Gestion de la reproduction sans hormones chez les mammifères d’élevage en AB en France
La réussite de la reproduction est un élément clé de la rentabilité des élevages. Comment la gérer en élevage bio dont le cahier des charges interdit les traitements à base d’hormones ou de substances analogues en vue de maîtriser la reproduction ? Quelles alternatives sont disponibles ou en cours d’étude ? Comment équilibrer les enjeux financier, réglementaire et éthique dans la gestion de la reproduction en élevage bio ?
Introduction
En France, l’élevage en agriculture biologique (AB) a progressé de façon régulière depuis les 10 dernières années dans toutes les filières animales ; toutefois il reste minoritaire (annexe 1) par rapport à l’agriculture conventionnelle (AC). Ces filières d’élevage en agriculture biologique sont décrites par Chatellier (2024).
La maîtrise de la reproduction des mammifères d’élevage est une pratique nécessaire en AB comme en AC pour i) optimiser la reproduction (maximisation du taux de mise bas, diminution des périodes improductives, choix de la période de mise bas la plus favorable en fonction des ressources fourragères et/ou des conditions climatiques et/ou du prix du marché), ii) pratiquer l’insémination animale (IA) pour bénéficier des schémas de sélection, et iii) faciliter le travail de l’éleveur (groupage des interventions, utilisation optimale des bâtiments) tout en préservant le bien-être animal et le bon état sanitaire du troupeau. Elle met en œuvre des stratégies techniques ou des conduites d’élevage adaptées aux différentes espèces. Cet article a pour objectifs de rappeler les spécificités du cahier des charges AB qui peuvent avoir des conséquences en termes de maîtrise de la reproduction, puis de présenter espèce par espèce (ovins, caprins, porcins et bovins) les connaissances scientifiques et les pratiques pour la maîtrise de la reproduction utilisées par les éleveurs en AB en France, et enfin de discuter les limites des textes réglementaires, la pertinence et l’acceptabilité de ces pratiques en élevages AB.
1. Spécificités du cahier des charges de l’agriculture biologique
Officiellement reconnue par les pouvoirs publics français depuis la loi d’orientation agricole de 1980, l’AB est régie par un règlement européen, la dernière référence est le règlement UE 2018/848 qui s’applique depuis le 1er janvier 2022. Le mode de production biologique est fondé sur la non-utilisation de produits chimiques de synthèse et d’organismes génétiquement modifiés (OGM), un élevage de type extensif avec un accès à l’extérieur, une alimentation biologique, des bâtiments avec des espaces confortables, des médecines douces en cas de besoin, et le respect du bien-être des animaux.
La réglementation s’articule entre des principes fondamentaux qui contextualisent l’état d’esprit dans lequel le règlement a été rédigé et les règles contrôlables qui en découlent. Parmi les grands principes généraux de ce règlement, une attention particulière est portée sur le respect des cycles naturels pour maintenir et améliorer la santé des animaux, et l’assurance d’un niveau élevé de bien-être animal en respectant les besoins physiologiques et éthologiques propres à chaque espèce. Le règlement européen exige de prévenir toute souffrance et d’éviter la mutilation des animaux (castration, écornage…), toutefois la castration des porcelets est autorisée sous anesthésie et analgésie.
Un objectif essentiel de l’AB est de restreindre l’utilisation d’intrants chimiques de synthèse (traitements vétérinaires, additifs…). La préservation de la santé des animaux est basée sur l’application de mesures préventives (Bareille et al., 2022). Toutefois, en cas de mise en danger des animaux ou en l’absence de pratiques et méthodes de gestion appropriées, l’utilisation d’intrants est limitée aux substances naturelles ou dérivées de substances naturelles. Celles autorisées en AB font l’objet d’une liste positive limitative (règlement UE 2021/1165). Lorsqu’en dépit des mesures préventives un animal vient à être malade ou blessé, il est traité immédiatement, mais le nombre de traitements vétérinaires doit être limité. Les matières premières d’origine minérale et les additifs alimentaires autorisés en AB (règlement UE 2021/1165), ainsi que les produits phytothérapeutiques et homéopathiques, sont utilisés de préférence aux médicaments vétérinaires allopathiques chimiques de synthèse dans le cadre de la santé animale.
En ce qui concerne la reproduction des animaux en élevage biologique, le règlement AB recommande le recours à des méthodes naturelles. Toutefois, l’IA est autorisée (il n’est pas fait mention de l’IA en semence sexée, qui est utilisée en élevages bovins AB). Le cahier des charges indique que la reproduction ne doit être ni accélérée ni ralentie par des traitements à base d’hormones ou d’autres substances ayant un effet analogue en vue de maîtriser la reproduction ou à d’autres fins (c’est-à-dire pour un usage zootechnique, induction ou synchronisation des chaleurs par exemple). Dans le cadre du traitement d’une pathologie de la reproduction, un traitement vétérinaire (usage thérapeutique) peut être appliqué à un animal individuel. Enfin, le règlement AB précise que le transfert d’embryons et le clonage ne peuvent pas être utilisés.
2. Maîtrise de la reproduction chez les ovins et les caprins
2.1. Objectifs
La reproduction des espèces ovine et caprine est saisonnière. Elle se manifeste par une alternance au cours de l’année de périodes d’activité sexuelle maximale (saison sexuelle : en général d’août à janvier), et minimale (anœstrus saisonnier ou contre-saison : en général de février à juillet). Pendant la saison sexuelle, les femelles non fécondées présentent des cycles ovariens réguliers d’environ 17 jours (brebis) ou 21 jours (chèvre). La période de repos sexuel chez la femelle se caractérise par l’absence d’œstrus, le plus souvent associée à l’absence d’ovulation. La saisonnalité est contrôlée par les variations annuelles de la durée du jour (photopériode). Toutefois, la durée de la saison sexuelle, les dates de début et fin de saison sexuelle et la capacité à se reproduire naturellement à contre-saison varient selon la race, l’âge et des facteurs environnementaux, notamment l’état nutritionnel (Chanvallon et al., 2011 ; Menassol et al., 2012). La durée moyenne de gestation est comprise entre 144 et 152 jours dans les deux espèces. Dans l’espèce ovine, la taille moyenne de la portée varie selon les races entre 1 et 3,5 agneaux par mise bas. La plupart des races de chèvres françaises ont une prolificité de 1,5 à 2,5 chevreaux par mise bas (Pellicer-Rubio et al., 2009).
Les objectifs de maîtrise de la reproduction en élevages ovins et caprins sont similaires en AB et AC. Pour les filières laitières, la maîtrise de la reproduction vise l’optimisation de la fertilité pour assurer une mise bas et une lactation par femelle et par an. En production ovine allaitante l’objectif est d’optimiser la fertilité et la prolificité pour augmenter la productivité numérique (nombre d’agneaux produits par brebis et par an).
La saisonnalité de la reproduction, limitant la fertilité et la prolificité à contre-saison, est à l’origine des variations annuelles de la production et du prix du lait et de la viande suivant la loi de l’offre et de la demande. La maîtrise de la saisonnalité de la reproduction est donc primordiale pour maintenir l’offre tout au long de l’année et produire au moment souhaité pour bénéficier des prix avantageux en fonction de la demande des consommateurs et des marchés. Selon des données issues d’enquêtes en élevages dans les principaux bassins de production (Lurette et al., 2016), la reproduction à contre-saison est fréquente dans les trois filières mais une moindre proportion d’éleveurs la pratique en AB vs en AC.
Grouper les mises bas est utile en élevages laitiers et allaitants pour faciliter la gestion des lots d’animaux et du travail (surveillance des mises bas, alimentation, prophylaxie). Dans les filières laitières, cet objectif est notamment poursuivi par les éleveurs livreurs pour caler au même moment la période de collecte de l’ensemble du troupeau. Toutefois, les éleveurs fromagers peuvent rechercher un étalement des mises bas pour mieux s’adapter à leur rythme de transformation et produire du fromage sur des périodes plus longues. De même, dans les grands troupeaux ovins allaitants, l’étalement des agnelages permet de limiter les pics de travail dus au grand nombre de naissances sur de courtes périodes, et éviter la surcharge de brebis dans les bâtiments d'élevage.
L’induction et la synchronisation des chaleurs et des ovulations sont nécessaires pour la pratique de la monte en main, mais surtout pour la pratique de l’IA qui est l’outil sur lequel s’appuient les schémas de sélection pour diffuser et accélérer le progrès génétique. Les critères de sélection des races ovines (Idele, 2016a) et caprines (Idele, 2020) laitières incluent les caractères laitiers (production et qualité), la morphologie de la mamelle et la résistance aux mammites et à la tremblante. Chez les caprins, s’y ajoute l’index de fertilité à l’IA depuis 2023. Les critères de sélection génétique en ovin allaitant ciblent la prolificité, les qualités maternelles (valeur laitière), la croissance des agneaux et la valeur bouchère (Idele, 2016b). Tous ces caractères sont utiles aussi bien en AC qu’en AB.
Enfin, la maîtrise de la reproduction des agnelles et des chevrettes a comme objectifs d’avancer l’âge à la première saillie, d’améliorer la fertilité à contre-saison et de caler la reproduction des jeunes femelles à la même période que les adultes. En race lacaune, l’âge moyen au premier agnelage est plus tardif en AB qu’en AC (16,4 vs 15,5 mois ; Roinsard & Le Mézec, 2017).
2.2. Pratiques actuelles
a. Synchronisation des chaleurs et des ovulations sans hormones
Le traitement hormonal d’induction et de synchronisation de l’œstrus et de l’ovulation est la pratique la plus efficace pour réussir la reproduction à contre-saison et synchroniser les chaleurs en saison et contre-saison. En France, il combine un progestagène de synthèse (FGA : acétate de fluorogestone), une gonadotrophine d’origine animale (eCG, equine chorionic gonadotropin) et dans le cas de la chèvre, une prostaglandine de synthèse (cloprosténol). Il est utilisé principalement pour l’IA. Après traitement hormonal, les ovulations sont synchronisées sur 12-24 heures et le lot de femelles traitées est inséminé à un moment fixe sans détection des chaleurs (Fatet et al., 2008). C’est pourquoi, chez les petits ruminants, l’IA est très majoritairement associée à la synchronisation hormonale des chaleurs et des ovulations et est, de ce fait, pratiquée quasi exclusivement en AC (annexe 2).
En AB, le traitement hormonal étant interdit, l’effet mâle est la seule pratique disponible pour induire et synchroniser les chaleurs et les ovulations hors saison sexuelle. Il consiste à introduire un mâle sexuellement actif au sein d’un groupe de femelles anovulatoires (au repos sexuel, en anœstrus saisonnier ou non cyclées). Les signaux sensoriels émis par le mâle (notamment olfactifs), vont ainsi activer l’axe hypothalamo-hypophyso-gonadique des femelles et induire l’œstrus et l’ovulation de façon synchronisée. Les chaleurs fertiles induites par le mâle apparaissent, chez la brebis, à partir du 14e jour après l’exposition aux béliers et s’étalent sur deux semaines. Chez la chèvre, elles ont lieu entre le 6e et 9e jour après l’exposition aux boucs. L’effet mâle permet de déclencher et synchroniser la puberté des jeunes femelles, stimuler la reproduction à contre-saison et grouper les mises bas. Toutefois, il ne permet pas la synchronisation des ovulations chez des femelles cyclées (en saison sexuelle), contrairement aux traitements hormonaux.
L’efficacité de l’effet mâle dépend de différents facteurs comme l’âge ou l’état nutritionnel (Debus et al., 2022), et en particulier de la saisonnalité de la race. La réponse à l’effet mâle peut être améliorée en stimulant l’activité sexuelle des mâles par une alimentation adaptée, leur exposition préalable à des femelles en chaleur et, notamment, grâce au traitement préalable des mâles avec des protocoles lumineux de désaisonnement (cf. § 2.2.b). La réceptivité des femelles aux signaux stimulateurs du mâle est également importante. Par exemple, la qualité de la réponse à l’effet mâle peut varier en fonction de l’intervalle entre le tarissement et la mise à la reproduction ou selon le statut nutritionnel des femelles. De même, le traitement des femelles avec un protocole lumineux de désaisonnement peut faciliter l’expression de l’œstrus et l’ovulation, avancer l’ovulation, favoriser l’installation d’une cyclicité et/ou améliorer la fertilité (Pellicer-Rubio et al., 2019).
De nouveaux protocoles d’IA basés sur l’effet mâle ont été étudiés (Pellicer-Rubio et al., 2019). Toutefois, l’effet mâle en élevages ovins et caprins reste davantage lié au désaisonnement de la reproduction et au groupage des mises bas qu’à l’IA, qui est plus utilisée en AC par rapport à l’AB, et notamment par les filières laitières (figure 1). En outre, la pratique de l’effet mâle nécessite l’élevage d’un nombre important de mâles dont les manipulations sont chronophages et contraignantes pour l’éleveur, ce qui représente un frein pour la diffusion de cette technique à grande échelle, notamment dans le cadre de l’IA. Pour faciliter la mise en œuvre d’un effet mâle, des études sont en cours pour identifier les molécules olfactives (phéromones) émises par le mâle et impliquées dans l’induction et la synchronisation des ovulations à contre-saison (Fréret et al., 2018a). Cette stratégie permettrait de remplacer totalement ou partiellement les mâles lors de l’effet mâle, réduisant ainsi le coût d’entretien des mâles et le temps de travail pour la réalisation d’un effet mâle efficace. Une étude auprès des intervenants et des éleveurs en AB montrait leur intérêt pour cette stratégie perçue comme « naturelle », mais soulevait des interrogations quant au respect du cahier des charges AB (Lurette et al., 2016).
Le cahier des charges AB autorise l’IA qui nécessite, sans synchronisation hormonale des ovulations, une détection des chaleurs pour déterminer à quel moment et quelles femelles inséminer. L’IA peut être appliquée soit en saison sexuelle sur chaleurs dites « naturelles » (chez des femelles cyclées et non synchronisées), soit à contre-saison sur chaleurs induites et synchronisées par effet mâle.
La détection des chaleurs chez les petits ruminants est réalisée visuellement par l’éleveur à l’aide de boucs ou béliers sexuellement actifs. La détection repose sur l’observation des chevauchements des femelles par les mâles ou des marques de chevauchements faites sur les femelles par des mâles équipés de harnais munis de crayons marqueurs. Des changements comportementaux chez les chèvres (agitation, frétillement de la queue, bêlements, comportements de proceptivité) peuvent être aussi utilisés pour faciliter la détection des chaleurs. Toutefois, le comportement d’œstrus chez les brebis est extrêmement discret et, à ce jour, les seules méthodes de détection en élevage impliquent l’utilisation de béliers (Fréret et al., 2018b). La détection des chaleurs n’est pas une pratique très répandue en élevages ovins et caprins, étant plus utilisée en AC qu’en AB et majoritairement par les filières laitières pour l’IA ou la monte en main (figure 1).
Des protocoles d’IA sans hormones après détection des chaleurs sont déployés en filière caprine (Grc, 2022a, 2022b) et sont en cours d’étude en élevages ovins laitiers (Maton et al., 2014). En AB, l’IA reste marginale et est seulement pratiquée en filière caprine (figure 1). Les élevages en AB bénéficient du progrès génétique par l’achat de béliers et boucs issus d’IA. L’utilisation anecdotique de l’IA en AB s’explique par un protocole de détection des chaleurs chronophage et des IA sur plusieurs jours. En filière ovine, l'utilisation de semence fraîche pour l’IA (durée de conservation de seulement huit heures) est une contrainte supplémentaire.
Pour faciliter le travail et planifier l’IA ou la lutte en main après effet mâle ou sur chaleurs naturelles, des outils de détection automatisée des chaleurs pourraient être mis à profit, comme c’est le cas dans la filière bovine. Des dispositifs sont développés et/ou évalués par INRAE pour les ovins (Maton et al., 2014 ; Alhamada et al., 2016) et les caprins (Fréret et al., 2015 ; Fréret et al., 2020 ; Fréret et al., 2022). Des enquêtes sur leur acceptabilité en élevages ovins et caprins AB et AC ont mis en avant l’intérêt de ces outils pour accompagner les protocoles d’IA. Toutefois, les avis étaient majoritairement réservés ou défavorables quant au déploiement de ces outils en élevages de petits ruminants. Les principaux freins étaient liés à un coût trop élevé (notamment pour les colliers-activimètres déjà commercialisés chez les bovins), à la nécessité (pour le dispositif Alpha-D®) d’une identification électronique supplémentaire et à l’inadéquation de ces dispositifs avec une conduite au pâturage ou en estive (Lurette et al., 2016).
b. Reproduction à contre-saison
En AB, pour une reproduction à contre-saison, le choix de races « qui désaisonnent naturellement » (i. e. capables de se reproduire à contre-saison) serait le plus adapté. Ces races sont caractérisées par une saison sexuelle plus longue, une proportion élevée de femelles (> 30 %) qui ovulent spontanément hors saison sexuelle et/ou une réponse efficace à l’effet mâle tout au long de l’anœstrus saisonnier (Chanvallon et al., 2011). Toutefois, leurs résultats zootechniques restent souvent inférieurs à ceux observés en saison, notamment chez les jeunes femelles (Pellicer-Rubio et al., 2023 ; figure 2).
Les pratiques disponibles pour la reproduction à contre-saison sont l’effet mâle (cf. § 2.2.a.) et les traitements lumineux (ou photopériodiques) utilisées seules ou en combinaison.
Les traitements lumineux sont basés sur le contrôle de la photopériode perçue par les animaux. Il s’agit de soumettre les animaux à une alternance de périodes de « jours longs » (JL : inhibiteurs de la reproduction, équivalents à 16 heures de lumière par jour) puis de « jours courts » (JC : stimulateurs de la reproduction, 8-12 heures de lumière par jour) à des moments de l’année précis. Pour une reproduction au printemps (avril-mai), les JL sont appliqués pendant l’hiver dans les bâtiments d’élevage ouverts, en éclairant les animaux avec de la lumière artificielle pour mimer une photopériode de 16 heures (la lumière naturelle pouvant remplacer l’éclairage artificiel pendant le jour), puis les animaux sont soumis aux JC « naturels » de la fin d’hiver. Pour une reproduction en été, les animaux sont traités avec des JL dès la fin de l’hiver (ou reçoivent les JL naturels du printemps), puis avec des JC « artificiels », car les implants de mélatonine (hormone produite par la glande pinéale qui permet à l’animal de mesurer la photopériode ; MELOVINE) sont interdits en AB (Pellicer-Rubio et al., 2019). Les JC artificiels étant difficiles à réaliser au printemps dans les bâtiments d’élevage ouverts, un nouveau protocole lumineux basé exclusivement sur des JL « artificiels » est en cours d’étude chez la chèvre laitière. Il est basé sur l’induction d’un état réfractaire aux JL en exposant les animaux à des JL artificiels depuis la fin de l’automne/début de l’hiver pendant environ six mois consécutifs, ce qui permet la réactivation de l’axe de la reproduction en été. Ce traitement permet d’obtenir une bonne réponse œstrale et ovulatoire des chèvres après effet mâle, similaire à celle obtenue avec le traitement photopériodique de référence utilisant de la mélatonine. Des études complémentaires sont nécessaires pour confirmer ces résultats à plus grande échelle en élevages caprins, et pour évaluer son efficacité chez les ovins (Pellicer-Rubio et al., 2020). En outre, les traitements lumineux sont compatibles avec un accès à l’extérieur et au pâturage des animaux, à condition que les durées des phases diurnes et nocturnes du traitement soient respectées.
Les traitements lumineux sont utilisés majoritairement en filière caprine, et très peu en AB (figure 1). Néanmoins, la filière ovine laitière s’intéresse à cette pratique pour améliorer la fertilité à contre-saison des agnelles en AB. Un nouveau protocole lumineux est en cours d’étude en élevages AB. Les premiers résultats montrent une augmentation du pourcentage d’agnelles mettant bas jusqu’à 60 % sur 30 jours, contre les 30 % environ observés dans des élevages de référence n’utilisant pas de photopériodisme (Loubière et al., 2022 ; figure 3).
La conduite en lactations longues consiste à poursuivre la lactation, en l’absence de mise bas, au-delà de 480 jours (700 jours en moyenne), la lactation pouvant se prolonger sur plusieurs années. Aujourd’hui, plus d’un tiers des éleveurs caprins mettent une part significative des chèvres en lactation longue (plus de 10 % du cheptel national en 2020). Cette stratégie n’est plus systématiquement mise en œuvre pour gérer les chèvres en échec de reproduction, mais elle est considérée comme une pratique d’élevage à part entière pour, notamment, simplifier la conduite des troupeaux et désaisonner la production laitière (de Crémoux et al., 2020). De ce fait, les lactations longues peuvent être considérées comme une pratique alternative aux traitements hormonaux pour produire du lait sans interruption toute l’année. Les lactations longues sont plus utilisées en AC qu’en AB, par les éleveurs livreurs (68 % vs 56 % en AC (n = 198) et AB (n = 41), respectivement) et fermiers (36 % vs 16 % en AC (n = 192) et AB (n = 58), respectivement) (Idele, INOSYS Réseaux d’élevage, base des données DIAPASON 2018-2020).
La pratique des lactations longues n’a pas fait l’objet de discussions sur son acceptabilité en AB. Elle pourrait être perçue comme de caractère intensif, s’éloignant du respect des cycles naturels des animaux. Toutefois, elle est fondée sur l’aptitude naturelle de la chèvre à moduler facilement le volume de stockage de la glande mammaire (compliance), ce qui lui permet de s’adapter facilement aux changements des conditions de traite, i. e. un changement du rythme de traite (deux vs une traite par jour), ou à maintenir une production laitière satisfaisante lors de lactations longues (Hassoun et al., 2016). Enfin, la conduite en lactations longues des chèvres aurait comme avantage la réduction du nombre de chevreaux produits (difficiles à valoriser), la diminution de l’ensemble des risques associés au péripartum et une probable augmentation de la vie productive (Zobel et al., 2015).
c. Productivité numérique
La productivité numérique des brebis (nombre d’agneaux produits par brebis et par an) est liée aux performances de reproduction (fertilité et prolificité), qui varient avec l’état nutritionnel des femelles (Pellicer-Rubio et al., 2023). La pratique du « flushing » consiste à supplémenter en énergie et protéines la ration alimentaire des femelles avant et pendant la période de mise à la reproduction pour améliorer leur état corporel et augmenter la fertilité et la prolificité (Tournadre et al., 2009). En France, le « flushing » est davantage pratiqué en élevage ovin qu’en élevage caprin. Des enquêtes en élevage dans les principaux bassins de production montrent l’utilisation quasi systématique d’un « flushing » en élevages ovins laitiers aussi bien en AB qu’en AC. En élevages ovins allaitants, le « flushing » est moins utilisé qu’en filière laitière et davantage en AC qu’en AB (figure 1). Pourtant, il s’agit d’une pratique de maîtrise de la reproduction qui s’accorde parfaitement avec la notion de naturalité du cahier des charges AB.
L'intensification du rythme de reproduction, par exemple des systèmes à trois agnelages par brebis sur une période de deux ans (au lieu du rythme habituel d’un agnelage par brebis et par an), permet d’améliorer la productivité mais exige une bonne maîtrise de la reproduction à contre-saison. En élevages ovins AB, sans utilisation d’hormones, cette stratégie devient plus risquée : les résultats de fertilité et de prolificité sont plus faibles (malgré une augmentation globale de la productivité), le taux de mortalité des agneaux est plus élevé (Benoit et al., 2009).
Les conduites de la reproduction moins intensives (un agnelage par brebis et par an) sont à prioriser en élevages ovins allaitants AB. Dans ces cas, la conduite d’un troupeau en plusieurs lots mis à la reproduction à différentes périodes de l’année permet d’améliorer la productivité numérique en augmentant le nombre de brebis agnelées par an, grâce au recyclage rapide des brebis vides et à l’avancement de l’âge à la première mise bas. Cette approche permet de compenser la baisse de fertilité et de prolificité à contre-saison, notamment chez les agnelles, mais entraîne une augmentation des coûts liés à l’alimentation des lots mis à la reproduction à contre-saison (alimentation hivernale en bâtiment des animaux à forts besoins : brebis en lactation, engraissement des agneaux), ainsi qu’une charge de travail plus élevée (étalement des périodes de surveillance des mises bas, organisation soutenue du recyclage des brebis vides et pour la gestion des agnelles de renouvellement afin d’équilibrer la taille des sous-lots). Elle apparaît toutefois comme une solution dans les grands troupeaux pour limiter les pics de travail dus au très grand nombre de naissances sur de courtes périodes, et pour éviter la surcharge de brebis dans les bâtiments d'élevage (Pellicer-Rubio et al., 2023).
3. Maîtrise de la reproduction chez les porcins
3.1. Conduite et impact de la réglementation AB
L’élevage porcin conventionnel est caractérisé par une conduite en bandes : les animaux du même stade physiologique sont élevés en groupes de taille équivalente. Cette conduite présente des avantages pour la gestion des animaux (IA groupées réalisées sur chaleurs spontanées (annexe 2), surveillance des mises bas, ajustement de la taille des portées par des adoptions croisées, soins aux porcelets, bandes pour le post-sevrage et l’engraissement), l’organisation de l’élevage (nettoyage des locaux entre bandes et vide sanitaire) et la production de lots de porcelets homogènes, mais elle nécessite la synchronisation des cycles des femelles. Le sevrage, réalisé à 21 ou 28 jours, est utilisé pour cette synchronisation car les chaleurs réapparaissent en moyenne 4,5 jours après le sevrage. Toutefois, pour intégrer dans les bandes les cochettes de renouvellement ou les truies décalées suite à un problème de fertilité, des traitements hormonaux à base de progestagènes synthétiques peuvent être administrés. En production biologique, la synchronisation hormonale est interdite et les cochettes sont mises à la reproduction sur chaleurs spontanées. Les éleveurs ont donc plus de difficultés à choisir une bande pour intégrer les cochettes de renouvellement ou les truies décalées. Ceci entraîne un étalement important des saillies ou des IA, avec des jeunes femelles décalées, conduites hors bandes jusqu’à leur première mise bas. L’étalement des chaleurs et des mises bas en élevage porcin biologique complique la gestion des animaux, augmente la charge de travail, diminue les performances de l’élevage et impacte l’homogénéité des âges et poids de sevrage des porcelets (Aubry et al., 2018 ; Boulot et al., 2018).
3.2. Pratiques de maîtrise de la reproduction
a. Effet verrat
L’introduction d’un verrat sexuellement actif dans un groupe de femelles réceptives peut induire un comportement de chaleurs et des ovulations, c’est ce qu’on appelle l’effet mâle. Ce mécanisme d’induction du développement folliculaire et de l’ovulation n’est pas clairement élucidé chez les porcins, mais semble être lié à une augmentation de la fréquence des pulses de LH (hormone lutéinisante) chez la truie (Knox, 2019).
L’effet mâle peut être utilisé pour induire et synchroniser la puberté des cochettes. Avant la puberté, les cochettes prépubères deviennent sensibles à la présence du mâle et l’exposition au verrat doit être réalisée dans cette période de réceptivité pour être efficace. Des biomarqueurs salivaires de cette période de réceptivité à l’effet mâle ont été identifiés (Goudet et al., 2021). La réponse à l’effet mâle est influencée par le taux de croissance et l’âge des cochettes, la proportion de cochettes qui répondent de manière synchrone augmentant avec l’âge (Knox, 2019). Ainsi, des cochettes exposées au verrat à partir de 140-155 jours expriment des chaleurs plus tôt mais avec le même intervalle exposition-chaleurs que des cochettes exposées à partir de 156-170 jours (Magnabosco et al., 2014). De même, le pourcentage de cochettes en œstrus 10 jours après une exposition au verrat est de 67, 78 et 88 % pour des cochettes âgées de 160, 180 et 200 jours au début de l’exposition (Stančić et al., 2012). La réponse à l’effet mâle est aussi influencée par le poids des cochettes qui doivent avoir atteint un poids minimum pour être capables de répondre à une stimulation par le verrat (Hughes et al., 1990).
L’efficacité de l’effet mâle est aussi liée à l’âge du verrat qui doit être sexuellement mature (> 10 mois), à la durée et la fréquence du contact avec le verrat avec une stimulation maximale pour une exposition de 20 minutes deux à trois fois par jour, et au type de contact entre le verrat et les cochettes qui doit permettre une stimulation olfactive, tactile, visuelle et auditive (Stančić et al., 2012). Le stimulus olfactif a le plus d’impact, il agit notamment par des phéromones stéroïdiennes identifiées dans la salive du verrat qui influencent les cochettes via le système olfactif principal (épithélium olfactif) et accessoire (organe voméronasal) (Knox, 2019 ; Sankarganesh et al., 2024). Ces phéromones peuvent avancer la puberté des cochettes et induire le comportement d’œstrus des cochettes et des truies, ce qui facilite la détection de l’œstrus et du moment optimal pour l’IA (Sankarganesh et al., 2022 ; Landaeta-Hernández et al., 2023). Toutefois, un contact direct avec le verrat améliore la proportion de cochettes en chaleur (Knox et al., 2021). Le nombre de cochettes par verrat, qui influe sur le nombre d’interactions mâle-femelle, modifie donc l’efficacité de l’effet mâle (Stančić et al., 2012). Enfin, l’utilisation de phéromones synthétiques sous forme de spray peut avancer l’âge à la puberté et aider la détection de l’œstrus, mais ces composés sont moins efficaces que l’exposition au verrat (Sankarganesh et al., 2021) et ils ne sont pas dans la liste des substances autorisées en AB.
En élevage porcin biologique, la réglementation impose une durée de l’allaitement de 40 jours minimum, ce qui peut conduire à des œstrus en cours de lactation qui peuvent concerner jusqu’à 33 % des truies au-delà de 35 jours d’allaitement, ce pourcentage étant variable en fonction de l’élevage et de la conduite (Ferchaud et al., 2014). Ces femelles se retrouvent alors désynchronisées par rapport à leur bande. Des travaux ont montré que l’effet mâle peut être utilisé pour induire volontairement un œstrus de lactation afin d’inséminer les truies tout en maintenant la lactation pour un sevrage plus tardif. Ainsi, l’exposition à un verrat 15 minutes par jour de truies primipares et multipares à partir de 18 jours après la mise bas, augmente les œstrus de lactation (62 % vs 16 % sans effet mâle), les truies multipares ayant plus d’œstrus de lactation que les primipares (Terry et al., 2014). Cette pratique est peu utilisée en élevage.
Enfin, l’effet mâle est utilisé sur des truies après le sevrage pour stimuler la croissance folliculaire et l’ovulation et diminuer l’intervalle sevrage-œstrus (Kemp et al., 2005). Par exemple, une exposition au verrat trois fois par jour dès deux jours après le sevrage augmente le nombre de truies qui ovulent dans les neuf jours après le sevrage (Kemp et al., 2005).
Les éleveurs porcins en AB n’utilisent pas l’effet verrat pour induire la puberté et synchroniser les cochettes. En effet, ces élevages n’ont souvent qu’un verrat, utilisé prioritairement pour détecter les chaleurs. De plus, déplacer un verrat dans le logement des cochettes peut être dangereux et incompatible avec les règles de biosécurité des quarantaines. Augmenter le nombre de verrats pour avoir des verrats dédiés entraînerait un surcoût important dans ces élevages de petite taille, pour une efficacité incertaine en regard des autres stimulations possibles. Par contre, la plupart des éleveurs en AB et en AC utilisent l’effet verrat pour améliorer l’expression des chaleurs des cochettes pubères et faciliter leur détection.
b. Stimulation par le transport, le changement social ou d’environnement
À notre connaissance, aucune publication scientifique ne montre que le transport des cochettes est un stimulus suffisant pour avancer l’âge à la puberté (âge moyen en élevage : 183 jours, très variable selon les types génétiques, la conduite, les bandes : de 150 à 240 jours). Aucun effet d’un transport d’une ou deux heures ou d’une simulation de transport (bruit et vibration) une fois par semaine n’a été observé pour des cochettes de 120, 140 ou 160 jours d’âge (Stephens & Close, 1984 ; Stephens et al., 1986). Le pourcentage de cochettes de 160 jours d’âge détectées pubères 20 jours après un transport journalier de 20 minutes pendant 10 jours n’est pas significativement différent du lot non transporté (Hughes et al., 1997). D’autres auteurs ont étudié les modifications endocrinologiques ou comportementales après un transport, mais sans comparaison avec un lot témoin non transporté. Une augmentation de la fréquence des pulses de LH et des concentrations plasmatiques d’oestradiol-17beta a notamment été observée après un transport (Einarsson et al., 2008). Par contre, le transport a un effet additionnel avec l’effet mâle, le pourcentage de cochettes en œstrus augmente si ces deux stimuli sont combinés (Hughes et al., 1997).
L’effet d’une mise en groupe des truies après sevrage sur l’apparition de l’œstrus n’est pas clairement élucidé dans la littérature scientifique : le regroupement des truies provoquerait soit une diminution de l’intervalle entre le sevrage et la venue en chaleur soit aucun effet (Kemp et al., 2005). Les truies en chaleur pourraient sécréter des phéromones qui expliqueraient l’avancement de l’œstrus chez les truies à proximité. À l’inverse, des comportements agressifs dans le groupe provoqueraient une élévation durable des taux d’hormones du stress (hormone adrénocorticotrope et cortisol) qui pourraient supprimer le pic de LH et l’ovulation et retarder l’œstrus (Kemp et al., 2005). Les effets de la mise en groupe seraient donc influencés par le stade de reproduction des truies, leur statut social, la taille du groupe et l’espace alloué.
En élevage biologique, les éleveurs renouvellent leurs cochettes majoritairement avec des cochettes nées sur l’élevage (auto-renouvellement), ou avec des femelles achetées à l’extérieur à six mois (le cahier des charges AB limite l’achat de cochettes à 20 % de l’effectif total ou à 40 % si l’éleveur souhaite changer de race pour son cheptel). Le transport des cochettes extérieures, associé au changement d’environnement et de groupe social, induit un œstrus pour une majorité d’entre elles (Calvar, 2016 ; Ferchaud, INRAE, communication personnelle ; Dr Vét. Hervé, IFIP, communication personnelle). Les cochettes issues de l’élevage sont généralement soumises à un changement de bâtiment à la sortie de l’engraissement pour rejoindre le cheptel des truies, avec ou sans transport en camion, parfois à une modification du groupe social et à une mise à jeun soit volontaire avec une restriction de la ration soit induite par le stress du changement d’environnement et de groupe social en cas de compétition pour l’accès à l’auge. Une semaine après ces stimulations, les cochettes sont mises en contact avec un verrat afin de détecter les chaleurs. Ces stimulations provoquent généralement la venue en œstrus de plus de 70 % des cochettes dans la semaine qui suit, mais les résultats sont variables selon les élevages et les bandes (Maupertuis et al., 2020 ; Calvar, 2016 ; Ferchaud et al., 2014). Ces pratiques sont aussi utilisées dans les élevages AC qui ne pratiquent pas de synchronisation hormonale (20 % des élevages) (Boulot, 2022). Cette synchronisation des œstrus par ces stimulations permet à l’éleveur de conduire les cochettes en bandes, mais la variabilité des résultats ne permet pas de synchroniser tout le groupe de cochettes et aboutit souvent à des bandes de taille variable, avec des cochettes décalées qui seront intégrées dans les bandes au sevrage après une lactation raccourcie ou prolongée (Boulot et al., 2018).
c. Photopériode
Contrairement à la laie et au sanglier qui ont une activité sexuelle interrompue de juin à septembre (Mauget, 1982), la truie et le verrat domestiques n’ont pas de véritable anœstrus saisonnier. On observe toutefois une baisse des performances de reproduction des truies en été et au début de l’automne, avec une puberté retardée, une baisse du taux d’ovulation et de la productivité numérique, des durées de l’intervalle sevrage-œstrus et de l’œstrus plus longues et plus irrégulières ce qui diminue l’efficacité des IA, une augmentation des retours en chaleur à 21-30 jours liés à des problèmes de fécondation et de pertes embryonnaires (Quesnel et al., 2005 ; De Rensis et al., 2017). Chez le verrat, on observe une puberté retardée, une baisse des taux de stéroïdes testiculaires, du nombre de spermatozoïdes, de la viabilité des spermatozoïdes et de la libido en été (Claus & Weiler, 1985). Dans la littérature scientifique, cette infertilité saisonnière est attribuée principalement à la température (Peltoniemi & Virolainen, 2006 ; De Rensis et al., 2017) et à la photopériode, ces deux facteurs interagissant entre eux.
La photopériode joue un rôle dans l’infertilité saisonnière, notamment dans le retard de puberté (Evans & O’Doherty, 2001 ; Knox, 2019). Les traitements photopériodiques semblent être un levier important pour pallier cette infertilité. En effet, un programme lumineux qui simule une photopériode décroissante ou des jours courts permet d’éviter le retard de puberté chez la femelle (Paterson & Pearce, 1990) et l’augmentation de l’intervalle sevrage-œstrus (Claus & Weiler, 1985), améliore les taux de fertilité des truies (Peltoniemi & Virolainen, 2006), augmente le nombre de spermatozoïdes et la libido des verrats et avance la sécrétion de testostérone lors de la puberté (Claus & Weiler, 1985 ; Andersson et al., 1998). Toutefois les traitements photopériodiques testés en élevage ne donnent pas des résultats concordants, probablement parce que l’impact des températures élevées et de l’alimentation est marqué chez les porcins (Quesnel et al., 2005). De plus, dans les élevages porcins en plein air, pour des raisons de coût, les bâtiments sont en nombre limité ou inadaptés aux programmes lumineux (cabanes de mise bas dans les champs). Les traitements lumineux appliqués aux petits ruminants en bâtiments ouverts qui utilisent des séquences de jours longs suivis d’un retour en photopériode naturelle (perçue comme des jours courts) pourraient être testés en élevage porcin. La mélatonine, hormone sécrétée par la glande pinéale, étant le principal régulateur des rythmes circadiens, l’utilisation de plantes contenant de la mélatonine pour mimer des jours courts mériterait d’être réfléchie (Dubbels et al., 1995 ; Meng et al., 2017).
D’autres facteurs peuvent moduler l’effet de la saison : conduite d’élevage, interactions sociales entre mâles et femelles (la présence d’un verrat limite le problème de puberté retardée et la baisse de performances en été), interactions sociales entre femelles (le logement des truies en groupe limite l’allongement de l’intervalle sevrage-œstrus, les truies en œstrus stimulant les autres truies), densité (stress social lié à la défense du rang social et compétition à l’auge), nutrition (pallier la baisse de prise alimentaire), génétique (sélection de porcs tolérants à la diminution de la photopériode et aux fortes températures grâce à une corrélation génétique entre ces deux facteurs) (Quesnel et al., 2005 ; Peltoniemi & Virolainen, 2006 ; Sevillano et al., 2016 ; De Rensis et al., 2017).
d. « Flushing » alimentaire
Plusieurs articles scientifiques montrent que des modifications à court terme dans l’alimentation (« flushing ») ont un impact sur la reproduction.
Chez les cochettes prépubères, l’âge à la puberté est avancé par une supplémentation en protéines dans les semaines précédant la puberté (Evans & O’Doherty, 2001), par l’addition de glucose dans la ration de 162 jours jusqu’à la puberté (Li et al., 2016) ou par un régime enrichi en lipides de 104 jours jusqu’à la puberté (Zhuo et al., 2014).
Chez les cochettes cyclées, une augmentation de la ration ou de l’énergie dans la ration pendant la phase lutéale augmente le taux d’ovulation du cycle suivant et la taille de portée (Knox, 2019). Une augmentation de la ration pendant la phase folliculaire augmente la qualité des follicules préovulatoires et les concentrations plasmatiques de progestérone après l’ovulation (Chen et al., 2012).
Pour les truies sevrées, l’intervalle sevrage-œstrus est augmenté si la perte de poids pendant la lactation est trop importante, en particulier pour les jeunes en raison de leur faible poids et de leur faible capacité d’ingestion (Knox, 2019). Les effets négatifs d’une baisse de prise alimentaire en lactation peuvent être atténués par une meilleure planification de l’alimentation en début de gestation (De Rensis et al., 2017). Une augmentation de la ration après la mise à la reproduction réduit l’infertilité saisonnière (Peltoniemi & Virolainen, 2006).
En élevage porcin biologique, la plupart des éleveurs utilisent le « flushing » alimentaire pour les truies entre le sevrage et l’IA ou pour les cochettes avant l’IA, pour améliorer la fertilité et favoriser l’expression des chaleurs. Cette pratique est aussi largement répandue en AC et associée aux bonnes performances de reproduction (Boulot et al., 2014). Le « flushing » est réalisé soit avec une augmentation de la quantité d’aliment distribuée, soit avec un apport supplémentaire d’énergie, de sucre, de vitamines, de sels minéraux et/ou d’oligoéléments.
e. Plantes, homéopathie, produits alternatifs
La conduite en bandes nécessite une synchronisation des cycles des femelles pour faire entrer dans les bandes les jeunes cochettes ou les truies décalées. Plusieurs plantes susceptibles de favoriser cette synchronisation ont fait l’objet d’études scientifiques. L’addition de livèche striée (Ligusticum chuanxiong) dans l’alimentation de cochettes pendant 22 jours permet de bloquer les œstrus, l’arrêt de la distribution déclenche et synchronise les œstrus (Ahmed et al., 2014). Toutefois, ces résultats n’ont pas pu être répétés dans nos conditions (Goudet, communication personnelle). L’effet d’une consommation journalière par des cochettes de plantes riches en flavonoïdes ayant un effet progestagène comme le trèfle violet (Trifolium pratense), l’igname (Dioscorea sp.) et le gattilier (Vitex agnus castus) ou de feuilles de noyer (Juglans regia) riches en progestérone est en cours d’étude (Goudet et al., 2020, 2023, 2024).
En AB, la castration des porcelets est autorisée sous anesthésie et analgésie, mais quelques éleveurs font le choix de ne pas castrer. Chez le porc mâle entier, la distribution dans l’alimentation de valériane (Valeriana officinalis) et passiflore (Passiflora incarnata) tend à diminuer les interactions sociales négatives entre mâles et diminue les lésions cutanées (Casal-Plana et al., 2017) et la distribution de poudre de fruit de gattilier (Vitex agnus castus) diminue le nombre de montes sexuelles et non sexuelles et la concentration plasmatique de testostérone (Vanbauce et al., 2023 ; Goudet et al., 2023).
À l’exception des fourrages, l’utilisation des plantes en élevage est assez rare pour la gestion de la reproduction (Lemoine et al., 2016).
4. Maîtrise de la reproduction chez les bovins
4.1. Objectifs
La puberté intervient chez les génisses laitières entre 9 et 12 mois d’âge (40 à 45 % du poids adulte ; Le Cozler et al., 2009) et chez les génisses allaitantes entre 14 et 17 mois (50 à 55 % du poids adulte ; Grimard et al., 2017). Les génisses doivent avoir atteint 60 % en races laitières (Le Cozler et al., 2009) ou 70 % en races à viande (Grimard et al., 2017) du poids adulte à la mise à la reproduction. La gestation dure en moyenne neuf mois avec des variations selon les races. Après la mise bas, la période du post-partum est caractérisée par l’involution utérine, le démarrage de la lactation et la reprise de l’activité ovarienne cyclique après une phase d’anœstrus post-partum, qui recouvre à la fois les phénomènes d’inactivité ovarienne (femelle non cyclée) et de chaleurs non observées alors que l’ovulation a eu lieu (ovulation silencieuse ou chaleurs non détectées).
Physiologiquement, les bovins ne sont pas des animaux dont la reproduction est saisonnée, en l’absence de taureau les femelles manifestent des cycles œstraux en moyenne tous les 21 jours (avec des variations selon les races, et une cyclicité parfois irrégulière) tout au long de l’année. La mise à la reproduction est possible en toutes saisons, avec des atouts et des contraintes qui diffèrent selon les objectifs de production des éleveurs (Disenhaus et al., 2005). Un effet de la saison de mise à la reproduction peut néanmoins être observé sur la fertilité. Même si cet effet est multifactoriel (production laitière ou allaitante, type de logement, ressources alimentaires, température…), les bovins sont aussi sensibles à la photopériode qui affecte la puberté des génisses et la durée de l’anœstrus post-partum des vaches (Hansen, 1985 ; Dahl et al., 2000). Enfin, de façon similaire à l'effet mâle observé chez les petits ruminants, en troupeaux allaitants, l’exposition au taureau peut permettre d’augmenter la proportion de génisses pubères au moment de la mise à la reproduction (Roberson et al., 1991), mais cet effet est moins spectaculaire que chez les petits ruminants. Cette exposition peut aussi permettre de réduire la durée de l’anœstrus post-partum (Monje et al., 1992 ; Cupp et al., 1993).
Les objectifs de reproduction en élevage bovin sont variables en fonction des systèmes d’élevage (Disenhaus et al., 2005). L’Observatoire de la reproduction des bovins en France (REPROSCOPE : http://www.reproscope.fr/ ; Bidan et al., 2019) permet de définir les systèmes par les caractéristiques i) du troupeau : zone géographique (région, département, grande région d’élevage), type de production (laitier ou allaitant), race, spécialisation de l’exploitation, taille du troupeau (en nombre de vêlages) et ii) de la conduite de la reproduction : saison de vêlages, pourcentage de primipares, taux d’utilisation de l’IA, taux de croisement dans le troupeau, groupement des vêlages selon l’objectif d’âge au premier vêlage.
Les performances de reproduction (à l’échelle individuelle ou de l’élevage) sont décrites grâce à une vingtaine de critères (Bidan et al., 2019) concernant notamment la fertilité et la fécondité des vaches et des génisses, la conduite du renouvellement (taux de primipares), la pratique de l’IA et du croisement, la survie des veaux ou encore le pourcentage de vaches sans vêlage (vaches improductives).
4.2. Pratique de l’IA et impact de la réglementation en AB
L’interdiction d’utilisation des traitements hormonaux d’induction et de synchronisation des chaleurs n’est pas pénalisante pour l’élevage bovin biologique, car la mise à la reproduction est essentiellement réalisée sur chaleurs naturelles, soit par monte naturelle (un taureau est mis en présence d’une vache ou d’un groupe de vaches à saillir), soit par IA. C’est alors l’éleveur qui détecte les chaleurs des femelles par l’observation de signes comportementaux et physiques (Disenhaus et al., 2010 ; Grimard et al., 2017), puis appelle l’inséminateur qui va mettre en place la semence congelée (Gérard et al., 2008). L’éleveur peut avoir recours à des outils d’aide, comme des dispositifs de détection automatisée des chaleurs (par exemple des colliers-activimètres), ou bien des systèmes permettant le suivi de cyclicité des vaches par le dosage automatisé de progestérone (dont le niveau est bas en phase du cycle sexuel correspondant à une chaleur potentielle) dans le lait (Saint-Dizier & Chastant-Maillard, 2018).
Pour les vaches laitières, le taux d’utilisation de l’IA (nombre d’IA premières/cheptel total) est d’environ 88 % alors qu’il n’est que d’environ 15 % pour les vaches allaitantes (France Génétique Élevage, 2022 ; annexe 2). Une bonne détection des chaleurs par l’éleveur ainsi qu’une contention adaptée des femelles sont nécessaires à la pratique de l’IA. Ces contraintes expliquent en grande partie son faible développement dans les troupeaux allaitants. Chez la vache comme chez la génisse, l’utilisation de traitements hormonaux permet d’induire et de synchroniser l’ovulation et le moment d’apparition des chaleurs (Grimard et al., 2003 ; Chastant-Maillard, 2018), afin de pratiquer l’IA sans détection préalable des chaleurs sur un lot de femelles (conduite en bandes), de choisir la période de mise à la reproduction et donc de vêlage des génisses et de réduire l’intervalle vêlage-IA fécondante sur des femelles en anœstrus (réduction de l’intervalle entre vêlages successifs, avancement de la période de vêlage suivante…). Sur la zone de la coopérative d’IA COOPELSO (région Sud-Ouest), pour une population de plus de 100 000 vaches laitières et 80 000 vaches allaitantes inséminées, le bilan 2006-2007 montrait une utilisation des traitements de synchronisation marginale en élevage laitier (1,9 %) et un peu plus développée en élevage allaitant (9,3 %) (Picard-Hagen et al., 2008).
4.3. Comparaison entre agricultures biologique et conventionnelle
Dans une précédente synthèse (Pellicer-Rubio et al., 2009), les pratiques et performances de reproduction avait été décrites dans un échantillon de 20 élevages laitiers et 20 élevages allaitants en AB sur la période 2004 à 2006.
Les résultats sur « la conduite et la génétique des élevages de ruminants bio en France », issus du projet GenAB (financé par France Génétique Élevage) à partir des données nationales 2014, apportent un éclairage actualisé sur les différences entre AB et AC pour la conduite de la reproduction dans les élevages bovins laitiers et allaitants (Roinsard & Le Mézec, 2017).
i) Pour les élevages laitiers en AB, les choix de races étaient différents du conventionnel, avec plus de troupeaux multiraces et moins de troupeaux Prim’holstein, mais 40 % des vaches conduites en AB étaient des Prim'holstein. Concernant la conduite de la reproduction, moins d’élevages pratiquaient 100 % d’IA et davantage d’élevages pratiquaient la monte naturelle dans les élevages laitiers en AB comparés à ceux en AC, mais l’IA restait majoritaire (72 % des vaches élevées en AB étaient inséminées, contre 81 % en conventionnel). L’IA en semence sexée était utilisée en AB : 24 % sur génisses et 6 % sur vaches (respectivement 37 et 6 % au niveau national). Les choix de taureaux d’IA étaient peu différents intrarace, mais les élevages en AB se distinguaient par davantage de croisements, de type laitier notamment (IA en race laitière) mais également de type viande (IA en race allaitante), par rapport aux élevages en AC. Le taux de renouvellement était moins élevé en AB. La conduite des vêlages était semblable en bio et conventionnel avec globalement la même saisonnalité des vêlages (environ 70 % des vêlages étalés tout au long de l’année) ; les intervalles vêlage-vêlage (IVV) étaient semblables, avec des différences entre races, mais pas selon le mode de production AB ou conventionnel. La fertilité (pourcentage d’IA1 fécondantes) était meilleure en AB pour les vaches (+ 5 points) et semblable pour les génisses, par rapport au conventionnel (toutes races confondues).
ii) Pour les élevages allaitants en AB, les choix de races étaient semblables au conventionnel, mais la proportion de troupeaux de races rustiques et limousine était plus forte qu’en conventionnel, aux dépens des races blonde d’Aquitaine et charolaise. Concernant la conduite de la reproduction, le nombre d’IA dans les élevages allaitants était plus faible en AB (8 % de l’ensemble des vêlages dans les élevages en AB étaient issus d’insémination contre 13 % en conventionnel). Les croisements dans les races rustiques étaient moins nombreux en AB (alors que très pratiqués en conventionnel) avec une préférence des clients de vente directe pour des animaux en race pure. La facilité de vêlage était légèrement meilleure dans les élevages en AB, car c’est un critère de sélection important pour ces éleveurs, encore plus que pour les éleveurs conventionnels. Les IVV étaient très semblables en AB et en AC.
iii) Pour les élevages bovins en AB et AC, les potentiels génétiques à l’intérieur d’une même race étaient très proches pour les caractères de production, les éleveurs bio accédant à la même offre génétique que les conventionnels. Les performances de production inférieures en bio étaient surtout dues aux conditions de milieu (conduite alimentaire principalement, plus autonome et plus économe en AB).
D’autre part, des résultats très récents issus d’une enquête menée dans 63 élevages bovins au printemps 2021 (13 éleveurs en AB, 50 éleveurs en AC), dans le cadre du réseau INOSYS Bovins Lait Ouest (Bretagne, Pays de la Loire), permettent de compléter la comparaison des pratiques de conduite de la reproduction entre AB et AC (figure 4 ; données issues d’une enquête décrite par Idele (2022a)). Il ressort de ces résultats d’enquête que tous les élevages AC et AB enquêtés pratiquent l’IA sur tout ou partie du troupeau, avec une conduite mixte (IA et taureau dit « de rattrapage » pour les retours) plus fréquente dans les élevages en AB. L’IPE (insémination par l’éleveur) est pratiquée en AC et en AB, et trois quarts des élevages en AC et en AB utilisent l’IA en semence sexée (pour avoir des femelles). Plus de 90 % des élevages en AC et en AB pratiquent le croisement lait/viande mais le croisement lait/lait est plus fréquent dans les élevages en AB (presque un élevage sur deux). La réalisation de génotypages (pour la sélection génomique) est pratiquée en AC et en AB. La synchronisation hormonale des chaleurs (sur une partie des vaches ou génisses) n’est utilisée que par 20 % des élevages en AC. Les élevages en AC et AB utilisent fréquemment l’échographie pour constater la gestation. Les élevages en AB cherchent davantage à grouper les vêlages et utilisent moins fréquemment les outils d’aide à la décision (comme les détecteurs automatisés de chaleurs ou de vêlages).
Les données récentes présentées ci-dessus, issues d’une part d’une étude au niveau national (projet GenAB) et d’autre part d’une enquête au niveau régional (réseau INOSYS Bovins Lait Ouest), montrent que la pratique de l’IA, qui ne nécessite pas l’utilisation de traitements de synchronisation en élevage bovin, n’est pas très différente entre les élevages AB et AC, mais que la pratique du croisement laitier est plus fréquente en AB (plus grande proportion de troupeaux multiraces, avec davantage de diversité génétique intratroupeau). Les éleveurs en AB utilisent des outils d’aide à la décision et de monitoring de leur troupeau, et pratiquent l’IA en semence sexée.
5. Discussion et conclusion
L’AB est fondée sur la non-utilisation d’intrants chimiques de synthèse. L’utilisation d’intrants est limitée aux substances naturelles ou substances dérivées de substances naturelles, celles autorisées en AB faisant l’objet d’une liste positive limitative (règlement UE 2021/1165).
Les traitements hormonaux d’induction et synchronisation des chaleurs et des ovulations, ainsi que l’utilisation de mélatonine sont donc interdits en AB. Ces restrictions sont contraignantes dans les élevages de petits ruminants en raison de la saisonnalité de la reproduction et du fait que la pratique de l’IA est très dépendante des traitements hormonaux de synchronisation. En élevage porcin, l’interdiction des traitements hormonaux pénalise l’efficacité de la conduite en bandes, mais pas la pratique de l’IA qui est réalisée sur chaleurs naturelles synchronisées par le sevrage, en AB et en AC. Quant aux élevages bovins, la reproduction n’est pas pénalisée car possible toute l’année, par monte naturelle (majoritaire en élevage allaitant) ou par IA (majoritaire en élevage laitier) sur chaleurs naturelles.
Parmi les pratiques alternatives aux traitements hormonaux actuellement disponibles, l’objectif de naturalité en AB explique l’intérêt des éleveurs pour le « flushing » alimentaire et l’effet mâle dans toutes les espèces. Par contre, les techniques de désaisonnement de la reproduction sans hormones (traitements lumineux) chez les petits ruminants sont peu utilisées en AB, surtout en élevage ovin allaitant, pour des raisons financières et de compatibilité avec la philosophie du bio, bien qu’elles ne soient pas interdites par la réglementation. En effet, la reproduction à contre-saison nécessite une complémentation alimentaire plus importante (alimentation hivernale en bâtiment des animaux à forts besoins, brebis en lactation, engraissement des agneaux), ce qui augmente les coûts de l’exploitation et diminue la rentabilité de l’élevage si la plus-value des produits vendus à contre-saison n’est pas suffisante. De plus, l’obligation du lien au sol en AB impose qu’une partie importante de l’alimentation animale provienne de l’exploitation (pâturage et fourrage notamment) ou de la région. Ceci a des incidences économiques fortes pour les éleveurs compte tenu du coût d’achat plus élevé des aliments certifiés AB. Ce coût supplémentaire n’est pas, en général, compensé par une valeur ajoutée à la vente des agneaux produits en contre-saison, mais il peut l’être en système laitier AB grâce à une meilleure valorisation du prix du lait (Experton et al., 2018). En outre, l’utilisation de traitements lumineux s’éloigne de la notion de respect des cycles naturels des animaux et pourrait être mise en cause dans un contexte d’utilisation responsable de l’énergie, pourtant le règlement en AB ne les interdit pas. Le statut réglementaire de l’usage des traitements lumineux fait l’objet de discussions au sein du CNAB (Conseil national de l’agriculture biologique).
Chez les professionnels de l’élevage, l’interprétation de la réglementation ne fait pas l’unanimité. Le règlement AB précise que « la reproduction ne doit être ni accélérée ni ralentie par des traitements à base d’hormones ou d’autres substances ayant un effet analogue, sauf dans le cadre d’un traitement vétérinaire appliqué à un animal individuel », « des hormones ou des substances analogues en vue de maîtriser la reproduction ou à d’autres fins (par exemple, induction ou synchronisation des chaleurs) ne peuvent pas être utilisées ».
Ce règlement indique clairement que le recours à toute hormone ou substance ayant un effet analogue aux hormones, serait interdit quels que soient l’origine de la substance en question (animale ou végétale, naturelle ou de synthèse) et l’objectif d’utilisation poursuivi (sauf s’il s’agit d’un traitement individuel appliqué à des fins thérapeutiques, avec un nombre de traitements/animal/an limité). Toutefois, le terme « analogue » soulève des interrogations et suscite le débat sur la pertinence et l’acceptabilité en AB de certaines alternatives aux traitements hormonaux en cours d’étude.
Par exemple, peut-on classer les phéromones impliquées dans l’effet mâle dans la catégorie des substances analogues aux hormones ? Indépendamment de cette question, en AB, d’après l’annexe 1 du règlement UE 2021/1165, les phéromones et autres substances sémio-chimiques sont autorisées en production végétale dans la lutte contre les insectes ravageurs uniquement dans des pièges à insectes (pour ne pas toucher la plante, la cible étant l'insecte), mais elles ne sont pas, à ce jour, autorisées en production animale (car la cible est alors l'animal d’élevage).
De même, le recours à des plantes ou extraits de plantes contenant des substances qui seraient utilisées pour contrôler la reproduction, par des mécanismes d’action différents de ceux des hormones, serait-il en conformité avec le cahier des charges AB ? Le cas échéant, l’usage d’une plante ou d’un mélange de plantes pour maîtriser la reproduction, ne nécessiterait-il pas l’obtention d’une autorisation de mise sur le marché (AMM) ?
Par rapport à ces questionnements, il est nécessaire de prendre en compte la réglementation concernant la pharmacie vétérinaire. Ainsi, d’après la synthèse récente de Rostang et al. (2022), les produits dits alternatifs (extraits de plantes ou huiles essentielles), selon le choix fait par l’industriel au moment de la mise sur le marché, peuvent être commercialisés comme médicament, comme biocide ou comme additif, en répondant aux exigences règlementaires spécifiques requises ; mais le plus souvent, ces produits ne répondent à aucune de ces règlementations, et sont pour autant commercialisés. Cela soulève alors un certain nombre de questions sur leur qualité, leur innocuité (pour l’animal ou pour le consommateur), leur efficacité et leur mode de commercialisation (vente libre). Les additifs destinés à l’alimentation animale ne peuvent être mis sur le marché que s’ils ont été autorisés à la suite d’une évaluation scientifique menée par l’EFSA (European Food Safety Authority) et démontrant que l’additif n’a aucun effet néfaste ni sur la santé humaine et animale, ni sur l’environnement (Rostang et al., 2022). Enfin, toute substance (ou toute association de substances) qui a pour but d’être utilisée chez l’animal ou de lui être administrée en vue de restaurer, de corriger ou de modifier des fonctions physiologiques en exerçant une action pharmacologique, immunologique ou métabolique, est considérée comme médicament vétérinaire. De ce fait, toute spécialité pharmaceutique ne peut être commercialisée qu’après obtention d'une autorisation de mise sur le marché (AMM ; Rostang et al., 2022).
Ainsi, la prise en compte de la rentabilité des élevages et du fond philosophique et réglementaire en AB limite l’utilisation de certaines stratégies alternatives disponibles à ce jour pour la maîtrise de la reproduction, notamment dans les élevages de petits ruminants. Toutefois quelle que soit l’espèce considérée, des conduites d’élevage sont possibles en AB permettant la rentabilité de l’élevage sans utilisation d’hormones. Dans les exploitations ovines et caprines, une bonne maîtrise de la saisonnalité de la reproduction sans hormones nécessite alors de combiner des stratégies (i. e. traitements lumineux et effet mâle ; Pellicer-Rubio et al., 2019). Certaines conduites alimentaires en élevage ovin allaitant permettent d’atteindre une bonne autonomie alimentaire tout en intégrant la reproduction à contre-saison (Migné et al., 2021). Dans le cadre d’une étude sur la réduction de l’usage des traitements hormonaux en élevage porcin conventionnel, il s’est avéré que les anciens utilisateurs de gonadotrophines n’utilisent pas de pratiques alternatives spécifiques, leur démarche de progrès étant associée à une amélioration globale de la conduite d’élevage avec un travail sur l’alimentation, l’état corporel, les pratiques de reproduction (détections des chaleurs, IA…) et le logement (température, lumière) (Boulot, 2022). Dans les élevages bovins, les performances de reproduction sont comparables et la conduite de la reproduction est assez similaire entre les élevages AB et AC : par exemple, les éleveurs en AB utilisent eux aussi des outils d’aide à la décision et de monitoring de leur troupeau. Ceci souligne l’importance d’un haut niveau de compétences techniques des éleveurs et conseillers en élevages AB et d’une meilleure appropriation des travaux de recherche applicables sur le terrain en améliorant le lien entre les différents maillons de la chaîne (recherche, développement, intervenants en élevage, éleveurs).
Enfin, le ressenti des éleveurs et des intervenants en élevage doit également être pris en compte pour évaluer l’acceptabilité des stratégies alternatives proposées pour la conduite de la reproduction sans hormones, en intégrant les spécificités de chaque filière et les contraintes physiologiques des espèces considérées. Des enquêtes qualitatives menées auprès d’éleveurs de petits ruminants en AC et AB (Lurette et al., 2016 ; annexe 3b) et d’intervenants en élevages caprins et ovins laitiers (Barthélémy, 2022 ; données non publiées ; annexe 3a) ont montré que les ressentis peuvent se rejoindre entre éleveurs en AB et AC. Ainsi, par rapport à l’utilisation des traitements hormonaux de synchronisation, une partie des éleveurs en AC enquêtés était réservée voire défavorable (annexe 3b ; Lurette et al., 2016), tout comme certains intervenants (annexe 3a ; Barthélémy, 2022), en lien avec les attentes sociétales.
Le choix des pratiques alternatives pour la maîtrise de reproduction dans les élevages en AB est donc le résultat d’un savant équilibre entre enjeux financiers, réglementaires et éthiques.
Remerciements
Nous remercions Sarah LOMBARD (ITAB) et Nicolas KOLYTCHEFF (Chambre d’agriculture de Bretagne) pour la relecture du manuscrit concernant l’espèce porcine ; Antoine ROINSARD (ITAB), Pascale LE MEZEC & Jean GUERRIER (Institut de l’Élevage) pour la synthèse des résultats bovins (situation nationale 2014) issus du projet GenAB ; l’équipe Bovins-Lait Ouest (Bretagne-Pays de la Loire) du dispositif INOSYS-Réseaux d’élevage (éleveurs, ingénieurs Chambres d’agriculture et Idele) pour les résultats s’appuyant sur l’enquête « Maîtriser les frais d’élevages en exploitations laitières » menée en 2021.
Annexes
Caprins laitiers (chèvres)a | Ovins laitiers (brebis)b | Ovins allaitants (brebis)b | Bovins laitiers (vaches)b | Bovins allaitants (vaches)b | Porcins (truies)c | |
Cheptel national | 936 000 | 1 560 000 | 3 577 000 | 3 573 000 | 3 773 000 | 928 000 |
Cheptel bio | 102 807 | 163 880 | 261 948 | 291 757 | 230 339 | 19 285 |
Part du cheptel bio (%) | 11 | 11 | 7 | 8 | 6 | 2 |
Nombre total d'exploitations | 6 054 | 4 974 | 28 826 | 51 000 | 54 000 | 19 000 |
Nombre d'exploitations bio | 1 295 | 775 | 2 333 | 5 222 | 6 599 | 703 |
Part des exploitations bio (%) | 21 | 16 | 8 | 10 | 12 | 4 |
Régions qui concentrent plus de 70 %du cheptel national | Nouvelle-Aquitaine Pays de la Loire Auvergne-Rhône-Alpes Occitanie Centre-Val de Loire | Occitanie Nouvelle-Aquitaine | Occitanie Nouvelle-Aquitaine Auvergne-Rhône-Alpes Provence-Alpes-Côte d'Azur | Bretagne Normandie Pays de la Loire Auvergne-Rhône-Alpes Grand Est | Nouvelle-Aquitaine Auvergne-Rhône-Alpes Bourgogne-Franche-Comté Occitanie Pays de la Loire | Bretagne Pays de la Loire Nouvelle-Aquitaine |
Régions qui concentrent plus de 70 % du cheptel bio national | Auvergne-Rhône-Alpes Nouvelle-Aquitaine Pays de la Loire Occitanie | Occitanie | Occitanie Nouvelle-Aquitaine Auvergne-Rhône-Alpes Provence-Alpes-Côte d'Azur | Bretagne Pays de la Loire Normandie Auvergne-Rhône-Alpes Grand Est | Nouvelle-Aquitaine Occitanie Pays de la Loire Auvergne-Rhône-Alpes Bourgogne-Franche-Comté | Nouvelle-Aquitaine Bretagne Pays de la Loire Bourgogne-Franche-Comté |
Espèces | Cheptel national | Nombre de femelles inséminées | Proportion d'IA (en % du cheptel national) | Modalités d'IA |
Vaches laitièresa | 3 573 000 | 2 296 452 vaches | 88 | Majoritairement IA sur chaleurs observées |
847 298 génisses | ||||
Vaches allaitantesa | 3 773 000 | 359 456 vaches | 15 | IA sur chaleurs observées ou IA à temps fixe après TH |
192 255 génisses | ||||
Brebis laitièresb | 1 560 000 | 638 892 | 41 | IA à temps fixe après TH |
Brebis allaitantesb | 3 577 000 | 104 487 | 3 | IA à temps fixe après TH |
Chèvres laitièresc | 936 000 | 62 213 | 7 | Majoritairement IA à temps fixe après TH |
Truiesd | 928 000 | > 835 000 | > 90* | Majoritairement IA sur chaleurs observées |
Filière caprine | Filière ovine laitière | |
Bassins de production | Poitou-Charentes, Auvergne-Rhône-Alpes, Nord Occitanie | Nord Occitanie, Pyrénées-Atlantiques, Corse, Hors bassins traditionnels : PACA |
Nb d’intervenants enquêtés | 15 | 15 |
Nombre d’élevages suivis | ≈ 1 180 (dont ≈ 80 en AB) | ≈ 1 138 (dont ≈ 120 en AB) |
Ressentis sur les traitements hormonaux d'induction et de synchronisation des chaleurs et ovulations | Les avis « pour » : – efficace, facile d’utilisation ; – une réelle aide dans la conduite de la reproduction et essentiel pour l’IA : « le bénéfice de l’utilisation de la synchronisation et de l’IA et donc de l’eCG est bien plus important pour les éleveurs que l’arrêt des synchronisations pour des raisons éthiques » ; – traitements hormonaux nécessaires en l’absence de « solutions » pour inséminer aussi efficacement : « toute une filière est en jeu » ; – « pilier de la génétique », pour les schémas de sélection et le progrès génétique ; les traitements hormonaux, par la génétique, améliorent les conditions sanitaires des troupeaux (par exemple résistance à la tremblante) ; – utiles aussi indirectement pour l’AB car les élevages en AB peuvent aussi bénéficier des avantages de la sélection par l’achat de femelles et de mâles chez des éleveurs sélectionneurs. – les hormones employées ne sont pas des produits « étrangers » à la physiologie de l’animal : « Une hormone, si on réfléchit, c’est naturel » ; – d’après les éleveurs (avis retranscrits par les intervenants) : protocole efficace « calé, connu et maîtrisé depuis des années ». | |
Les avis « contre » : – problème éthique par rapport au mode de production de l’eCG, exprimé par des intervenants et/ou des éleveurs suivis par les intervenants interrogés « Très peu d’éleveurs savaient comment c’était produit, ils sont tombés des nues » ; – image de l’élevage (auprès des consommateurs) affectée par l’utilisation d’hormones pour la reproduction ; – plusieurs intervenants rapportent que certains éleveurs « commencent à se poser des questions », s’intéressent aux alternatives ; – inadéquation entre les attentes sociétales et la demande des consommateurs : « l’aberration ce n’est pas d’utiliser les hormones mais de manger du fromage à Noël ! La contre-saison est non naturelle, la lactation longue aussi ». | ||
Les avis sur les conséquences de l’arrêt des traitements hormonaux pour la pratique de l’IA : des avis partagés entre deux scénarii envisagés par les intervenants, l’arrêt de l’IA et de la sélection génétique versus la réorganisation de la filière et du schéma de sélection. | ||
Ressentis sur les traitements photopériodiques | Les avis « pour » : – protocole efficace à condition de respecter rigoureusement sa mise en œuvre ; – intéressant pour la rentabilité des élevages si le prix du lait d’hiver est attractif et « indispensable si les français veulent manger du fromage à Noël » ; – ne nuit pas au bien-être des animaux et apparait plus naturel que les hormones ; – d’après les éleveurs (avis retranscrits par les intervenants) : « ça fonctionne et cela permet de faire du lait bien payé ». | Les avis « pour » : – intéressant pour les éleveurs en AB qui « luttent » les agnelles en contre-saison ; – intéressant dans un contexte « sans hormones » ; – d’après les éleveurs (avis retranscrits par les intervenants) : intéressant en AB pour les éleveurs qui veulent désaisonner, les éleveurs qui utilisent ces traitements sont très satisfaits. |
Les avis « contre » : – coût d’investissement des installations ; – coûts énergétiques supplémentaires (seulement rentable si le « prix du lait d’hiver est plus haut qu’au printemps ») ; – difficile à mettre en place à grande échelle, cela mériterait d’être simplifié pour la diffusion ; – protocole difficile à respecter pour les « éleveurs têtes en l’air » ce qui conduit donc à des échecs de reproduction ; – la conduite en lactations longues est plus simple pour produire du lait d’hiver ; – d’après les éleveurs (avis retranscrits par les intervenants) : source de stress supplémentaire, surcroît de travail, contre le principe de naturalité en AB. | Les avis « contre » : – pas nécessaire si la race de brebis désaisonne naturellement ; – pas nécessaire si des traitements hormonaux peuvent être utilisés ; – difficile à mettre en place dans certains systèmes d’élevage (pâturage, transhumance) ; – coûts énergétiques supplémentaires ; – d’après les éleveurs (avis retranscrits par les intervenants) : manque de connaissances sur les protocoles photopériodiques, main d’œuvre et charge de travail nécessaires sont un frein. |
Filière caprine | Filière ovine laitière | |
Bassins de production | Poitou-Charentes, Centre, Rhône-Alpes | Rayon de Roquefort, Pyrénées-Atlantiques |
Nb d'éleveurs enquêtés | 100 | 99 |
Ressentis sur les traitements hormonaux d'induction et de synchronisation des chaleurs et ovulations | Avis des éleveurs en AB (n = 76) : – les éleveurs caprins en AB se prononcent clairement contre (54 % d'avis défavorables) ; – les éleveurs ovins laitiers en AB sont partagés entre avis défavorables (32 %) et réservés (68 %). Les avis « pour » : – les éleveurs reconnaissent l'intérêt pour grouper les mises-bas et désaisonner la production laitière. Les avis « contre » : – les éleveurs en AB jugent les hormones « contre-nature » ; – certains éleveurs en AB estiment que l’IA est « non naturelle » et va donc à l’encontre de leur philosophie ; – présence de résidus dans le lait et la viande liés à l’utilisation des traitements hormonaux ; – risque pour la santé humaine et animale. | |
Avis des éleveurs en AC (n = 123) : – les avis des éleveurs sont répartis de façon presque égale entre « favorable » et « ouvert » versus « réservé » et « défavorable ». Les avis « pour » : – les éleveurs montrent un intérêt pour le désaisonnement, l'organisation du travail (grouper les chaleurs) et pour l'IA. Les avis « contre » : – raisons éthiques et financières ; – les éleveurs expriment un besoin de méthodes alternatives « c'est une habitude. On a une absence de choix pour la synchronisation ». |
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Résumé
Le cahier des charges en agriculture biologique (AB) interdit les traitements à base d’hormones ou substances analogues en vue de maîtriser la reproduction. En AB, la reproduction des petits ruminants est possible à contre-saison grâce à l’effet mâle. Les traitements lumineux sans mélatonine pour désaisonner la reproduction peuvent aussi être appliqués en bâtiments ouverts et sont compatibles avec le pâturage mais peu utilisés sur le terrain. L’insémination animale (IA) est peu répandue pour les ovins et caprins en AB, elle peut être réalisée sur chaleurs naturelles (saison sexuelle) ou induites et synchronisées par effet mâle (contre-saison). Dans les deux cas, les IA s’étalent sur plusieurs jours et nécessitent une détection des chaleurs préalable. En élevages caprins, la conduite en lactation longue est également une alternative pour désaisonner la production laitière. Dans les élevages porcins en AB, l’effet mâle peut faciliter l’induction de la puberté des cochettes, la stimulation d’œstrus de lactation, et la diminution de l’intervalle sevrage-œstrus ; toutefois il est utilisé principalement pour améliorer l’expression des chaleurs. La stimulation par le transport et le changement social et/ou d’environnement est largement utilisée pour induire et synchroniser les œstrus des cochettes de renouvellement. Chez les bovins, l’interdiction des traitements hormonaux n’est pas pénalisante en AB, car la reproduction est possible toute l’année par monte naturelle (majoritaire en élevage allaitant) ou par IA (majoritaire en élevage laitier) sur chaleurs naturelles. Dans toutes les espèces, le « flushing » alimentaire avant la mise à la reproduction est pratiqué dans le but d’améliorer la fertilité. La mise en œuvre de ces pratiques en AB est le résultat d’un équilibre entre enjeux financier, réglementaire et éthique.
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