’ensemble du texte.
Remerciements
Ce projet a reçu le soutien financier d’INRAE dans le cadre du Métaprogramme METABIO. Les auteurs remercient l’ensemble des membres du consortium et les 21 acteurs enquêtés.
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Résumé
La production porcine française en AB est très diversifiée de par ses élevages, notamment en termes de taille avec de nombreux ateliers à faibles effectifs ; de par la commercialisation des produits, avec une filière longue bien implantée dans le grand ouest de la France, et des filières courtes plus territorialisées ; et de par la multiplicité de ses acteurs spécifiques à l’AB ou mixtes. Bien que le nombre de truies certifiées en AB ait doublé entre 2016 et 2021, il ne représente que 1,9 % du cheptel français. Face à ce constat, une étude a été réalisée par le consortium ORIGAMI (INRAE-Métabio) pour comprendre les freins et leviers au développement de cette production. Des entretiens de 21 porteurs de projets ont permis d’identifier 164 freins et 231 leviers. Des analyses en composantes multiples suivies d’une classification ont mis en évidence sept types de freins et six types de leviers en fonction de leur niveau d’organisation (de l’animal au territoire) et du maillon de la filière qu’ils concernent (de l’agrofourniture à la consommation). L’interprétation de ces typologies permet d’identifier des thèmes de recherche pour relever les principaux défis identifiés. Ces thèmes concernent l’acquisition de références techniques spécifiques pour l’AB, la meilleure articulation entre filières et territoires, la promotion des débouchés des produits, mais aussi la formation des acteurs actuels et futurs et la communication auprès du grand public. Ces sujets sont des pistes de réflexion pour la construction de projets transdisciplinaires de recherche ou recherche-action avec les acteurs des filières.
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