Influence de la gestion pastorale sur la conservation de la biodiversité des pâturages de montagne
Les pâturages de montagne, essentiels source de fourrage de qualité pour l’élevage, leur biodiversité et les services écosystémiques associés, sont aujourd’hui fragilisés. Le changement climatique et les transformations socio-économiques bouleversent cet équilibre millénaire. Comment adapter la gestion de ces écosystèmes uniques et durables pour les préserver ?
Introduction
Les prairies et les pâturages de montagne sont l’un des habitats les plus diversifiés au monde en termes de richesse d’espèces végétales (Dengler et al., 2014). Dans des zones restreintes (c’est-à-dire à l’échelle de la parcelle), leur diversité en plantes vasculaires peut même dépasser celle des forêts tropicales humides, généralement considérées comme les écosystèmes les plus diversifiés de la planète. Par exemple, à l’échelle d’1 m2, le record mondial de 89 espèces végétales provient d’une prairie sèche de montagne du centre de l’Argentine (Cantero et al., 1999). De plus, dans des parcelles de 16 et 49 m2, la richesse maximale en espèces vasculaires (105 et 131 espèces, respectivement) a été observée dans des prairies semi-naturelles situées dans la partie tchèque des Carpates blanches (Wilson et al., 2012). Bien que le nombre total d’espèces présentes dans toutes les prairies et pâturages de montagne européennes n’ait pas été quantifié, certaines informations sont disponibles pour certaines chaînes montagneuses. Par exemple, plus de 75 % des 4 485 espèces végétales recensées dans les Alpes sont liées à des habitats de prairies et pâturages situés entre les étages collinéens et alpins (Aeschimann et al., 2013).
À l’échelle mondiale, le nombre d’espèces végétales augmente généralement avec la surface, la productivité et la variabilité topographique dans les régions montagneuses (Rahbek et al., 2019). Plusieurs facteurs écologiques contribuent à expliquer cette grande biodiversité des zones montagneuses : i) la « nature insulaire » des montagnes, qui a favorisé au fil du temps une plus grande spéciation par rapport aux zones de plaine adjacentes, favorisant également un nombre élevé d’espèces endémiques (Körner & Spehn, 2024) ; ii) la grande variabilité topographique (altitude, pente, orientation, rugosité…), qui influence directement ou indirectement les facteurs microclimatiques (rayonnement solaire, température, durée de l’enneigement, durée de la saison de croissance…) et les facteurs pédologiques (altération de la roche mère, types de sol, humidité, teneur en nutriments, accumulation de matière organique…) ; iii) la coexistence de pelouses naturelles au-dessus de la limite des arbres et de prairies et pâturages semi-naturels au-dessous de la limite des arbres, entretenue par des pratiques agricoles traditionnelles telles que le pâturage du bétail ou la fenaison, qui caractérisent toutes les prairies tempérées d’Europe depuis le Néolithique (Hejcman et al., 2013). En outre, la variabilité microtopographique s’accompagne d’une grande variabilité des pratiques de gestion, ce qui amplifie la coexistence de différentes espèces au sein d’une même zone.
En Europe, la grande biodiversité qui caractérise les habitats de prairies de montagne est la plus élevée dans les prairies semi-naturelles, qui ont été créées par l’activité humaine à partir des forêts d’origine et qui constituent une partie essentielle des paysages culturels européens. Parmi celles-ci, les pelouses calcaires sèches semi-naturelles (incluses dans l’habitat d’intérêt communautaire 6210* de Natura 2000) sont considérées comme l’une des communautés les plus riches en espèces, car elles abritent de nombreuses espèces végétales rares et menacées, divers bryophytes et lichens, et sont d’une grande importance pour la conservation des espèces d’invertébrés qui leur sont associées, en particulier les papillons. Par exemple, en Suisse, elles ne couvrent que 2,3 % de la surface des prairies, mais elles contiennent 13,1 % de la flore suisse et plus de la moitié de toutes les espèces de papillons suisses, 170 espèces de papillons dépendant strictement de ce type d’habitat (Masé, 2005).
Lorsque les conditions environnementales deviennent plus difficiles pour la survie des plantes, comme dans les environnements pauvres en nutriments ou très arides et rocailleux, on observe une réduction du nombre d’espèces, car quelques espèces particulièrement adaptées à ces conditions difficiles deviennent dominantes par rapport aux autres. Par exemple, dans les pâturages alpins, les teneurs en nutriments du sol très faibles et très élevées sont généralement associées à la plus faible diversité végétale ; les faibles teneurs en nutriments favorisent la dominance de quelques espèces de plantes pauvres en nutriments au sein de la communauté végétale, tandis que les teneurs en nutriments élevées favorisent la dominance de quelques plantes nitrophiles (figure 1). De même, à des altitudes plus élevées dans les zones alpines, les facteurs environnementaux abiotiques tels que les facteurs climatiques (par exemple la durée de l’enneigement) deviennent particulièrement importants pour déterminer l’assemblage des communautés végétales, exerçant une influence significative sur la biodiversité (Marini et al., 2007). Dans les écosystèmes de montagne, une diminution générale de la diversité végétale s’observe avec l’augmentation de l’altitude, en raison des différences de température, de saison de croissance, de teneur en nutriments du sol, de dépôt minéral et de taux de minéralisation (Körner, 2021). Si le gradient écologique étudié est suffisamment large, la relation entre la teneur en nutriments du sol et la richesse des espèces végétales suit des tendances asymétriques en forme de courbe en cloche, avec un déclin abrupt vers l’extrémité supérieure du gradient (figure 1).
Figure 1 : Fertilité des pâturages et diversité végétale.
À l’échelle du paysage, l’interaction entre l’utilisation des terres et les conditions environnementales spécifiques au site se traduit par un éventail diversifié de communautés végétales, contribuant à un paysage caractérisé par une grande diversité (Gazol et al., 2012). Les prairies et les pâturages de montagnes européennes abritent une multitude d’habitats et de types de végétation. Par exemple, dans le Massif central français et dans les Alpes occidentales italiennes (région du Piémont), 135 et plus de 90 types de prairies et pâturages ont été respectivement identifiés sur une base phytosociologique, répartis de manière variable en fonction des gradients altitudinaux, des teneurs en nutriments du sol et des intensités de gestion (Cavallero et al., 2007 ; Le Hénaff et al., 2021).
1. Impact du bétail sur la diversité végétale
Les activités pastorales ont fondamentalement façonné les habitats de montagne. D’une part, les anciens éleveurs coupaient le bois pour se chauffer et fabriquer du fromage, ouvrant ainsi l’ancien paysage forestier, et le modifiaient encore, par exemple en enlevant des pierres et en effectuant des travaux de terrassement. D’autre part, le bétail lui-même a modifié ces habitats. La pâture par le bétail influence directement et indirectement l’environnement par la défoliation sélective, le piétinement, la redistribution des nutriments et le transport des graines. Ainsi, les herbivores modifient la compétition pour la lumière au sol et les nutriments dans le sol entre les espèces au sein de la communauté végétale, façonnant ainsi sa composition botanique (Gaujour et al., 2012).
1.1. Défoliation sélective
En principe, le bétail enlève la biomasse végétale en la broutant. Ainsi, les espèces végétales ayant une grande capacité de régénération et capables de faire face à une défoliation régulière ont un avantage concurrentiel sur les plantes plus sensibles. Les jeunes arbustes et arbres, en particulier, sont moins adaptées à la pâture et ont donc été progressivement éliminés des prairies et pâturages au fil des siècles. Cependant, le bétail ne broute pas de manière homogène, mais de manière inégale (Bayle et al., 2019). Certaines parcelles sont broutées de manière intensive, offrant par exemple des conditions idéales pour les espèces à croissance rapide et exigeantes en lumière. En revanche, les parcelles restantes moins pâturées constituent un refuge pour les espèces à croissance plus lente et adaptées à l’ombrage. Les insectes et la faune profitent également de ces conditions hétérogènes. Par exemple, dans les Alpes, la présence de certaines espèces parapluie indiquant une grande biodiversité végétale et animale, comme le tétras lyre, est étroitement liée à la grande hétérogénéité des pâturages et des habitats arbustifs (Braunisch et al., 2016).
Cette préférence pour une certaine parcelle de pâturage et l’évitement d’une autre n’est pas aléatoire, mais dépend des préférences alimentaires des différents types de bétail (Wood, 1987). Le bétail peut être classé en trois catégories principales : les paisseurs (« grazers »), les mangeurs mixtes (« mixed feeders ») et les cueilleurs (« browsers »). Les bovins et les ovins sont généralement considérés comme des paisseurs, car leur régime alimentaire est principalement composé de graminées et de moins de 25 % de dicotylédones herbacées et ligneuses, y compris les feuilles et les tiges d’arbustes. Cependant, les bovins utilisent leur langue pour couper le fourrage, ce qui les rend moins sélectifs que les moutons et les chevaux (Crofts, 1999), qui broutent plus près du sol avec des bouches plus étroites et des lèvres plus flexibles. En revanche, grâce à la forme de leurs arcades incisives et lèvres mobiles, les chèvres peuvent généralement inclure un plus grand pourcentage d’espèces arbustives dans leur régime alimentaire, raison pour laquelle elles sont considérées comme des mangeurs mixtes (c’est-à-dire que les dicotylédones représentent 25 à 75 % du régime alimentaire) ou des cueilleurs, c’est-à-dire que les dicotylédones représentent plus de 75 % du régime alimentaire (Iussig et al., 2015).
La défoliation sélective a un impact direct sur la végétation des pâturages, façonnant à la fois la forme de croissance des différentes espèces et la composition botanique (Díaz et al., 2007). Dans le cas des zones intensivement pâturées, la forme de croissance des espèces végétales est modifiée à court et moyen terme, avec une réduction générale de la taille et de la biomasse totale produite et une augmentation des formes de croissance prostrées. À moyen et long terme, la composition botanique est également affectée, puisque la proportion d’espèces résistantes à la défoliation (par exemple, les graminées productives) augmente et que les espèces végétales à croissance rapide et à fort potentiel de régénération l’emportent sur les espèces plus sensibles (Díaz et al., 2007). Les plantes en rosette ou stolonifères (au lieu des touffes) sont normalement épargnées par le bétail, car elles sont trop courtes pour être atteintes par la bouche des brouteurs (Díaz et al., 2007). En outre, elles bénéficient de l’élimination des plantes plus hautes, ce qui leur procure plus de lumière et réduit la concurrence pour les nutriments. Enfin, certaines plantes ont développé des mécanismes de défense spécifiques pour éviter la défoliation, tels que des composés secondaires toxiques, une structure peu attrayante (par exemple, des feuilles ou des épines dures et hérissées) ou une très faible teneur en nutriments dans leur biomasse aérienne (Pauler et al., 2020a). En résumé, le bétail a créé un large spectre de niches écologiques occupées par une multitude d’espèces végétales présentant une grande variabilité dans les mécanismes d’adaptation au pâturage. Cependant, si l’intensité de la défoliation est trop élevée et répétée trop fréquemment dans le temps, l’hétérogénéité des conditions et donc la diversité végétale sont réduites. Le mécanisme sous-jacent est que quelques plantes très bien adaptées supplantent toutes les autres espèces. Elles deviennent exceptionnellement dominantes au sein de la communauté végétale, réduisant ainsi la diversité végétale globale. En effet, selon l’hypothèse de la perturbation intermédiaire, la richesse des espèces est plus élevée à des niveaux d’intensité de pâturage moyens, car elle atteint son maximum à des niveaux de perturbation intermédiaires en raison de la coexistence de plusieurs espèces due à des chevauchements de niches écologiques (Grime, 1973).
De plus, au cours du siècle dernier, l’homme a fortement modifié les caractéristiques du bétail, perturbant ainsi involontairement l’équilibre sensible entre la préférence et l’évitement de certaines espèces végétales pour différentes races bovines. Grâce à l’élevage moderne, les races de bétail ont été façonnées en vue d’une plus grande productivité en lait ou en viande. La productivité élevée du bétail moderne s’accompagne d’une demande accrue en nutriments. Pour couvrir cette demande, les races modernes sélectionnent fortement les espèces végétales à haute valeur nutritive, telles que les graminées à larges feuilles et les légumineuses. À l’inverse, elles évitent clairement les plantes moins appétentes et moins digestes, car ces animaux ne sont pas en mesure de couvrir leur demande génétiquement définie de production de lait ou de viande sur la base de plantes fourragères de faible qualité nutritive sans l’apport de concentrés alimentaires (Pauler et al., 2020a ; Berry et al., 2002). En outre, les races modernes évitent plus nettement les espèces végétales qui se protègent contre l’herbivorie que les races traditionnelles. Par exemple, les espèces épineuses, telles que les chardons, ou les plantes toxiques sont plus souvent sélectionnées par les bovins de race highland à faible productivité que par les races modernes à forte productivité (Pauler et al., 2020a). Par conséquent, l’équilibre subtil entre préférence et évitement est modifié : l’avantage concurrentiel des espèces végétales peu attrayantes augmente encore et elles deviennent de plus en plus dominantes, supplantant ainsi d’autres espèces végétales. Par exemple, dans les pâturages de haute altitude, l’espèce de graminée peu attrayante Nardus stricta L. envahit les anciens habitats biodiversifiés, car elle est à peine broutée par les races modernes. Ce phénomène s’accompagne d’une réduction de la biodiversité et de la qualité du fourrage des pâturages. En améliorant la productivité du bétail, l’élevage moderne a involontairement augmenté la sélectivité du bétail et l’uniformité des pâturages tout en réduisant leur biodiversité (Pauler et al., 2019).
1.2 Piétinement
Le piétinement du bétail a une influence directe et importante sur la composition botanique des pâturages. Les espèces végétales sensibles au piétinement peuvent être détruites par la pression de piétinement du bétail. Cependant, certaines espèces présentent des adaptations physiologiques spécifiques au piétinement, telles que les rosettes, les stolons ou les rhizomes (Díaz et al., 2007), qui permettent de stocker les nutriments en toute sécurité sous terre et de se régénérer rapidement après le piétinement. Ces spécialistes du piétinement bénéficient de l’activité pastorale car leurs concurrents sont affaiblis ou détruits dans les zones fréquemment visitées par le bétail, tandis que d’autres zones d’alpage rarement visitées peuvent offrir un habitat pour la survie d’espèces moins adaptées au piétinement. Par exemple, les espèces subordonnées peu abondantes, qui constituent la composante principale de la diversité végétale dans les pâturages, sont favorisées par un piétinement modéré grâce à la création d’espaces où la concurrence racinaire des espèces dominantes est réduite (Mariotte et al., 2013). Le piétinement du bétail peut ainsi augmenter l’hétérogénéité et donc la biodiversité des alpages, non seulement pour les plantes, mais aussi pour d’autres organismes. Les amphibiens, par exemple, peuvent bénéficier des trous créés par les sabots et remplis d’eau, du compactage du sol qui diminue l’évapotranspiration ou de l’élimination de la végétation sénescente qui crée un habitat supplémentaire et des possibilités de recherche de nourriture (Howell et al., 2019). D’un autre côté, ils peuvent souffrir de l’augmentation des niveaux de nitrate, des charges de sédiments et des taux d’oxygène dissous si l’intensité du pâturage est trop élevée (Howell et al., 2019).
Cependant, cet effet bénéfique du piétinement ne s’applique qu’aux pâturages bien gérés et dont l’intensité d’utilisation est adaptée au site. Dans les régions montagneuses, la topographie est particulièrement accidentée et conduit souvent à une concentration du bétail dans les zones plus favorables, telles que les aires de repos plates, les zones autour des étables, les points d’abreuvement et d’attraction, et les chemins de promenade le long des courbes de niveau (Probo et al., 2014). Si la pression de piétinement n’est pas bien répartie dans le pâturage, les communautés végétales des zones les plus piétinées deviennent pauvres en espèces. Par conséquent, elles sont dominées par un petit nombre d’espèces qui tolèrent le passage répété du bétail, telles que Taraxacum officinale aggr., Alchemilla vulgaris aggr., Plantago major L., Poa supina Schrad. et Poa trivialis L. (Supek et al., 2014). Si l’intensité de la gestion et la pression de piétinement augmentent encore, la végétation est détruite, en particulier si le pâturage est effectué dans des conditions humides. Le sol ouvert ainsi créé peut alors être rapidement colonisé par des espèces adaptées au piétinement, telles que Rumex alpinus L., qui utilisent le sol nu plus rapidement que la plupart des autres espèces. Ainsi, non seulement elles diminuent la qualité du fourrage des pâturages, mais elles réduisent également la biodiversité, car elles surpassent compétitivement les espèces moins résistantes au piétinement et dominent la communauté végétale.
Comme nous l’avons déjà mentionné, l’élevage moderne a modifié les caractéristiques du bétail, ce qui a également conduit à un impact plus négatif du piétinement sur les alpages : les bovins orientés vers la production sont plus lourds que les races traditionnelles, ce qui augmente le poids du corps sur le sol. En outre, leurs sabots sont relativement petits par rapport à leur poids corporel. La pression exercée sur le sol par centimètre carré est donc beaucoup plus élevée que pour les races traditionnelles. Pauler et al. (2020b) ont constaté que la pression exercée par les sabots des bovins croisés Angus × Holstein, très productifs, dépasse d’un tiers la pression exercée par les sabots des bovins robustes de race highland peu productifs (Pauler et al., 2020b). Une pression de piétinement plus élevée exacerbe les effets négatifs du piétinement sur la biodiversité (Pauler et al., 2019). En effet, les races bovines très productives utilisent l’espace disponible sur les pâturages de manière moins homogène que les races traditionnelles : plus les bovins sont productifs, plus ils restent dans les zones plates et riches en nutriments, tout en évitant les zones escarpées et pauvres en nutriments. Au contraire, les bovins robustes, tels que les Highlands, explorent également les endroits escarpés et caillouteux à faible qualité fourragère (Pauler et al., 2020b). En se concentrant sur des zones restreintes, les races modernes surutilisent souvent ces endroits attrayants, ce qui entraîne le compactage du sol et la destruction de la végétation. Ainsi, l’élevage moderne a aggravé l’impact négatif du piétinement et a localement augmenté le risque d’érosion dans les zones de montagne.
1.3 Redistribution des nutriments et des graines
Outre la pente, il existe d’autres facteurs de déplacement du bétail dans les pâturages de montagne, tels que la qualité et la quantité du fourrage ou la distance par rapport aux infrastructures et aux points d’eau (Probo et al., 2014 ; Homburger et al., 2015). L’utilisation de l’espace par le bétail n’étant pas uniformément répartie sur l’ensemble du pâturage, il existe une redistribution des nutriments opérée par le bétail à l’intérieur des pâturages. En effet, les nutriments dans les alpages sont principalement transportés par les excrétions des animaux, avec une absorption pendant la recherche de nourriture et un retour par les excrétions d’urine et de bouse (Schnyder et al., 2010). La distribution spatiale des bouses et de l’urine n’est pas uniforme et les excrétions sont principalement déposées dans les zones de repos plates et localisées, qui s’enrichissent avec le temps, tandis que les zones de pâturage plus pentues sont caractérisées par un appauvrissement en nutriments (Svensk et al., 2023). La disponibilité des nutriments (en particulier de l’azote) affecte fortement le développement des espèces végétales, car il s’agit de l’un des facteurs limitants les plus importants pour les espèces et les communautés végétales dans les environnements montagneux, affectant à la fois la productivité des pâturages et la composition des communautés végétales. En créant des zones à teneur contrastée en nutriments, le bétail en pâture peut accroître l’hétérogénéité et la biodiversité des pâturages au niveau du paysage, avec un gradient allant de communautés végétales pauvres en nutriments à des communautés végétales riches en nutriments. Ainsi, on trouve des zones riches en nutriments dominées par de grandes espèces généralistes nitrophiles à proximité de zones pauvres en nutriments abritant de petites espèces spécialisées peu exigeantes.
De plus, le bétail agit comme un vecteur de dispersion des graines de plantes dans et entre les pâturages, principalement par endozoochorie, c’est-à-dire l’ingestion de graines de plantes et leur excrétion par dépôt fécal, et par épizoochorie, c’est-à-dire la dispersion des graines par transport externe, ce qui est particulièrement important pour certains types de bétail, tels que les moutons. Ces espèces végétales zoochoriques sont particulièrement affectées par la réduction du bétail en pâturage. De plus, dans les pâturages qui ne sont plus broutés, les espèces zoochoriques perdent leurs liens avec d’autres populations et les populations isolées ont une capacité de survie plus faible. La dispersion des graines par le bétail est donc un aspect important et souvent négligé du maintien de la diversité végétale. Il a été démontré que les bovins de la race à poils longs highland augmentent la biodiversité en transportant des graines d’espèces végétales épizoochoriques (Pauler et al., 2019).
2. Impact de la gestion du pâturage sur la diversité végétale
2.1. Processus d’intensification et d’extensification
Les pâturages riches en espèces créés par le bétail ne sont pas autosuffisants, mais dépendent d’un pâturage continu dans le cadre d’une gestion adaptée au site. Cependant, au cours des dernières décennies, deux tendances opposées se sont manifestées dans les pâturages de montagne européens, toutes deux nuisant à la diversité végétale : une intensification des zones favorables et une extensification des zones les plus marginales (Tasser & Tappeiner, 2002).
Les pâturages situés dans des conditions favorables, telles que des zones plates à haute qualité fourragère, bien desservies par les infrastructures, proches des routes et des bâtiments agricoles, ont généralement fait l’objet d’une gestion plus intensive. Cela peut se traduire par une densité de chargement plus élevée et/ou une saison de pâturage prolongée, le choix d’une race plus productive, le remplacement des petits ruminants par des bovins ou l’utilisation d’engrais ou de machines. Ces mesures ont conduit à une homogénéisation des pâturages. Les niches écologiques des espèces végétales et animales adaptées aux systèmes extensifs ont été réduites, de même que la biodiversité globale de ces zones. Dans les pâturages gérés de manière intensive, on observe un basculement vers quelques espèces de plantes généralistes qui sont les mieux à même de profiter de ces conditions. Si l’intensité de gestion augmente encore et que les pâturages sont surexploités, la forte pression de piétinement entraîne non seulement une perte de biodiversité, mais aussi un compactage et une discontinuité de la couverture du sol. Par conséquent, le risque d’instabilité et d’érosion du sol augmente. De plus, la surabondance de nutriments concentrés dans les endroits favorables entraîne le lessivage des nutriments et une réduction de la qualité de l’eau en aval.
La tendance inverse s’est produite dans les pâturages moins favorables : les zones escarpées et rocheuses de faible qualité fourragère et éloignées des infrastructures n’ont pas pu être gérées de manière rentable. Ce processus pourrait être accéléré par le changement climatique, avec une réduction de l’eau provenant des glaciers et une augmentation des épisodes de sécheresse estivale conduisant à un approvisionnement en eau insuffisant pour les animaux dans de nombreuses régions. En raison de leur faible rentabilité, ces pâturages ont souvent été utilisés de manière extensive, c’est-à-dire gérés avec un taux de chargement très faible, voire abandonnés. L’abandon des pâturages favorise la dominance d’un petit nombre d’espèces végétales dominantes et induit une forte diminution de la diversité (Mariotte et al., 2012). La réduction du pâturage a également modifié fondamentalement les facteurs de composition de la végétation des pâturages : s’il n’y a plus de bétail défoliant continuellement les plantes des pâturages et piétinant les jeunes plantes, la succession d’espèces ligneuses commence. L’envahissement par les arbustes et le reboisement se sont accompagnés d’une perte de nombreux services écosystémiques fournis par les alpages, tels que la production traditionnelle de viande et de fromage ou la création d’un paysage attrayant, précieux pour le tourisme et l’économie (Soliva et al., 2010). Cependant, cette succession de pâturages de montagne ouverts et riches en espèces vers des peuplements d’arbustes ou des forêts n’a pas seulement été causée par une réduction du bétail, mais aussi par un changement de type de bétail. En Suisse, par exemple, le nombre de chèvres a été réduit de 80 %, tandis que le nombre de bovins a augmenté de 50 % au cours des 150 dernières années (Pauler et al., 2022). Comme les cueilleurs ont été remplacés par des paisseurs, il y a moins d’animaux qui écorcent directement et réduisent la couverture des plantes ligneuses.
Figure 2 : Couverture des espèces ligneuses et diversité végétale.
Tant qu’il existe une mosaïque de pâturages ouverts et d’arbustes ou d’arbres isolés, la biodiversité bénéficie de l’extensification : la richesse des espèces végétales atteint son maximum lorsque la couverture arbustive est faible ou moyenne (figure 2). Toutefois, si le pâturage est encore réduit et que les espèces ligneuses deviennent dominantes, la biodiversité diminue en raison de l’uniformité beaucoup plus grande de la végétation ligneuse. Cela vaut aussi bien pour les arbustes nains tels que Rhododendron ferrugineum L. (Pornaro et al., 2017) que pour les grands arbustes tels que Pinus mugo Turra. Il existe une exception à cette relation en forme de cloche entre le couvert arbustif et la biodiversité : sur les pâturages colonisés par l’aulne vert (Alnus viridis Chaix), la réduction de la biodiversité se produit déjà lorsque le couvert arbustif est très faible et diminue de manière linéaire avec chaque arbuste supplémentaire (figure 2). Malheureusement, l’aulne vert se répand plus vite que toute autre espèce d’arbuste dans les Alpes européennes et les chaînes de montagnes d’Europe de l’Est, en raison de sa capacité à fixer l’azote atmosphérique (Pauler et al., 2022). L’excédent d’azote crée un sous-bois eutrophisé, où les quelques espèces végétales nitrophiles prennent le dessus sur toutes les autres. En outre, l’azote excédentaire surfertilise les prairies voisines et les eaux en aval – réduisant ainsi la biodiversité environnante – et il est libéré dans l’atmosphère sous forme d’oxyde nitreux, qui est un important gaz à effet de serre.
La régulation de l’aulne vert par une gestion adaptée du bétail est une contribution très efficace au maintien de la biodiversité végétale (Svensk et al., 2022). Pour d’autres taxons, l’impact de l’embroussaillement est plus complexe. Par exemple, on observe une augmentation globale de la diversité des oiseaux après l’abandon des pâturages, mais la plupart des espèces qui colonisent les pâturages abandonnés sont communes et répandues, tandis que les espèces d’oiseaux typiques des pâturages menacés perdent leur habitat et voient donc leur nombre diminuer (Laiolo et al., 2004).
2.2 Systèmes de pâturage
Le mode de gestion du bétail a un impact fondamental sur la composition botanique des pâturages. Historiquement, un grand nombre de petits troupeaux familiaux étaient présents dans les montagnes européennes et les systèmes de pâturage basés sur le gardiennage étaient les plus courants (MacDonald et al., 2000). Ces systèmes permettaient souvent une gestion contrôlée des ressources fourragères, les animaux étant conduits quotidiennement vers les zones de pâturage, souvent à un stade phénologique optimal des espèces fourragères, ce qui permettait également de tirer parti du gradient climatique altitudinal et de la transhumance verticale du bétail dans ces écosystèmes montagneux (Meuret & Provenza, 2015). Toutefois, au cours des dernières décennies, les changements socio-économiques et structurels ont profondément modifié ces systèmes pastoraux. Le nombre d’exploitations et de travailleurs par exploitation dans les zones de montagne a fortement diminué, tandis que le nombre moyen d’animaux par troupeau a augmenté pour maintenir une rentabilité économique suffisante. En conséquence, et afin de réduire les besoins en main-d’œuvre, les systèmes de pâturage continu ont souvent remplacé la gestion des pâturages basée sur le gardiennage (Probo et al., 2014) dans plusieurs zones de montagne telles que les Alpes et les Apennins italiens. Dans ces systèmes, le bétail peut être relâché et autorisé à errer librement sur de vastes zones de pâturage. Le bétail en liberté sur le terrain montagneux a entraîné une utilisation des pâturages plus sélective et spatialement hétérogène que par le passé, lorsque le gardiennage limitait la préférence naturelle des animaux pour les topographies douces avec des plantes plus productives et de plus grande valeur nutritive. En fait, les bergers encourageaient le bétail à utiliser les terrains accidentés (Meuret & Provenza, 2015). Par conséquent, les systèmes de pâture continue ont accentué les processus de sous-pâture et de surpâture, avec des effets négatifs sur la conservation de la biodiversité (Probo et al., 2014). Une technique de gestion alternative qui peut réduire ce problème est la mise en œuvre de systèmes de pâture tournante, c’est-à-dire des systèmes basés sur la clôture de secteurs de pâturage spécifiques vers lesquels le bétail est progressivement déplacé, tandis que les autres secteurs ne sont pas pâturés. Pour réduire la sélectivité du bétail, la définition des périodes et des taux de chargement des animaux pour le pâturage dans ces zones devrait être équilibrée avec la disponibilité en fourrage, permettant ainsi une meilleure exploitation de la ressource fourragère et ayant des effets positifs sur la qualité du fourrage (MacDonald et al., 2000). Dans un alpage de haute altitude, Perotti et al. (2018) ont montré que la mise en œuvre d’un système de pâturage tournant sur une période de cinq ans était bénéfique pour la conservation de la biodiversité, grâce également à l’augmentation du transport des graines et de la connectivité entre les différentes communautés végétales.
2.3. Taux de chargement du bétail et fréquence, planification et durée du pâturage
L’une des caractéristiques de gestion les plus importantes, en ce qui concerne ses effets sur les changements de diversité végétale dans les pâturages de montagne, est le taux de chargement des animaux, c’est-à-dire le nombre d’unités de bétail qui paissent sur une zone spécifique pendant une période donnée (Dumont et al., 2009). Il est admis qu’un taux de chargement équilibré entre les besoins des animaux et la disponibilité en fourrage maximiserait la santé des animaux et stabiliserait la composition botanique, avec également des effets bénéfiques sur la richesse en espèces végétales. La disponibilité en fourrage peut être estimée au moyen de différentes techniques, telles que la réalisation d’études phyto-pastorales de la végétation visant à évaluer la composition botanique, la valeur pastorale du fourrage associé et les caractéristiques du terrain conformément aux procédures décrites par Cavallero et al. (2007). Cependant, le taux de chargement réalisé est souvent déséquilibré et ne correspond pas à la disponibilité en fourrage. Des taux de chargement trop élevés ou trop faibles par rapport à la ressource fourragère auraient un impact négatif sur la composition botanique des pâturages, déterminant respectivement le développement de communautés végétales nitrophiles et envahies par les espèces ligneuses. Plus précisément, des taux de chargement déséquilibrés et trop élevés peuvent généralement entraîner une augmentation des espèces rudérales (en particulier annuelles) et compétitives, une baisse de la hauteur des plantes (y compris pour le port en rosette), une floraison précoce ainsi qu’une hausse des espèces dispersant leurs graines. En revanche, un faible taux de chargement déséquilibré peut favoriser les graminées et les herbacées tolérantes au stress (Gaujour et al., 2012) ainsi que l’embroussaillement par des ligneux (Probo et al., 2014).
L’impact du taux de chargement sur la végétation dépend non seulement du nombre d’animaux par unité de surface et de temps et d’une disponibilité en fourrage adaptée, mais aussi de la fréquence à laquelle les périodes de pâture sont répétées dans le temps. En effet, dans de nombreuses situations, en particulier dans les systèmes de pâturage tournant, les activités de recherche de nourriture peuvent être répétées au cours de la même saison de pâturage. Dans ce cas, il est nécessaire de veiller à ce que l’herbe ait suffisamment de temps pour régénérer une biomasse suffisante pour être à nouveau utilisée par le bétail. Les effets de la fréquence du pâturage, probablement liés à l’intensité de la pâture, sur la structure et la diversité de la végétation sont significatifs pour chaque parcelle de végétation distincte. Dans un premier temps, le pâturage du bétail peut induire un changement local vers une composition modifiée de la communauté végétale, qui peut devenir permanente si la même gestion de pâture est répétée à long terme. En outre, un pâturage fréquent favorise la présence d’espèces présentant une forte résistance à la défoliation, comme le montrent les indices de pâturage et de piétinement proposés par Briemle et al. (2002). À l’inverse, les faibles fréquences de pâturage sont souvent associées à une plus grande diversité végétale (Ravetto Enri et al., 2020a), ce qui conforte l’hypothèse de perturbation intermédiaire. Homburger et al. (2015) ont affirmé qu’une rotation stricte des pâturages comprenant de courtes périodes de pâture est essentielle pour exercer un contrôle sur l’activité du bétail et, par conséquent, affecter les processus de l’écosystème et la dynamique de la végétation. Ainsi, un contrôle précis de la gestion du pâturage aurait un impact positif sur la fourniture de services écosystémiques, ainsi que sur la biodiversité.
INRAE (Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement) a mené plusieurs essais dans les pâturages du Massif central français pour évaluer l’efficacité de techniques de pâture innovantes dans l’amélioration de la disponibilité trophique pour les insectes pollinisateurs (Farruggia et al., 2012 ; Ravetto Enri et al., 2017). Selon ces expériences, l’exclusion d’une parcelle d’un système de pâturage tournant, correspondant à une courte période de repos au plus fort de la saison de floraison des dicotylédones, augmenterait de manière significative la présence de papillons et de bourdons. Il convient de noter que les mesures concernant les performances des pâturages et du bétail n’ont pas montré de diminution significative, ce qui souligne la possibilité d’intégrer à la fois la conservation de la nature et les besoins du bétail dans un système de pâturage innovant « respectueux de la biodiversité ».
Les systèmes typiques de gestion des troupeaux dans les montagnes européennes sont basés sur la transhumance verticale et sur une exploitation progressive des pâturages à différentes altitudes, comprenant un premier pâturage à basse altitude à la fin du printemps/début de l’été, suivi d’un déplacement du bétail vers les pâturages d’été situés aux plus hautes altitudes, et un second pâturage sur la repousse de la végétation à la fin de la saison de pâture d’été/début de l’automne à des altitudes plus basses. Ce système permet donc une période de repos assez longue pour la végétation de basse altitude, ce qui peut être utile pour le cycle de floraison des plantes et pour assurer la conservation de l’habitat et de la biodiversité. En effet, Ubach et al. (2023) ont constaté dans les Pyrénées que la richesse et l’abondance des papillons augmentaient au cours de l’été lorsque le troupeau se déplaçait vers les parties les plus élevées des pâturages.
Un pâturage précoce est généralement recommandé pour contrôler le développement des arbustes et des plantes grossières (Dörner, 2023), car l’achèvement du cycle de reproduction et, consécutivement, la propagation des espèces de faible qualité fourragère par dissémination sont entravés, tandis que les espèces de bonne qualité (en particulier les graminées tolérantes à la pâture) sont plutôt renforcées par le tallage. D’autre part, les espèces fourragères de faible qualité présentent une appétence décroissante du début à la fin de la saison de croissance, généralement en raison d’une augmentation de la fraction de fibres et d’une réduction de la teneur en protéines et de la digestibilité, de sorte qu’un pâturage précoce pourrait être recommandé pour une exploitation optimale des zones marginales caractérisées par des types de végétation pauvres en nutriments.
La planification et la durée de la saison de pâture devraient également tenir compte du changement climatique, qui a un impact considérable sur la végétation des pâturages de montagne et sur la gestion pastorale associée. Ravetto Enri et al. (2020a), par exemple, recommandent des dates d’exploitation adaptatives pour la gestion des prairies suisses riches en espèces au lieu de dates fixes prédéfinies, afin de tenir compte du stade phénologique moyen des espèces clés sélectionnées, de prendre en considération les fluctuations climatiques interannuelles et l’anticipation en cours de la phénologie de la végétation.
De plus, des pratiques pastorales spécifiques peuvent être mises en œuvre pour la gestion des alpages et de leur biodiversité. En particulier, des parcs de nuit mobiles avec un taux de chargement élevé peuvent être réalisés sur des zones sous-utilisées et envahies par les arbustes (Pittarello et al., 2016). Le bétail peut aussi être attiré sur ces zones par l’utilisation de points attractifs, tels que des blocs à base de sel (Probo et al., 2013) ou à base de mélasse (Svensk et al., 2022). La concentration des activités du bétail (défoliation, piétinement, transport de graines et de nutriments) dans les parcs de nuit mobiles ou autour des points attractifs peut être particulièrement bénéfique pour réduire le couvert arbustif et augmenter le couvert herbacé à moyen terme (Probo et al., 2016). Dans un essai mené dans les Alpes occidentales, la composition botanique a changé de manière significative sur une période de trois ans, avec une augmentation de la diversité végétale dans les zones de parcs de nuit mobiles (Pittarello et al., 2016). Plus particulièrement, la couverture des espèces de prairies méso-eutrophes ainsi que celle des espèces de lisières et de hautes herbes a été favorisée par la mise en œuvre de cette pratique de gestion, tandis que la couverture des espèces d’arbustes et de type boréal a diminué de manière significative.
Conclusions et perspectives
Comme de nombreux exemples sur les Alpes l’ont montré, une gestion pastorale adaptée aux caractéristiques du site, qui évite les situations de surpâture et de sous-pâture, est l’élément clé pour promouvoir la biodiversité des pâturages de montagne. Aujourd’hui, l’un des facteurs qui affecte le plus la biodiversité des alpages est la mise en œuvre de politiques de paiements directs, qui déterminent les pratiques des agriculteurs. Les politiques de paiements directs établissent des règles sur les taux de chargement minimaux, les dates de pâture et les pratiques spécifiques de gestion des pâturages (par exemple, le débroussaillage, le désherbage…). Ces politiques varient d’un pays à l’autre et dans les différentes régions des pays de l’Union européenne, en fonction de la mise en œuvre des plans de développement rural. Toutefois, ces politiques ne sont souvent pas adaptées aux conditions spécifiques des différents sites de montagne et se limitent souvent à définir des seuils génériques pour des paramètres individuels (par exemple, le taux de chargement) pour accéder aux paiements directs. À l’heure actuelle, les paiements directs ne sont pas en mesure d’empêcher l’abandon des zones défavorables et l’embroussaillement par les arbustes, et leur mise en œuvre fait l’objet d’un débat. La pression croissante des grands prédateurs qui reconquièrent les zones montagneuses (Boitani & Linnell, 2015) contribue à ce processus. Sur les terrains difficiles, les mesures de protection telles que les clôtures supplémentaires, les parcs de nuit, les bergers permanents et les chiens de garde sont coûteuses et prennent beaucoup de temps. Ces mesures sont difficiles, voire impossibles à mettre en œuvre, en particulier dans les zones reculées et escarpées les plus exposées à l’abandon. Bien que la perte de bétail tué par des loups ou des ours soit souvent remboursée par des paiements publics (Dalmasso et al., 2012), les agriculteurs peuvent rarement amener leurs animaux dans des régions où la présence de prédateurs est forte et connue. Les petits ruminants, qui seraient le moyen le plus efficace de contrôler l’envahissement par les arbustes et de préserver la biodiversité des pâturages, sont particulièrement exposés aux attaques du loup et c’est pourquoi leur nombre est le plus réduit (Pauler et al., 2022).
Le changement climatique remet aussi en question la gestion des alpages et, par conséquent, de la biodiversité. L’augmentation des températures et de l’évaporation compliquera encore la gestion de l’eau et le maintien d’une pression de pâture adaptée au site dans certaines zones. D’autre part, la biomasse fourragère disponible augmentera en altitude, là où la température était jusqu’à présent un facteur limitant (Guggenberger et al., 2021). Ainsi, une pression de pâture accrue sera nécessaire pour éviter la sous-utilisation et ses conséquences négatives sur la biodiversité. Des périodes de sécheresse plus longues, d’autre part, réduiront la disponibilité en fourrage frais et obligeront les agriculteurs à développer de nouvelles stratégies d’adaptation pour combler ce manque de fourrage et éviter la surexploitation pendant la sécheresse.
Les défis auxquels sont confrontés les pâturages de montagne et leur biodiversité sont multiples, mais il existe diverses approches pour y répondre. Tout d’abord, les politiques axées sur les résultats peuvent promouvoir de nouvelles stratégies de gestion adaptées aux sites afin de préserver la biodiversité des alpages. Dans un travail récent réalisé entre les Apennins et les Alpes, Napoleone et al. (2022) ont souligné que les contrats de pâture au niveau de l’exploitation et le contrôle périodique sur le terrain peuvent influencer positivement l’intensité du pâturage à petite échelle, avec une transition d’une approche axée sur les règles à une approche axée sur les résultats, par exemple la persistance de certaines espèces typiques des habitats concernés. La mise en œuvre à grande échelle de ces systèmes pourrait permettre un contrôle direct de l’impact environnemental des paiements et une sensibilisation accrue des agriculteurs à l’environnement, qui adopteraient progressivement et volontairement des mesures pour soutenir la biodiversité et les services écosystémiques qui lui sont associés (Russi et al., 2016).
Deuxièmement, l’une des stratégies d’adaptation aux changements climatiques pourrait être le développement de systèmes sylvopastoraux avec des arbres à haute tige présents dans les pâturages, dans lesquels l’ombre fournie par les arbres pourrait réduire les impacts négatifs de la sécheresse sur la biomasse herbacée et le stress thermique sur les animaux. Par ailleurs, plusieurs espèces d’arbres pourraient également constituer une source de fourrage supplémentaire, car ils résistent mieux aux périodes sèches de l’été et leurs feuilles ont une bonne qualité fourragère (Ravetto Enri et al., 2020b). En plus, les systèmes silvopastoraux caractérisés par une mosaïque d’arbres, arbustes et pâturages peuvent créer plusieurs microclimats qui peuvent favoriser différents habitats et communautés végétales, en augmentant la biodiversité globale à l’échelle de l’exploitation et du paysage, comme démontré dans les pâturages boisés du Jura (Buttler, 2014). Dans ce cas également, la gestion doit être adaptée au site, en prévoyant non seulement des systèmes de pâturage durables pour maintenir la composition botanique des herbages, mais aussi pour le renouvellement de la composante forestière. La gestion pastorale active des grandes surfaces envahies ces dernières décennies par des ligneux pourrait donc faire évoluer ces forêts buissonnantes vers des systèmes sylvopastoraux caractérisés par une alternance de pâturages et d’arbres à haute tige, avec une gestion pastorale active de la ressource fourragère des sous-bois, qui pourrait aussi minimiser les risques d’incendies. Pour parvenir à ce résultat, il est cependant nécessaire d’harmoniser les politiques de gestion forestière avec celles des paiements directs dans l’agriculture, qui sont aujourd’hui souvent en conflit.
Troisièmement, un transfert des connaissances scientifiques aux agriculteurs est crucial à une époque où les connaissances traditionnelles sont rarement transmises oralement. Ce n’est que si les connaissances sur la gestion durable des pâturages sont rassemblées et mises facilement à disposition des praticiens que ces derniers pourront préserver la biodiversité de leurs pâturages de montagne. Les experts suisses en matière d’alpages ont par exemple créé une page internet fournissant des informations sur la régulation des mauvaises herbes et des arbustes (https://www.patura-alpina.ch/) : ces fiches d’information et vidéos mettant en scène des agriculteurs et des experts suggèrent des mesures durables allant au-delà des herbicides.
Pour finir, les nouvelles technologies peuvent faciliter une gestion adaptée au site et préserver la biodiversité des pâturages de montagne. Les systèmes de capteurs aéroportés fournissent déjà des informations sur l’état des prairies, telles que la biomasse disponible, mais ils ne sont pas encore applicables aux zones de montagne présentant une structure végétale hétérogène. Les systèmes de positionnement géographiques et les capteurs supplémentaires sur les animaux permettent aux agriculteurs de savoir où se trouvent leurs animaux et quelles sont les conditions auxquelles ils sont confrontés en temps réel. Les clôtures virtuelles réduisent la charge de travail liée à l’installation de clôtures sur des terrains difficiles et permettent un guidage plus précis du bétail (Probo et al., 2024a), par exemple en excluant simplement les zones sensibles et riches en espèces du pâturage les jours de pluie, où les dommages causés par le piétinement pourraient être plus importants. Cependant, la plupart de ces nouveaux systèmes ont été conçus pour des applications à l’intérieur ou en plaines et pour un bétail très productif, et ne fonctionnent donc pas toujours de manière fiable dans les conditions de montagne. De plus, dans les zones montagneuses, il existe toujours des limitations spécifiques qui rendent l’applicabilité des nouvelles technologies plus difficile, comme la faible couverture du réseau de téléphonie mobile. Les technologies modernes s’accompagnent aussi de coûts élevés et il convient de décider au cas par cas si elles ont un sens dans les systèmes de montagne.
Contributions des auteurs
MP : conceptualisation, méthodologie, supervision, validation, rédaction des versions originale et révisée, et correction ; ML : conceptualisation, méthodologie, rédaction de la version originale ; SRE : conceptualisation, méthodologie, rédaction des versions originale et révisée, et correction ; PM : conceptualisation, méthodologie, rédaction des versions originale et révisée, et correction ; CP : conceptualisation, méthodologie, rédaction des versions originale et révisée, et correction.
Notes
- 1. Cet article a fait l'objet d'une présentation aux 27e journées Rencontres autour des Recherches sur les Ruminants, les 4-5 décembre 2024 à Paris (Probo et al., 2024b).
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Résumé
Les pâturages de montagne comptent parmi les écosystèmes les plus riches en termes de biodiversité. De plus, ils fournissent du fourrage, offrent des services écosystémiques de régulation essentiels à la société (par exemple, le stockage du carbone dans le sol, la purification de l’eau, la prévention des incendies de forêt) et sont très précieux pour le tourisme. Les agroécosystèmes de montagne se caractérisent par une grande variabilité des facteurs abiotiques à petite échelle, tels que l’altitude, l’orientation, la pente et la roche mère. Néanmoins, les pâturages de montagne ne sont pas naturels, mais le résultat d’activités pastorales humaines menées depuis des millénaires. La gestion traditionnelle a utilisé les différents comportements alimentaires de différentes espèces et races de bétail, ainsi que leurs impacts spécifiques sur la végétation, tels que la défoliation sélective, le piétinement, la redistribution des nutriments et le transport des graines. La sélection des animaux et la technique de gestion des troupeaux, le taux de chargement, la période, la longueur et la fréquence de pâturage ont été adaptés aux caractéristiques spécifiques des différents sites afin de garantir une utilisation durable des ressources fourragères, créant ainsi involontairement un habitat d’une grande biodiversité. Au cours des dernières décennies, la gestion traditionnelle a été remise en question par les changements socio-économiques ; les politiques de paiement direct influencent les décisions des agriculteurs, la pression croissante des grands prédateurs complique la gestion et le changement climatique modifie le rendement des pâturages et leur croissance saisonnière. Face à ces défis, les agriculteurs doivent redéfinir ce que signifie une gestion adaptée au site. Ils doivent ainsi éviter la surutilisation et la sous-utilisation des pâturages. Dans les zones sous-utilisées, l’envahissement par les espèces ligneuses entraîne une perte de la surface des pâturages, de la biodiversité et des paysages attrayants. L’intensification de la gestion, quant à elle, provoque l’érosion, le lessivage des éléments nutritifs et la réduction de la biodiversité. Toutefois, les nouvelles technologies, l’amélioration du transfert de connaissances et les politiques axées sur les résultats ont le potentiel de promouvoir de nouvelles stratégies de gestion adaptées aux sites afin de préserver les pâturages de montagne et leur biodiversité.
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