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One Health - One Welfare : deux concepts évolutifs mis en perspective

One Health et One Welfare, quels principes sous-tendent ces approches ? Comment sont-elles appliquées concrètement ? Une brève présentation des concepts suivie d’exemples liés aux ruminants révèle les ambitions communes, mais aussi les différences dans le développement de ces deux approches. En particulier, les échelles d’intérêt et d’action diffèrent. Les interactions entre santé et bien-être devraient mieux être prises en compte pour construire les futurs travaux1.

Introduction

Les maladies animales comme la grippe aviaire transmises par les oiseaux sauvages, les pandémies humaines comme la COVID pointant la consommation d’animaux sauvages, ou encore les bouleversements climatiques que nous subissons tous, questionnent la place de l’homme dans son rapport à la nature bien au-delà des cercles philosophiques, des sphères scientifiques ou des mouvements écologiques. Les constats scientifiques fondés sur l’interdépendance des écosystèmes sauvages et des activités humaines ont été relayés par des mouvements citoyens ou politiques qui se sont imposés dans les médias et dans les opinions publiques (Michalon, 2019). Sociologue, cet auteur montre comment un nouveau concept, encore flou, peu défini, comme le One Health, a transformé les réflexions politiques et les interactions entre organismes officiels comme l’Organisation mondiale de la Santé (santé humaine), la Food and Agricultural Organisation (développement des agriculteurs) et l’Organisation mondiale de la santé animale (ex Office international des Épizooties, santé animale). Il montre aussi d’un point de vue épistémique comment différentes disciplines scientifiques ont été fortement invitées à collaborer pour résoudre les questions posées. Ainsi la notion de One Health est apparue, démontrant que santé humaine, santé animale et santé des écosystèmes ne pouvaient se concevoir et se gérer indépendamment les unes des autres.

Notre rapport au vivant n’est pas questionné que par rapport à notre santé. L’activité agricole questionne aussi la représentation que nous avons des êtres qui nous entourent. La nature, perçue longtemps comme une ressource ou un danger dans nos sociétés occidentales, apparaît de plus en plus comme un acteur incontournable associé à la durabilité de nos activités, dans une compréhension agroécologique où toutes les composantes de l’écosystème agricole sont en interaction. Plus encore, derrière ce partenariat, notre représentation du vivant change, par exemple avec le statut d’être sensible reconnu aux animaux non seulement par la science mais récemment par le droit (ex. en France : Code civil, 2015, Dispositions générales, Articles L214-1 à L214-5) : « Tout animal étant un être sensible doit être placé par son propriétaire dans des conditions compatibles avec les impératifs biologiques de son espèce. » À la fois politique et scientifique, le courant à l’origine de cette évolution du droit est nommé « Animal welfare » ou « Bien-être animal » en français (Mormède et al., 2018). Portée essentiellement par une vision centrée sur l’animal en réaction à l’évolution de l’agriculture et à une vision anthropocentrique des rapports humains-animaux, la démarche Bien-être animal se voit complétée depuis quelques années par une perspective One Welfare intégrant notamment les conditions de vie/travail des personnes avec les animaux (« Bien-être humain ») en interaction avec leur environnement. Inspiré du One Health, le concept de One Welfare est né dans la même philosophie sociétale et interdisciplinaire. Il comporte le même flou dans sa définition, et les mêmes ambitions, nécessitant de le rendre concret et applicable (Delanoue et al., 2022).

Les deux démarches One Health et One Welfare aujourd’hui coexistent, souvent de façon séparée, alors que les concepts de Santé et Bien-être sont imbriqués (encadré 1). Le présent article a pour premier objectif d’expliciter et d’illustrer ces deux démarches et leur évolution dans un contexte européen de souveraineté alimentaire, de maîtrise des maladies animales d’importance zoonotique et économique et de demande sociétale sur le bien-être animal. Le deuxième objectif est de mettre les démarches One Health et One Welfare en perspective pour mieux envisager leur mise en pratique et possible utilisation commune.

Encadré 1. Santé et bien-être ? deux concepts imbriqués.

Les deux concepts, santé et bien-être, s’avèrent extrêmement proches, voire souvent confondus. Pour l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), depuis 1946, la santé est un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité. De cette définition, santé et bien-être semblent totalement synonymes. Pour l’Organisation mondiale de la santé animale (OMSA) et sans la définir, la santé est une composante clé du bien-être animal. Dans son code sanitaire pour les animaux terrestres (OMSA, 2024), le bien-être animal est défini comme l’état physique et mental d’un animal en relation avec les conditions dans lesquelles il vit et meurt. Cette définition s’inspire de la conception de l’adaptation de Broom (1986) : le bien-être d’un individu est l’état dans lequel il se trouve en fonction des tentatives pour faire face à son environnement. Il comprend les sentiments, la santé et d’autres mécanismes d’adaptation (Tarazona et al., 2020). Elle s’applique clairement aux humains et à tout autre animal vivant. Dans une vision écologique, elle prône l’idée que tous les êtres vivants, y compris les êtres humains, ont des bases biologiques communes fondées sur l’adaptation à leur environnement et sur leurs interactions : « une seule biologie » à considérer au-delà du One Health ou du One Welfare.

1. One Health : un concept mouvant multifacette

1.1. Explication du concept

Bien que le concept One Health soit présent depuis le milieu des années 1980, il a pris une importance significative dans les domaines de la recherche et de la politique ces dernières années, en particulier face aux problématiques liées aux changements globaux. En conséquence, le concept One Health est maintenant fréquemment utilisé pour étiqueter diverses initiatives politiques et scientifiques (Giraudoux et al., 2022).

Le concept One Health reconnaît l’interdépendance de la santé humaine, animale et environnementale et préconise une approche collaborative et interdisciplinaire pour relever les défis de santé actuels. À l’origine ancré dans le domaine de la santé publique, le concept s’est d’abord principalement concentré sur les maladies infectieuses émergentes et réémergentes d’intérêt pour l’homme, telles que les zoonoses. Les zoonoses sont des maladies ou infections qui se transmettent naturellement des animaux vertébrés à l’homme et vice versa, et on considère que plus de 60 % des 1 500 agents pathogènes pour l’homme identifiés à l’heure actuelle peuvent être transmis des animaux à l’homme (Taylor et al., 2001). Leur maîtrise repose sur des mesures d’alerte et de détection précoce (e.g. surveillance ciblée ou surveillance syndromique, détection d’agents pathogènes), de prévention (e.g. biosécurité, vaccination préventive), ou d’interventions en cas de foyer de maladie (e.g. isolement, restriction des mouvements, abattage), appliquées à l’animal domestique en contact de l’homme (Meurens et al., 2021). À côté des maladies infectieuses, l’appréciation et la maîtrise des risques sanitaires liés à l’exposition aux dangers chimiques ont également montré que la prise en compte des interactions entre santé humaine, environnement et sécurité de la chaîne alimentaire était incontournable. Les approches One Health et EcoHealth considèrent souvent l’environnement comme la principale cause et source d’infection ou de pollution chimique. Ainsi, pour élaborer des politiques préventives efficaces, il est crucial de prendre en compte et d’intégrer les facteurs environnementaux impliqués dans la dégradation de la santé de l’homme et de l’animal (Morand et al., 2020).

Un développement notable prolongeant plus largement cette perspective est la récente création du programme conjoint One Health (FAO, UNEP, WHO & WOAH, 2022) dans le Programme des Nations Unies pour l’environnement. Elle vise à équilibrer la perspective anthropocentrique des approches One Health actuelles en intégrant de façon concrète les composantes environnementales et de biodiversité. Ce changement de perspective souligne le rôle essentiel des écosystèmes notamment dans la prévention de la transmission des agents pathogènes infectieux (Vora et al., 2024).

À ce stade, il convient de distinguer le concept One Health du concept One Medicine, que certains souhaiteraient voir inclus sous l’étiquette médiatique « One Health ». Les approches One Medicine mobilisent les modèles animaux expérimentaux pour produire des avancées cliniques pertinentes pour la santé humaine. Les résultats de ces recherches translationnelles peuvent parfois aider ou informer de façon connexe la santé animale, mais cette approche ignore les interactions complexes entre les dimensions médicale, vétérinaire et écologique.

1.2. Ses principaux piliers

Cinq piliers peuvent aider à illustrer les contours des concepts développés dans l’approche One Health, ainsi que leurs limites et leurs forces.

Le premier pilier se concentre sur la connaissance des maladies infectieuses à potentiel zoonotique et des risques sanitaires dus aux expositions aux polluants chimiques. Son objectif est de comprendre les interactions complexes à enjeux de santé qui surviennent à l’interface entre les humains, les animaux et l’environnement et de concevoir des moyens pour maîtriser les risques associés. Les avancées scientifiques ont jusqu’à maintenant été obtenues en situations de crise sanitaire et porté surtout sur quelques champs disciplinaires tels que la caractérisation des agents infectieux, la physiopathologie des maladies zoonotiques infectieuses, le développement de vaccins, la détection des polluants, les conditions d’exposition aux polluants et leurs conséquences métaboliques, ainsi que sur la surveillance des dangers. Bien que cette approche ait permis des avancées importantes dans les domaines vétérinaire, médical et environnemental, ainsi que dans la recherche translationnelle, elle ne suffit pas à intégrer l’ensemble des dimensions interconnectées pour anticiper et maîtriser les dangers et risques émergents. Cette limitation a été largement reconnue, et des efforts sont déployés pour développer une approche scientifique plus holistique qui puisse avoir un impact réel sur les politiques et les actions publiques.

Le deuxième pilier est axé sur la menace mondiale croissante de la résistance aux antimicrobiens (RAM) et la nécessité d’une action coordonnée pour y faire face. L’importance de ce pilier réside dans sa capacité à traiter la complexité existante entre les déterminants de la RAM, notamment la surutilisation et le mauvais usage des antimicrobiens dans la santé humaine et animale, l’agriculture et la diffusion des résistances via l’environnement. Cependant, une limitation est le besoin d’une meilleure surveillance, de partage de données et de coordination entre les différents secteurs et pays.

Un troisième pilier est dédié au climat et à l’environnement, reconnaissant l’impact du changement climatique et de la perte de biodiversité sur l’émergence et la propagation des maladies infectieuses et autres dangers. L’augmentation de la variabilité météorologique, mise en évidence par les fluctuations de température, d’humidité et de précipitations, peut augmenter le risque de dissémination d’agents pathogènes en modifiant la répartition et la densité des espèces, entraînant de nouvelles interactions entre les espèces et augmentant le risque potentiel d’émergence zoonotique (Baker et al., 2022). Par conséquent, ce pilier a le potentiel de contribuer au développement de stratégies efficaces pour s’adapter et/ou atténuer l’impact du changement climatique et de la perte de biodiversité sur la santé mondiale. Cependant, la principale limitation de ce pilier est la nécessité de plus de recherches pour comprendre pleinement les interactions complexes entre le changement climatique, la perte de biodiversité et l’émergence de risques éventuels.

Le quatrième pilier met en évidence l’importance de garantir une alimentation saine et nutritive pour les humains, ainsi que la nécessité de systèmes alimentaires durables respectueux de la santé, du bien-être animal et de l’environnement. L’importance de ce pilier réside dans son potentiel pour accroître la sécurité alimentaire, réduire les maladies d’origine alimentaire, ainsi que le gaspillage alimentaire, et promouvoir des pratiques agricoles durables qui protègent les ressources naturelles et la biodiversité. Cependant, concilier les compromis entre les impacts économiques et sociaux des changements dans les systèmes alimentaires et leurs avantages potentiels pour la santé globale reste un défi majeur. Les approches One Health peuvent aider à surmonter ce défi en favorisant la collaboration et la coordination entre les différents acteurs du système alimentaire, des producteurs aux consommateurs en passant par les transformateurs et les distributeurs.

Enfin, le pilier socio-économique s’intéresse aux déterminants sociaux, économiques et culturels de la santé, et cherche à renforcer la mise en œuvre des approches One Health grâce à la formation, à l’accompagnement des professionnels de santé et à la coordination des systèmes institutionnels concernés. Ce pilier a le potentiel de réduire les inégalités en matière de santé, de promouvoir la justice sociale et l’inclusion (groupes minoritaires, populations autochtones), et de renforcer les systèmes de santé. Cependant, des limites ont été soulevées concernant le manque de direction et de coordination stratégiques aux niveaux national et international, y compris les problèmes liés à la représentation réelle de toutes les parties prenantes, l’ambiguïté des institutions chargées du suivi et de l’évaluation des politiques et des actions mises en œuvre, et la possibilité de duplication des tâches entre ces institutions.

En résumé, chacun des piliers du concept One Health peut jouer un rôle crucial dans la promotion de la santé globale, du bien-être animal et humain, mais ils font également face à des défis et des limitations significatifs.

Dans les deux parties suivantes, nous avons choisi d’illustrer le concept One Health par des exemples issus du premier pilier : celui des interactions en jeu lors de crises sanitaires d’origine infectieuse ou chimique impliquant des ruminants. Le point commun entre ces deux exemples est qu’un contexte de risque localisé sur un territoire peut avoir des conséquences importantes pour la santé humaine, qu’il s’agisse de professionnels de l’élevage ou de la population générale. Compte tenu des interdépendances entre l’homme, l’animal et l’environnement, leur maîtrise est complexe et repose sur la surveillance sanitaire, la prévention des expositions, voire la vaccination quand c’est possible.

1.3. Un risque bien présent dans les élevages de ruminants : l’infection par Coxiella burnetii, agent de la fièvre Q

La fièvre Q ou Query Fever est une maladie bactérienne zoonotique due à Coxiella burnetii. En France, les ruminants domestiques constituent le réservoir principal pour l’infection humaine. Cette infection, qu’elle soit humaine ou animale, est le plus souvent asymptomatique. Quand elle s’exprime par des signes cliniques, elle débute par une phase aiguë qui, chez l’homme, prend la forme d’une « grippe » sans gravité, même si des troubles respiratoires peuvent survenir (aussi décrits chez les génisses laitières infectées). L’infection peut dans de rares cas, évoluer vers la chronicité. Coxiella burnetii a un tropisme utérin, et les principaux signes cliniques de la fièvre Q chronique sont alors des troubles de la reproduction : fausses couches à répétition chez la femme, mortalité embryonnaire associée à de l’infertilité et avortements chez la vache, la brebis, et la chèvre ; naissances prématurées chez la femme, naissance d’animaux chétifs.

Décrite pour la première fois en 1937, l’infection n’a retenu que très peu l’attention des scientifiques dans un premier temps (10 publications/an en moyenne de 1943 à 2005 se rapportant à « Q fever » ou à « Coxiella burnetii », source : Pubmed). L’intérêt pour la fièvre Q a crû très rapidement avec l’épizootie associée à une épidémie de 2007 à 2010 aux Pays-Bas. Cet épisode a mobilisé de très nombreux professionnels concernés (médecins praticiens, vétérinaires praticiens, chercheurs en santé animale et humaine), organisations d’éleveurs (GD) (publication de 138 articles/an en moyenne de 2006 à 2023, source : Pubmed, tous pays et toutes espèces confondus). Les raisons de l’émergence de cette épidémie ne sont pas claires. Les principales hypothèses explorées (Roest et al., 2011) ont été les suivantes : premièrement, une augmentation importante de la taille des troupeaux de petits ruminants et en parallèle de la densité animale, dans des zones géographiques fortement anthropisées et habitées par des personnes immunologiquement naïves, aurait modifié la dynamique d’infection et la structure de contact animal-homme en faveur d’un risque accru de transmission. Cependant, il existe des systèmes de production en Europe proches du système néerlandais, pour lesquels l’infection par C. burnetii est endémique depuis des décennies, sans épisode épidémique. De façon surprenante, l’infection ne s’est jamais étendue vers l’Allemagne et la Belgique, qui sont pourtant des pays contigus aux zones infectées aux Pays-Bas. L’hypothèse de l’émergence d’une souche particulièrement virulente à l’égard des petits ruminants (voire des humains) a également été avancée, mais une telle souche n’a jamais été identifiée. Pourtant des différences de virulence existent pour une espèce donnée, les souches bovines néerlandaises n’ayant jamais été détectées lors d’avortements aux Pays-Bas, alors que la fièvre Q bovine est une maladie abortive en France. L’impact en santé publique de cette épidémie a été très élevé : plus de 3 500 cas humains recensés et 24 personnes décédées de 2007 à 2010 (van der Hoek et al., 2010). Les ruminants ont eux aussi payé un lourd tribut lors de cette épizootie : la cohorte constituée de toutes les femelles brebis et chèvres issues de troupeaux déclarés infectés, a été euthanasiée sans tenir compte du statut individuel vis-à-vis de l’infection de chaque animal, et la mise à la reproduction des agnelles et chevrettes sur cette même période a été interdite, l’objectif étant de diminuer la charge bactérienne dans l’environnement alimentée par l’excrétion massive des femelles infectées au moment de leur mise bas (Roest et al., 2011).

Coxiella burnetii se transmet à l’homme le plus souvent par voie aérienne (Tissot-Dupont et al., 1999), les personnes exposées inhalant des aérosols contaminés à partir de fluides et de tissus infectés (Guatteo et al., 2007). Des transmissions directes par contact avec un animal infecté ou du matériel contaminé ont également été décrites. La contamination concerne avant tout les populations fortement exposées du fait de leurs activités professionnelles au contact des animaux. Ainsi l’éleveur d’un troupeau lui-même infecté par Coxiella burnetii a plus de risque de s’infecter (OR = 3,4) que l’éleveur d’un troupeau indemne (Beaudeau et al., 2021). Que ce soit dans un contexte épidémique (2007-2010 aux Pays-Bas) ou en contexte endémique (Grand Ouest de la France en 2018), plus de 65 % des vétérinaires ruraux et plus de 70 % des éleveurs de ruminants étaient porteurs d’anticorps anti-Coxiella burnetii, révélant une infection antérieure (Van den Brom et al., 2013 ; Schimmer et al., 2014 ; Pouquet et al., 2020). La très forte résistance de Coxiella burnetii dans l’environnement lui confère aussi un potentiel de contamination élargi à la population générale. Ainsi, l’hypothèse de contamination à distance par voie aérienne (Tissot-Dupont et al., 1999) a été confirmée dans le cas de la fièvre Q (Schimmer et al., 2010), constatant de nombreux cas humains à plus ou moins grande distance des troupeaux de chèvres infectés. Une récente enquête dans le Grand Ouest de la France rapporte une séroprévalence non négligeable (estimée de 13 %) dans la population générale (Pouquet et al., 2020).

Conformément aux hypothèses, la topographie locale, le couvert végétal, les conditions météorologiques, mais aussi certaines pratiques d’achat des élevages, jouent un rôle important de modulation du risque de transmission de Coxiella burnetii entre les troupeaux, et par extrapolation du risque zoonotique (Nusinovici et al., 2015a). Ainsi, le risque est augmenté dans des zones à faible niveau de précipitation, le temps sec favorisant l’aérosolisation des poussières potentiellement contaminées. De plus, les troupeaux dans les zones venteuses avec un couvert végétal bas et une forte densité de ruminants dans le voisinage présentent logiquement plus de risque d’être infectés que ceux dans des zones avec un couvert végétal faisant office de barrières naturelles (forêts…) ou peu ventées. Ce risque est de plus environ dix fois plus élevé que celui associé au risque de contamination par les achats d’animaux infectés (OR = 40,4 vs 4,1). Enfin, les troupeaux situés sous le vent d’une charge environnementale a priori importante sont plus à risque de contamination (Nusinovici et al., 2015b). Tous ces facteurs pourraient expliquer les fortes variations constatées entre territoires de la séroprévalence chez les ruminants (Gache et al., 2017). Les conditions météorologiques n’étant pas maîtrisables, contrairement aux pratiques d’achat que l’éleveur peut modifier en fonction du contexte épidémiologique, la vaccination des femelles apparaît indispensable dans les territoires venteux et à forte densité de ruminants.

1.4. L’exposome chimique aux polluants organiques persistants et son impact sur l’interface environnement – bovin – homme

La notion d’exposome chimique a été définie comme l’ensemble des substances chimiques auxquelles l’homme est exposé tout au long de sa vie, lesquelles peuvent interagir avec sa santé. Une liste croissante de produits chimiques synthétiques a été identifiée comme particulièrement préoccupante en raison de leur présence généralisée dans l’environnement et de leurs effets toxiques sur la santé animale et humaine.

C’est le cas des polluants organiques persistants (POP), un ensemble de molécules diverses chimiquement, en termes d’origine et d’usage. Ils se définissent par quatre caractéristiques communes avec toutefois une variabilité de degrés de sévérité. Ils présentent tout d’abord une toxicité élevée avec des impacts cancérigènes, de perturbation endocrinienne et neurotoxiques prouvés sur la santé humaine. Ils sont persistants dans l’environnement et résistent aux mécanismes de dégradation physiques, chimiques et biologiques naturels. Ils sont bioaccumulables, s’accumulant dans les tissus vivants avec une concentration croissante dans la chaîne alimentaire. Enfin, lié aux deux caractéristiques précédentes, les POP se transportent sur de longues distances et peuvent se déposer et devenir problématiques loin de leur lieu d’émission. Bien que pour la plupart interdits dans la majeure partie du monde, leur persistance les rend toujours problématiques à l’heure actuelle. Les dioxines, les polychlorobiphényls (PCB), certains pesticides organochlorés tels le DDT ou la chlordécone, mais également certains composés fluorés (PFAS) sont des POP. Actuellement, l'alimentation est la principale voie d'exposition aux PCB et aux dioxines dans les populations générales non professionnelles (EFSA, 2005).

La deuxième étude française sur l’alimentation totale (EAT2) menée par l’Anses a montré qu’en 2010 les produits de la mer et tous les produits laitiers combinés étaient les principaux contributeurs à l’exposition alimentaire totale aux dioxines (65 %) et aux PCB-dl (de type dioxine) (81 %) (Sirot et al., 2012). La forte contribution des produits laitiers (35 à 42 %) était principalement due aux aliments riches en matières grasses comme le beurre (12,5 à 18,7 %) et le fromage (11,4 à 12,2 %), avec une contribution mineure d’autres produits tels que les yaourts (5,5 à 7,7 %) ou du lait (2,5 à 3,4 %). Les effets des PCB et des dioxines sur la santé des animaux et des humains sont divers et incluent des troubles du développement, de la reproduction, des effets cancérogènes et des troubles neurologiques. En fait, sur la base des effets sur la santé des animaux de laboratoire, l’OMS et le Programme international sur la sécurité chimique (IPCS) ont établi une valeur seuil maximale d’exposition humaine dans la plage de 1 à 4 pg d’équivalents toxiques (TEQ) par kg de poids corporel et par jour (van Leeuwen et al., 2000), valeur dépassée en 2010 par 4 % de la population française selon l’EAT2 (Sirot et al., 2012). Les effets des dioxines et des PCB sur la santé ont également été signalés dans la faune sauvage, y compris chez les animaux de régions éloignées comme l’ours polaire, le renard arctique et le goéland bourgmestre (Brunström & Halldin, 2000). Chez les animaux d’élevage, des effets sur le métabolisme ont été mis en évidence (Hernández-Mesa et al., 2022).

Bien que le concept One Health ait été principalement appliqué aux épidémies de maladies infectieuses, certaines études de cas ont souligné la pertinence d’approches interdisciplinaires et intersectorielles pour maîtriser la santé environnementale globale liée aux produits chimiques. Par exemple, l’alerte sur le cas le plus important d’exposition à la dioxine parmi les citoyens américains a été déclenchée par une épidémie de morts subites d’équidés dans le Missouri en 1971 (Buttke, 2011). De même, au Michigan, un cas dévastateur sur des bovins nourris avec des céréales et des concentrés protéiques fortement contaminés par des polybromobiphényls (PBB) a précédé les effets étendus aux humains des années plus tard (Jackson & Halbert, 1974).

Au-delà de ces cas notoires liés aux accidents chimiques, le concept One Health est aujourd’hui illustré par la surveillance des animaux en tant que sentinelles des risques pour la santé humaine (Fox, 2001). Une grande variété d’espèces animales a été utilisée comme sentinelles des polluants chimiques, dont les bovins (National Research Council, 1991). La présence de dioxines et de dl-PCB dans le lait de vache reflète l’intérêt de l’interface environnement – bovin – humain en tant que système approprié pour des évaluations sanitaires plus interconnectées (Domingo, 2023). Plusieurs perspectives se font jour. Premièrement, une évaluation intégrée et précise du système de production de lait de vache pourrait aider à mieux identifier les points critiques et la dynamique de ces produits chimiques tout au long de la chaîne alimentaire laitière et à développer des stratégies préventives au niveau de la production (Stevens & Gerbec, 1988 ; Rychen et al., 2014). Deuxièmement, une meilleure connaissance de l’exposome chimique des vaches pourrait aider à développer des modélisations plus précises et plus intégrées dans la recherche épidémiologique animale, notamment sur les troubles de la reproduction ou certains troubles métaboliques. Troisièmement, l’intégration des données chimiques environnementales avec les connaissances approfondies et précises générées par des études épidémiologiques animales à grande échelle pourrait également aider à surveiller les populations et à informer des effets précoces sur la santé humaine.

2. One Welfare : un concept récent

Le concept de One Health a fortement inspiré le concept de One Welfare (Delanoue et al., 2022). Le bien-être humain, le bien-être animal et leur environnement sont interconnectés, voire interdépendants (García Pinillos et al., 2016). Au-delà d’aborder conceptuellement cette question d’un point de vue holistique, ces auteurs prônent l’intégration de ce concept dans les projets existants comme une « plateforme peu coûteuse pour favoriser la collaboration interdisciplinaire afin d’améliorer le bien-être humain et animal à l’échelle internationale ». En effet, les questions du bien-être animal, comme celles de la préservation de l’environnement et de la biodiversité, questionnent la durabilité des élevages mais font controverse dans nos sociétés (Delanoue & Roguet, 2015). Pour ces auteurs, elles ne traduisent pas des phénomènes de mode et elles contribuent à une perte de confiance entre parties prenantes au sein de la société. Ainsi, plus qu’une posture scientifique, l’approche One Welfare est vue par García Pinillos et al. (2016) comme un mouvement permettant de contribuer à promouvoir des objectifs mondiaux clés en termes de durabilité, de bien-être animal et humain. Cela concerne toutes les activités humaines connectées aux animaux, qu’ils soient de compagnie ou d’élevage (sécurité de la chaîne de production, relation entre maltraitance animale et situation de vulnérabilité des personnes, productivité dans le secteur agricole). Ces auteurs donnent comme exemple que « ceux qui maltraitent les animaux sont plus susceptibles de maltraiter les enfants ou les personnes âgées voire de devenir meurtriers ». Ils citent aussi des études montrant que les variations de biodiversité pour des populations d’oiseaux visibles sont reliées à des variations de perception du bien-être des humains qui les constatent.

Avant d’illustrer cette démarche par quelques exemples en élevage, nous discuterons brièvement des concepts clés de bien-être de l’animal et de l’humain au travail. Puis nous aborderons par une vision ergonomique/éthologique la question de la santé/bien-être au travail en élevage. Nous terminerons par quelques perspectives de travail, notamment via l’existence d’un Réseau mixte technologique One Welfare.

2.1. Du bien-être animal au bien-être humain dans une perspective One Welfare

Opérationnellement, le code de l’OMSA décline le bien-être animal en s’inspirant des cinq libertés du Farm Animal Welfare Council (1979) : « Le bien-être d'un animal est considéré comme satisfaisant si les critères suivants sont réunis : bon état de santé, confort suffisant, bon état nutritionnel et sécurité. L’animal ne doit pas se trouver dans un état générateur de douleur, de peur ou de détresse, et doit pouvoir exprimer les comportements naturels essentiels pour son état physique et mental ». Si ces définitions de l’OMS ou l’OMSA mentionnent l’état mental de l’animal, elles ne le définissent pas. De même que le législateur français considère l’animal comme un être sensible dans le Code civil depuis 2015 mais sans définir la sensibilité de l’animal. Ces principes trouvent leur application en élevage notamment dans la démarche Welfare Quality qui fait référence (https://chaire-bea.vetagro-sup.fr) et l’utilisation d’indicateurs de mesure du bien-être centrés sur l’animal.

L’Anses a récemment proposé une définition du bien-être animal très axée sur les états mentaux : le bien-être des animaux est défini comme « l’état mental et physique positif lié à la satisfaction de ses besoins physiologiques et comportementaux, ainsi que ses attentes. Cet état varie en fonction de la perception de la situation par l’animal » (Anses, 2018). Une attente est « un processus mental généré par l’anticipation d’un événement, auquel l’animal va se référer pour évaluer la valence de cet évènement, d’agréable à désagréable » (Mormède et al., 2018). Ces attentes peuvent se traduire par des émotions et des variations comportementales et physiologiques associées. Cette dimension mentale se retrouve également dans une approche récente, dite des cinq domaines, dans laquelle, l’alimentation, la santé, l’environnement et les expressions comportementales sont tous en lien avec un cinquième domaine qui est cette dimension mentale (figure 1).

Figure 1. Les cinq domaines du bien-être animal (adapté de Mellor et al., 2020).

La faim, l’attente ou la frustration d’un aliment, d’un contact social, la capacité à être acteur pour réaliser un objectif (agentivité), la perception ou l’anticipation de la douleur (réelle ou supposée), la peur ou l’anxiété associée à la présence d’un prédateur, sont autant d’exemples qui montrent que chacun des quatre domaines physiques ou fonctionnels sont eux-mêmes associés au domaine mental.

Si les définitions du bien-être animal ont évolué, prenant en compte la perception de la situation par l’animal, il en est de même pour la santé et le bien-être de l’éleveur au travers de sa perception de la situation de travail avec ses animaux (Beaujouan et al., 2021).

2.2. Santé et bien-être de l’éleveur au travail avec ses animaux

En ergonomie de l’activité, la santé est quelque chose qui se construit plutôt qu’une chose qui se dégrade (Canguilhem, 2012). La santé renvoie à la capacité des travailleurs à répondre à des situations difficiles, à leur capacité à créer et à être auteur de leur travail. Clot (2015) considère qu’il ne peut pas y avoir de bien-être au travail sans sentiment de bien faire son travail. Il existe ainsi différentes dimensions dans la construction de ce bien-être, dont des dimensions hédonique (c.-à-d. plaisir, éviter la souffrance) et eudémonique (c.-à-d. développement personnel). Il faut aborder les relations humains-animaux dans le travail d’élevage par les relations entre travail « prescrit » et travail « réel », équilibre entre situations professionnelle et privée, et entre tâches professionnelles et activité humaine (Beaujouan et al., 2021). La tâche prescrite est l’objectif à atteindre par les travailleurs dans des conditions déterminées (moyens humains, temporels, organisationnels, techniques…).

La société impose aux éleveurs de nombreuses prescriptions au cœur du débat sur la légitimité de l’élevage, incluant la mission de production et d’autosuffisance alimentaire de la France, la nécessité d’offrir des produits de qualité sanitaire, gustative et nutritionnelle, tout en garantissant le respect du bien-être animal et de l’environnement. Il leur faut aussi assurer des services d’entretien du paysage, de maintien de la biodiversité. Mais cela est souvent fait sans considération de la part des citoyens pour les conditions de travail, la valeur rémunératrice du travail ou encore la frontière entre vie professionnelle et vie privée de l’éleveur, chef d’entreprise sur sa ferme. L’entourage également est source de prescriptions pour celui qui travaille, que ce soient ses collègues, ses salariés, sa famille, ses voisins, ou encore les nombreux intervenants sur et en dehors de la ferme. Il peut donc y avoir de forts décalages entre les objectifs de travail (travail prescrit) et le travail réalisé (travail réel). Comme pour les attentes chez l’animal, le bien-être au travail dépend entre autres de la perception de l’écart entre les deux, particulièrement dans sa conception de sa relation avec les animaux.

2.3. La relation humain-animal au cœur de la construction du concept du One Welfare

Tous les éleveurs ne sont pas identiques et n’ont pas les mêmes contraintes, ni le même rapport à l’animal, ni les mêmes attentes dans leur travail. Pour l’éleveur, l’animal peut être objet de travail au sens où c’est sur lui que l’homme exerce sa tâche ou sujet avec qui il travaille, avec là aussi des déterminants forts sur le travail prescrit ou réalisé. Dockes et Kling-Eveillard (2007) nous apprennent que la relation éleveur-animal est une relation professionnelle et qu’il existe des éleveurs « pour l’animal, avec l’animal, sans l’animal ou malgré l’animal », s’interrogeant sur leurs différents comportements envers les animaux. Cet animal peut être pour eux affectif, simplement communiquant ou instrumentalisé dans sa fonction de production. Cette diversité de représentations s'inclut, pour l’éleveur, dans une situation subjective prenant en compte le lieu, le temps, les différents déterminants des tâches à réaliser, réalisables ou impossibles à réaliser (Beaujouan et al., 2021). Les soins que l’éleveur apporte à l’animal peuvent alors être très différents.

Les études, nombreuses aujourd’hui, montrent que bien-être animal et bien-être humain sont totalement interdépendants, non seulement en termes de diminution du mal-être mais aussi d’augmentation du bien-être animal (Rault et al., 2020). Des enquêtes en élevage observant humains et animaux montrent que la pénibilité, le temps et la sécurité au travail sont très dépendants de la qualité des interactions mutuelles humain-animaux (Ceballos et al., 2018 ; Destrez et al., 2018). La qualité de la relation humain-animal impacte très clairement le bien-être de l’humain et de l’animal (Mellor et al., 2020). Il faut retenir que la relation humain-animal se construit pendant l’histoire entière de l’animal, en fonction de ses prédispositions génétiques, de son environnement social, notamment de la réaction de sa mère, des interactions humain-animal, particulièrement lors de périodes sensibles (Boivin et al., 2012). L’animal comme l’humain sont des acteurs, partenaires de la relation qu’ils construisent. Leurs interactions passées, existantes ou non, positives, neutres ou négatives, déterminent la perception du partenaire humain ou animal et l’issue des interactions et du travail au moment présent, ces dernières conditionnant l’issue des interactions futures. Les animaux peuvent développer des émotions négatives, de l’anxiété, un stress chronique acquis notamment en présence de l’homme (Hemsworth & Coleman, 2010). L’animal apeuré voit sa vigilance augmentée, ses comportements de fuite ou de défense exacerbés, notamment en présence de certains humains, voire de tous. Toutes les fonctions biologiques en sont affectées car les réponses de stress sont généralisées à tout l’organisme. Quels que soient l’espèce et le type de production, la croissance, la reproduction, les productions de lait ou de viande, la santé en sont affectées (Napolitano et al., 2019 ; Mota-Rojas et al., 2020). Les vaches, les bufflonnes et les chèvres peuvent retenir leur lait, diminuant ainsi leur production. Les truies font naître moins de porcelets si les éleveurs manquent de patience, ne croient pas à l’effet des interactions positives avec leurs animaux ou, à l’inverse, ont l’impression de devoir faire plus d’effort pour manipuler les animaux difficiles. Ces phénomènes sont également liés à des facteurs indirects comme la qualité des soins. Suivant l’attitude envers les animaux, la perception par l’éleveur de leur sensibilité, de leurs qualités, les soins ne sont pas les mêmes, par exemple l’importance accordée au nettoyage des installations, à la propreté des animaux (Boivin et al., 2003).

Le temps en élevage est une ressource importante. Fiorelli et al. (2012) évoquent les arbitrages et priorisations qu’un éleveur doit faire entre toutes les tâches prescrites, qu’elle appelle rationalités. Elle évoque notamment la rationalité relationnelle avec les collègues ou avec les animaux, qui passe par la construction de relations avec les autres. Avec une perception d’un manque de temps, cette rationalité relationnelle est-elle un levier dont on peut se passer permettant de moduler la pression des tâches ou au contraire une activité incontournable en élevage ? Derrière cette interrogation se cachent les pratiques tournées vers le bien-être animal, les pratiques relationnelles, véritables stratégies de l’éleveur pour construire et gérer sa relation avec les animaux (Boivin et al., 2012 ; Beaujouan et al., 2021). Elles incluent le choix et la préparation des animaux, le choix de leur environnement d’élevage, le choix des outils de contention et de circulation des humains et des animaux, la répartition des tâches, etc. La question qui se pose alors est : comment passer d’une prescription théoriquement imposée ou souhaitée à une activité réelle de travail, autant pour le bien-être de l’éleveur que pour celui de ses animaux ? Les études montrent que la formation rend les manipulateurs plus attentifs à la sensibilité animale, aux conséquences de leur comportement sur l’animal (Hemsworth & Coleman, 2010). La formation les rend aussi plus résistants aux facteurs tels que la durée et la pénibilité d’un chantier, qui peuvent entraîner plus d’interactions négatives avec l’animal chez ceux qui n’ont pas été formés (Ceballos et al., 2018). Les initiatives pour développer la formation au concept One Welfare sont un des axes de travail du réseau mixte technologique One Welfare (encadré 2).

Encadré 2. RMT One Welfare : interdisciplinarité et opérationnalité.

Soutenus par le ministère chargé de l’agriculture, les réseaux mixtes technologiques (RMT) sont des outils de partenariat scientifique et technique. À ce titre, le RMT One Welfare, mis en place en 2021, vise à accompagner les réflexions sur ce concept à une échelle nationale et multispécifique (axe 1), et à le doter d’outils ou d’expériences pratiques en élevage (axe 2). Un axe de travail spécifique à la formation (axe 3) vise à utiliser le concept pour développer les recherches en didactique et aborder la pédagogie du bien-être animal en tant que question socialement vive (Briand et al., 2022). Fort de dix ans d’expérience collaborative construite dans le précédent RMT Bien-être animal (2009-2020), il s’appuie sur plusieurs équipes de recherches expérimentale et appliquée, et des structures de développement ou de formation agricole, qui ont toutes pris la mesure des opportunités offertes par le concept du One Welfare : enrichir la question du bien-être animal de ses dimensions humaines et environnementales, et lui offrir ainsi un meilleur fondement sociétal. (https://idele.fr/rmt-one-welfare/).

2.4. Perspectives : opérationnaliser le concept

Le RMT One Welfare vise à créer un pont entre disciplines biologiques et sciences humaines et sociales dans une perspective de travail réel pour les éleveurs. Il a pour premier objectif de discuter le concept de One Welfare et réfléchir à une démarche d’accompagnement des éleveurs. Pour cela, plusieurs séminaires et colloques interdisciplinaires ont été organisés, réunissant éthologie, ergonomie, psychologie, zootechnie et science de l’éducation. L’enjeu était de rendre concrète la réflexion conceptuelle sur le One Welfare pour en faire un outil d’amélioration des systèmes d’élevage comme le proposaient García Pinillos et al. (2016). Un projet en cours sur les élevages de bovins, intitulé MICOW, cherche à faire monter en compétences ses différents partenaires sur les concepts, démarches et outils nécessaires à l’approche One Welfare. L’objectif à terme est le conseil aux éleveurs engagés dans des projets de changement de pratiques ou d’installation. Il s’agira de trouver les indicateurs en élevage de ce qui semble possible, difficile ou impossible à gérer du point de vue de l’animal ou de l’homme pour l’amélioration d’un bien-être mutuel. Cela conduira ensuite à valoriser et construire les pratiques d’élevage du One Welfare (un animal productif, autonome, connecté pour le bien de tous, et sociable pour travailler facilement avec). Les structures en reprise ou en création seront particulièrement ciblées car il s’agit de périodes propices à l’engagement d’une réflexion de transformation des pratiques de travail. Il s’agit aussi dans le cadre du RMT de réfléchir à la formation des futures générations d’éleveurs au One Welfare avec un enjeu clair d’attraction pour le métier, et de renouvellement des exploitants ayant développé une capacité de réflexion sur cette question. Ce projet, fondateur pour les travaux du RMT, est accompagné de plusieurs projets en cours, soutenus par le RMT et qui documenteront le concept dans d’autres filières, pour ouvrir demain de nouvelles questions de recherche appliquée autour du One Welfare.

3. Perspectives de convergence entre les deux approches

Les approches One Health et One Welfare ont en commun des ambitions partagées de prendre en compte les interactions complexes pour améliorer à la fois la condition de l’animal et celle de l’homme, situés dans un environnement avec lequel ils interagissent. Dans les deux cas, des concepts généraux sont proposés et déclinés avec un degré d’opérationnalité plus ou moins avancé. Jusqu’à présent, à la fois les concepts, les travaux scientifiques et les développements opérationnels n’établissent pas (ou très peu) de liens entre les deux approches. La mise en perspective des problèmes posés et des approches pourra sans doute permettre d’identifier des synergies à développer.

3.1 Typologie des questions et enjeux

Nous proposons ici d’identifier des questions posées qui concernent soit l’approche One Health, soit l’approche One Welfare, ou pour lesquelles les deux approches sont questionnées car des interactions entre santé et bien-être impliquent à la fois des enjeux pour les animaux et pour l’homme. Ces questions sont classées par échelle, en distinguant 1) le niveau de l’exploitation agricole où interagissent les animaux d’un troupeau et les éleveurs, 2) le niveau du territoire où des populations animales et des populations humaines cohabitent dans un même environnement, avec des degrés d’interaction variable, et 3) un niveau plus large, pays voire continent où des enjeux liés de santé ou de bien-être sont présents indépendamment d’une proximité directe des populations animales et humaines. Cette échelle d’analyse est souvent aussi une échelle opérationnelle pour l’action et la décision. De façon croisée, les interactions peuvent aussi être classées en identifiant des situations où des effets directs existent entre santé et bien-être, et d’autres où les risques d’effets délétères liés à ces interactions sont plus ou moins réduits grâce à des actions de maîtrise ou au contraire accrus ou induits par des décisions de gestion (figure 2).

3.2 Des développements différents des deux approches aux différentes échelles

À l’échelle de l’exploitation, les questions de santé sont aujourd’hui généralement bien maîtrisées en ce qui concerne les risques infectieux : les mesures d’hygiène et de biosécurité limitent l’impact des zoonoses professionnelles pour les éleveurs. L’exposition aux dangers biologiques peut cependant être difficile à maîtriser pour les agents pathogènes qui se transmettent par voie aérienne, comme le révèle la prévalence élevée des réponses sérologiques à Coxiella burnetii. L’émergence de nouveaux agents pathogènes peut aussi induire de nouveaux risques comme le montre l’apparition de cas de grippe aviaire chez des éleveurs dont les bovins ont été infectés aux États-Unis (ou, dans une autre espèce, la transmission aux éleveurs du virus SARS-CoV-2 due à sa diffusion dans les élevages de visons). Les méthodes permettant de produire les connaissances pour comprendre les déterminants de ces risques sont établies. Cela permet de rapidement adapter les décisions de gestion pour les maîtriser. Les risques liés à des expositions aux dangers chimiques, communes aux éleveurs ou animaux, ou induites par la conduite d’élevage sont en revanche peu connus. L’échelle de l’exploitation est aussi celle où les travaux relatifs au bien-être mutuel homme-animal sont les plus engagés. Ils visent à comprendre comment les réponses de stress des animaux et des éleveurs ou à l’inverse leurs émotions positives peuvent être liées, et à faire évoluer les conditions d’élevage et de travail vers un meilleur bien-être mutuel. Différentes situations induisant des interactions entre santé et bien-être pourraient être caractérisées par des évaluations multicritères prenant en compte les deux dimensions : implications pour le travail de l’éleveur de la gestion de la santé de son troupeau, risques de maladies vectorielles accrus quand la conduite au pâturage est privilégiée, par exemple.

Figure 2. Questions d’intérêt dans lesquelles des relations entre santé de l’animal et santé de l’homme (One Health), bien-être animal et bien-être de l’homme (One Welfare), ou santé et bien-être peuvent être identifiées.

L’échelle du territoire est largement mobilisée pour comprendre et gérer les risques de santé. C’est une échelle clé pour identifier des conditions spécifiques à l’origine de l’exposition à des dangers biologiques (agents pathogènes, antibiorésistance) ou chimiques. Pour un même danger, les spécificités de territoire peuvent générer des situations de risques très différentes, qui évoluent au cours du temps. L’exemple de la tuberculose bovine illustre la diversité des enjeux de santé entre territoires selon les interactions rencontrées et les situations sanitaires qui en découlent (encadré 3, figure 3). La démarche d’analyse de risques permet d’intégrer des connaissances à cette échelle. Elle requiert souvent de produire des connaissances nouvelles pour comprendre les interactions en jeu dans un écosystème. Le cadre méthodologique doit alors reposer sur des approches interdisciplinaires et systémiques. Parmi les difficultés rencontrées pour éclairer les décisions, les hypothèses d’interactions à étudier et leur déterminisme dans un écosystème donné peuvent différer entre territoires. L’échelle du territoire est aussi logiquement celle à laquelle se sont structurées de nombreuses actions de maîtrise. Le périmètre d’intervention de structures de conseil, de gestionnaires de la santé reflète l’importance de cette échelle. Elle prend aussi en compte une diversité d’acteurs qui interagissent, notamment pour maîtriser les risques de façon coordonnée, mais aussi parfois quand certains acteurs induisent des risques pour d’autres lorsque leurs actions génèrent des externalités négatives (par exemple risques d’introduction d’animaux infectieux). À l’inverse, cette échelle a peu été considérée sur les questions de bien-être. Les atouts des territoires d’élevage pour contribuer au bien-être de la population générale, en enrichissant les liens homme-animal pourraient être investigués. C’est enfin une échelle à laquelle les interactions entre santé et bien-être peuvent interroger. Notamment, les mesures d’abattage de troupeaux ou de confinement pour lutter contre les épidémies posent question à la fois pour le bien-être animal et pour la santé mentale des éleveurs, l’accompagnement pour y faire face étant peu développé.

Figure 3. Principaux mécanismes de transmission et maintien de Mycobacterium bovis, agent de la tuberculose bovine selon les territoires.
Flèche pleine : mécanisme principal.
Flèche pointillée : mécanisme secondaire.

Encadré 3. L’évolution au cours du temps de la situation pour la tuberculose bovine est contrastée selon les territoires.

À la sortie de la Seconde Guerre mondiale, la tuberculose bovine était répandue dans les élevages européens. Maladie chronique difficile à diagnostiquer aux phases précoces de l’infection, elle se transmettait activement entre bovins dans les troupeaux atteints. Les contaminations de l’homme, soit directement au contact des bovins (zoonose professionnelle), soit via les produits animaux, en particulier le lait, étaient fréquentes et graves. La prophylaxie obligatoire, par dépistage systématique et abattage des troupeaux atteints, mise en place par les différents États a conduit à des situations hétérogènes entre territoires. En France, la grande majorité des territoires sont aujourd’hui indemnes de cette maladie. À l’inverse, dans certaines régions du Royaume-Uni ou d’Irlande, la contamination de la faune sauvage, en particulier des blaireaux, entretient le maintien de l’infection et est à l’origine de la recontamination fréquente des bovins. La prévalence de l’infection des troupeaux y reste élevée. Par contre, grâce à l’hygiène, à la surveillance des troupeaux, à la pasteurisation du lait, la transmission à l’homme est exceptionnelle, des risques survenant très rarement lors de la consommation de lait cru. La maîtrise de la tuberculose y est devenue une question de santé animale mais plus de santé publique. Enfin, en France, dans un petit nombre de territoires, une très faible proportion de troupeaux bovins est infectée. La maladie peut y rester difficile à éradiquer, d’une part quand certaines pratiques d’élevage à risque persistent, même très rarement (mouvements d’animaux entre troupeaux sans contrôle), et d’autre part du fait de la contamination de la faune sauvage par les bovins, pouvant à son tour générer des recontaminations occasionnelles. Les risques pour l’homme sont négligeables.

À l’échelle d’un pays ou d’un continent, les questions posées ont été peu étudiées. La survenue d’épidémies non maîtrisées en élevage pourrait aller jusqu’à affecter le bien-être de la population en cas de pénurie et perte de souveraineté alimentaire. Cependant, dans le contexte européen, les épidémies animales des dernières décennies ont été maîtrisées avant ce niveau d’impact, à la différence de pays en développement déjà vulnérables en termes de suffisance alimentaire. Dans les pays européens, l’impact sur le bien-être des éleveurs des attentes sociétales croissantes relatives au bien-être des animaux d’élevage pourrait contribuer à la perte d’attractivité des métiers en élevage. Les réflexions à cette échelle pourraient sans doute s’enrichir des concepts et méthodes développés par les sciences sociales sur les sujets d’impact à l’échelle des populations. Par exemple, en économie de la santé humaine, des métriques sont proposées pour apprécier les conséquences de mesures de santé publique en termes de qualité de vie en bonne santé (indicateurs QALY et DALY). Plus généralement l’évaluation de l’utilité à l’échelle d’une population est mobilisée en économie du bien-être pour raisonner l’allocation de ressources. Les sciences politiques apportent des méthodes d’évaluation des politiques publiques qui pourraient intégrer des objectifs pertinents relatifs à la santé et au bien-être considérés dans une acception large incluant les interactions animal – homme – environnement.

Enfin, quelle que soit l’échelle, la prise en compte de la dimension environnementale est encore très limitée, à la fois sur les questions de santé et de bien-être. Elle pourrait présenter des points de convergence entre les deux approches en particulier sur les questions en lien avec le changement climatique.

3.3 Des priorités implicites différentes sous-jacentes aux politiques impactant l’élevage

La prise de recul sur les différentes réglementations relatives à l’élevage permet d’identifier des priorités sous-jacentes, implicites, dans lesquelles la hiérarchie des valeurs de santé et de bien-être varie. De façon générale, les textes encadrant la maîtrise des maladies infectieuses animales privilégient la santé, au détriment parfois du bien-être animal (par exemple les mesures de confinement des animaux). La réglementation sur le bien-être animal vise en priorité le bien-être des animaux, même si sa mise en œuvre peut dans un premier temps avoir des conséquences sur le travail des éleveurs altérant leur bien-être. Enfin, lorsque les enjeux de santé humaine sont présents, ils sont considérés en priorité, même s’ils induisent des risques pour la santé des animaux, leur bien-être, le bien-être des éleveurs, voire dans certains cas l’équilibre des écosystèmes. Ces conséquences donnent souvent lieu à des critiques sévères de certaines actions mises en place : abattages d’animaux non infectés, interdiction de traitement des animaux contre certaines maladies comme la tuberculose pour limiter les risques de résistance de la bactérie aux anti-infectieux, réduction des populations d’animaux sauvages. Les dispositifs qui permettraient d’impliquer les différentes parties prenantes dans les réflexions conduisant à ces choix sont peu développés. L’ambition des approches One Health et One Welfare bénéficierait pourtant d’un dialogue impliquant citoyens, éleveurs, professionnels de santé, pouvoirs publics et collectivités, a minima pour rendre explicites les choix et idéalement pour élaborer un consensus sur les priorités.

Conclusion

Les approches One Health et One Welfare ont des ambitions communes. Elles reposent nécessairement sur des méthodes de travail interdisciplinaires et intersectorielles, que ce soit pour comprendre des interactions complexes ou pour gérer les enjeux de santé et de bien-être des populations animales et humaines. En ce qui concerne l’élevage des ruminants, l’opérationnalité des concepts est plus avancée sur les questions de santé que sur celles de bien-être. Les échelles auxquelles les questions ont été abordées jusqu’à présent diffèrent. Croiser les réflexions entre les deux domaines permettrait d’éclairer les décisions et d’orienter les politiques publiques. Cela apporterait aussi des capacités accrues pour étudier les interactions entre santé et bien-être des populations humaines et animales. Les approches systémiques à développer impliquent d’intégrer les questionnements et méthodes des sciences sociales, au-delà de la compréhension apportée par la biologie, l’écologie et l’épidémiologie pour étudier les écosystèmes. La prise en compte de l’ensemble des parties prenantes est aussi essentielle notamment pour rendre explicite des choix et priorités partagés lors de l’élaboration des politiques publiques.

Contribution des auteurs

Tous les auteurs ont participé à la conception, la rédaction et la révision de cet article.

Notes

  • 1. Cette synthèse a fait l’objet d’une présentation aux 27e journées Rencontres autour des Recherches sur les Ruminants, les 4-5 décembre 2024 à Paris (Fourichon et al., 2024).

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Résumé

Les concepts One Health et One Welfare sont fréquemment utilisés pour étiqueter diverses initiatives politiques et scientifiques, mais comment ont-ils émergé ? Dès la fin des années 1980, il apparaît que la protection de la santé de l’homme vis-à-vis des risques infectieux et chimiques, passe par celle de l’animal et de leurs interactions avec l’environnement. Le concept One Health reconnaît cette interdépendance et préconise une approche collaborative et interdisciplinaire pour relever les défis de santé liés aux changements globaux. C’est sur cette similitude d’interactions entre les compartiments humain, animal et environnemental et de besoin de réflexion interdisciplinaire que s’est développé le concept de One Welfare. Ce mouvement cherche à englober différents enjeux sociétaux de préservation de l’environnement et de la biodiversité, de durabilité de l’activité d’élevage, et de bien-être animal et humain pour améliorer la condition humaine et animale à l’échelle internationale. Cet article illustre ces deux concepts par des exemples impliquant les ruminants dans des systèmes d’élevage de pays développés. Dans une dernière partie, une réflexion est menée pour analyser les interactions complexes qui naissent lorsque l’on souhaite améliorer l’un ou l’autre de façon séparée. Si les deux concepts ont des ambitions communes, les approches déployées jusqu’à présent pour les rendre opérationnels sont distinctes. Les développements s’intéressent notamment à des échelles d’actions différentes, alors que des questions montrant leur étroite imbrication se posent.

Auteurs


Christine FOURICHON

christine.fourichon@oniris-nantes.fr

Affiliation : Oniris, INRAE, BIOEPAR, 44300, Nantes

Pays : France


Xavier BOIVIN

Affiliation : Université Clermont Auvergne, INRAE, VetAgro Sup, UMR Herbivores, 63122, Saint-Genès-Champanelle

Pays : France


Béatrice MOUNAIX

Affiliation : Institut de l’Élevage, 8 rue de Monvoisin, 35652, Le Rheu

Pays : France


François BEAUDEAU

Affiliation : Oniris, INRAE, BIOEPAR, 44300, Nantes

Pays : France


German CANO-SANCHO

Affiliation : Oniris, INRAE, LABERCA, 44300, Nantes

Pays : France


Gaud DERVILLY

Affiliation : Oniris, INRAE, LABERCA, 44300, Nantes

Pays : France


Juan-Manuel ARIZA

Affiliation : Oniris, INRAE, BIOEPAR, 44300, Nantes

Pays : France


Nathalie BAREILLE

Affiliation : Oniris, INRAE, BIOEPAR, 44300, Nantes

Pays : France

Pièces jointes

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